Pour éviter que ses revenus baissent considérablement à la retraite, il est conseillé de se constituer un patrimoine qui générera des ressources complémentaires. Ça, c’est la théorie ! Mais en pratique, comment procéder ? Quand, combien et comment faut-il épargner ? Les réponses d’une conseillère patrimoniale.

1) Quand faut-il commencer à épargner pour la retraite ?

Il n’est jamais trop tard pour penser à la retraite, ni trop tôt d’ailleurs ! En théorie, il est conseillé de commencer à se constituer une épargne dédiée vers 40 ans, une fois sa résidence principale acquise ou en fin de remboursement. Mais, compte tenu des réformes du système de retraite par répartition, certains conseillers en gestion de patrimoine incitent à agir plus précocement. « Il faut commencer à épargner le plus tôt possible car les caisses de retraite accusent de lourds déficits et donc que la probabilité d'obtenir une pension suffisante, pour les personnes âgées actuellement de moins de 40 ans, est faible », explique ainsi Morgane Mathot, ingénieure patrimoniale chez L’Institut du Patrimoine.

Et cette injonction à mettre de côté concerne tous les salariés. Quelle que soit sa position au sein de l’entreprise, le passage à la retraite occasionne une baisse de revenus. « Les employés de la fonction publique disposent d'un taux de remplacement de 50%, quand les cadres du secteur privé reçoivent une pension équivalant à 30%, 40% de leur dernier revenu », fait ainsi remarquer l’experte patrimoniale.

2) Combien faut-il mettre de côté ?

En théorie, il est préférable d’épargner chaque mois et de distinguer l’épargne dédiée à sa retraite de l’épargne de précaution dans laquelle on puise en cas de dépenses imprévues. « Le plus favorable serait d'allouer une partie du salaire à créer une enveloppe pour la retraite et de ne pas puiser dedans pour d'autres projets », résume Morgane Mathot.

Et concrètement, quel est le montant idéal ? Réponse de l’experte : cela dépend du complément de retraite souhaité. « En 2017, la retraite moyenne en France atteint 1 280 euros nets mensuels. Mais les Français souhaitent disposer de 2 500 euros par mois. Pour obtenir sous forme de rente ce complément, il faudrait mettre 500 euros de côté par mois à partir de 30 ans », souligne-t-elle. Pour parvenir à ces 500 euros mensuels nets d’impôts, l’ingénieure patrimoniale s’appuie principalement sur deux hypothèses. L’épargnant souscrit une assurance-vie rémunérée en moyenne 3% par an. Arrivé à 62 ans et à la retraite, il choisit d’effectuer un rachat total – ou sortie en capital – et la taxation au prélèvement forfaitaire unique (12,8%). Avec ces mêmes prérequis, « si l'on commence à épargner à 40 ans, il faut mettre 750 euros par mois », constate Morgane Mathot.

Problème, le rendement de l’épargne des ménages n’atteint pas toujours 3%. Comme le soulignent les statistiques de la Banque de France, ce sont les encours sur les comptes courants qui progressent le plus rapidement. Ils ont ainsi augmenté de près de 22 milliards d’euros au premier semestre 2018, soit autant que sur les livrets. Deux supports qui ne rapportent rien, ou pas grand-chose. En moyenne, les dépôts bancaires des ménages (livrets, dépôts à vue, comptes à terme et plans d’épargne-logement) ont rapporté 0,89% en août, selon les dernières données de la Banque de France.

3) Faut-il mieux ouvrir une assurance-vie ou un PERP ?

Pour améliorer le rendement de leur épargne retraite, les salariés peuvent diversifier leur investissement et souscrire des produits bloqués et/ou risqués. Des supports se prêtent bien à cet objectif en permettant notamment de moduler le risque en fonction de l’horizon de placement : l’assurance-vie et les plans d’épargne dédiés à la retraite, comme le plan d’épargne retraite populaire (PERP).

Première différence : les sommes placées sur les supports dédiés à l’épargne-retraite ne peuvent être débloquées avant le départ à la retraite, en dehors de quelques cas de sortie anticipée comme l’achat de sa résidence principale, le décès du conjoint, le surendettement ou l’expiration des droits au chômage. A l’inverse, le capital versé sur une assurance-vie est récupérable à tout moment sous forme de rente ou de capital. S’agissant du PERP, la sortie en capital n’est possible que partiellement, à hauteur de 20%, le reste de l’épargne faisant l’objet d’une rente viagère.

Deuxième différence : le régime fiscal. PERP et assurance-vie bénéficient tous deux d’un cadre fiscal propre. Le plan d’épargne retraite populaire s'avère principalement un outil de défiscalisation. « Le PERP a des avantages fiscaux très intéressants puisque tous les versements que l’on fait permettent de réduire sa base imposable et par conséquent son montant d’impôt », rappelle l’ingénieure patrimoniale. « Mais, au moment de la sortie, la fiscalité est plus contraignante », ajoute-t-elle. « Les calculs de rente sont très compliqués à comprendre. Quand l'épargnant sort en rente, il est imposé à sa tranche marginale d’imposition. Donc si son niveau de vie a baissé alors il peut avoir une petite fiscalité sur les rentes perçues. Mais s'il reste sur des tranches marginales de 30% ou plus, ce n’est pas très intéressant [fiscalement, NDLR] de recevoir des rentes ».

A l'inverse, « l'assurance vie offre à la sortie des choix fiscaux plus intéressants. La fiscalité ne porte que sur les intérêts et il est possible d'adapter ses rachats en fonction de sa tranche marginale d'imposition ou d'opter pour le PFU [de 12,8%], généralement plus avantageux », analyse Morgane Mathot.

En savoir plus sur la fiscalité de l'assurance-vie et du PERP

4) Faut-il prendre des risques avec l’épargne pour la retraite ?

Plan d’épargne retraite et assurance-vie fonctionnent de la même manière. L’épargnant sélectionne les supports, disponibles dans le cadre de son contrat, sur lesquels il investit. Il peut donc sécuriser son épargne en optant pour des fonds euros dont le capital est garanti ou alors investir sur des unités de compte plus ou moins risqués selon leur sous-jacent.

Indépendamment de l’aversion au risque du salarié, c’est principalement son horizon de placement qui détermine la composition de son enveloppe. Ainsi, pour la conseillère patrimoniale interrogée, « une personne qui a entre 30 et 40 ans doit privilégier des placements avec des fonds dynamiques car sa retraite est encore lointaine ». En revanche, « entre 50 et 55 ans, l’horizon d'épargne est plus faible et la personne va au contraire sécuriser son capital ».

Et si l’on se penche plus tardivement sur sa retraite ? « Si l'on se réveille vers 45 ans, il faut privilégier un portefeuille équilibré en investissant une partie de son épargne sur des fonds euros et une autre sur des supports dynamiques, en prenant toutefois quelques précautions », explique Morgane Mathot. Concrètement, cette dernière conseille d’intégrer à son assurance-vie des produits structurés « qui ont une durée de maturité de 10 ans et disposent de barrières de protection contre la perte en capital ». L’épargnant peut également miser sur l’immobilier, en direct s’il a le capital nécessaire et s’il souhaite transmettre cet investissement à ses héritiers, ou en misant sur la pierre-papier. « Au lieu de réaliser des placements financiers, l'épargnant peut aussi investir dans l’immobilier en direct car à 45 ans, on a encore le temps de contracter et rembourser un crédit immobilier avant sa retraite », souligne Morgane Mathot. « Il peut également investir dans des SCPI, dont le rendement annuel moyen oscille entre 3 et 3,5% », ajoute-t-elle. En comparaison, la rentabilité d’un investissement dans des résidences étudiantes ou pour séniors tourne autour de 4,5%, d’après la responsable patrimoniale.

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5) Et si on cotisait à une assurance-dépendance ?

Avec la retraite se profile un nouveau risque : celui de la perte d’autonomie et des frais qui vont avec… Les structures adaptées pouvant coûter plusieurs milliers d’euros par mois. Selon le Haut conseil du financement de la protection sociale, entre 1,7 et 2,2 millions de personnes âgées seront dépendantes en 2040.

De fait, les assureurs se positionnent de plus en plus sur l’assurance dépendance. ils proposent des contrats revenant généralement entre 20 euros et 200 euros par mois selon les garanties incluses et l’âge de souscription. Certaines assurances couvrent à la fois la dépendance totale et partielle et permettent ainsi d’obtenir une indemnisation dès les premiers signes de perte d’autonomie. Onéreuses, ces assurances s’adressent aux personnes n’ayant pas constitué un patrimoine suffisant pour faire face à la perte d’autonomie.