Les députés ont voté jeudi soir la création d'un compte personnel de prévention de la pénibilité, prévu dans le projet de loi sur les retraites débattu depuis lundi en première lecture.

La gauche s'est massivement prononcée en faveur de la création du compte pénibilité, qui permettra à partir du 1er janvier 2015 aux salariés de droit privé d'accumuler des points en fonction du temps passé en situation de pénibilité pour se reconvertir, travailler à temps partiel ou partir plus tôt à la retraite. L'UMP et l'UDI se sont abstenus. La ministre des Affaires sociales Marisol Touraine a défendu une « avancée historique », affirmant que « pendant 20 ans la droite n'a pas fait, notre honneur à nous c'est de faire ». Les entreprises, qui financeront le dispositif, seront « incitées à améliorer les conditions de travail », a-t-elle aussi assuré.

UMP et UDI ont rappelé que la réforme des retraites de 2010 avait introduit des départs anticipés pour pénibilité, mais pour les salariés souffrant d'incapacité en raison d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail. L'opposition, qui a brocardé un projet de loi renvoyant trop souvent à des décrets, a cherché en vain à exempter les PME-TPE d'un nouveau dispositif « illisible » qui « pose des problèmes d'application, afin qu'on ne retombe pas dans les difficultés des 35 heures », selon les mots du centriste Philippe Vigier.

La droite a aussi plaidé en faveur de négociations de branche, pour un dispositif « plus proche du terrain », tandis que le ministre du Travail Michel Sapin a vigoureusement défendu un « cadre national ». Le Front de gauche a pour sa part estimé que les salariés en situation de pénibilité « attendent tous de pouvoir partir plus tôt », or avec la réforme gouvernementale « ils auront juste la possibilité de partir à 60 ans ».

Dix critères de pénibilité

Tout salarié ayant été exposé à l'un des dix critères de pénibilité qui ont été retenus par les partenaires sociaux (travail de nuit, températures extrêmes, bruit, etc.) peut accumuler des points, dont les modalités d'acquisition et d'utilisation seront fixées par décret, avec un plafond fixé à 100 points. Chaque trimestre d'exposition à un facteur de pénibilité donnera droit à un point.

Quelque 300.000 personnes devraient à terme utiliser chaque année des points accumulés sur leur compte. Le coût du dispositif est estimé à 500 millions d'euros en 2020, 2,5 milliards d'euros en 2040. Les fonctionnaires bénéficient pour leur part des carrières « actives » pour partir plus tôt en retraite.

Le critère d'exposition à des risques psycho-sociaux rejeté

Le dispositif gouvernemental n'a été retouché qu'à la marge en séance jeudi soir, en prévoyant en particulier que le gouvernement fasse un rapport avant début 2015 sur la reconversion des salariés, notamment seniors, et que les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) émettent des avis sur les mesures de prévention prises dans les entreprises.

Le critère d'exposition à des risques psycho-sociaux, demandé par le Front de gauche, et celui de l'exposition à la radioactivité pour les travailleurs du nucléaire, promu par les écologistes, n'ont pas été retenus comme critères de pénibilité.