Avec l'entrée en vigueur du prélèvement à la source en 2019, les revenus que vous toucherez cette année ne seront jamais imposés, sauf exception... Mais, avec cette « année blanche », qu'en est-il des déductions, réductions et autres crédits d'impôt ?

Dans quelques semaines, vous allez remplir votre déclaration de revenus 2017, en vue de l'impôt à payer en 2018. Comme d'habitude. Puis s'enclenchera la réforme du prélèvement à la source : en 2019, l'impôt sera prélevé directement sur les salaires ou autres revenus de la même année.

Plus de détails sur la réforme : Prélèvement à la source : quels revenus sont concernés ?

Dans ce schéma, les revenus touchés en 2018 seront donc « oubliés », d'où l'idée d'une « année blanche » d'imposition. Le gouvernement prend toutefois bien soin de parler d'« année de transition » dans sa communication à destination des contribuables. Car, dans les faits, tout est mis en œuvre pour éviter abus, optimisation et revenus « oubliés ».

Ainsi, au printemps 2019, vous compléterez votre déclaration annuelle, récapitulant les revenus touchés pendant l'année 2018. Mais l'Etat a prévu un mécanisme ponctuel : un crédit d'impôt de modernisation du recouvrement (CIMR) qui viendra annuler la part d'impôt sur les revenus principaux habituels. Objectif : fiscaliser les revenus exceptionnels (1) de l'année 2018, s'il y en a. Le solde d'impôt sera à régler en août ou septembre 2019. C'est à l'occasion du paiement de ce solde éventuel que seront régularisés crédits et réductions d'impôt.

Ce qui ne change pas : les crédits d'impôt

Pour les crédits d'impôt, qu'il s'agisse de l'« année blanche » ou du prélèvement à la source en rythme de croisière, la réforme ne change rien ! Car l'actuel décalage d'un an perdure : « En 2019, les foyers percevront les crédits d'impôt dus au titre de 2018, et en 2020 ceux dus au titre de 2019 », appuie Bercy dans l'une de ses nombreuses plaquettes de vulgarisation.

Pour résumer, au printemps 2019, vous devrez remplir la déclaration portant sur l'année 2018, ce qui permettra à l'administration fiscale de prendre en compte vos crédits d'impôt éventuels pour 2018. L'Etat vous les restituera en août ou septembre 2019 au moment du solde de l'impôt.

Emploi à domicile et garde d'enfant : un acompte dès janvier 2019

Si vous percevez un crédit d'impôt pour cause de garde d'enfant ou de services à domicile, ou si vous bénéficiez de la réduction d'impôt Ehpad, l'Etat a prévu le versement d'une avance pour assouplir la transition. Un acompte de 60%, calculé sur la base du crédit d'impôt 2018, sera versé dès la mi-janvier 2019. Le solde, soit environ les 40% restants, vous sera restitué par le fisc au moment du solde de l'impôt à la fin de l'été 2019.

Réduction d'impôt : une restitution exceptionnelle

Pour les réductions, le principe est globalement le même que pour les crédits d'impôt : le décalage d'un an est conservé, avec une régularisation lors de l'été suivant la déclaration. Pour les revenus 2018, l'année blanche change toutefois la donne : si vous n'avez pas de solde d'impôt à régulariser en 2019, au titre de la déclaration de revenus 2018, il ne peut plus y avoir de réduction... L'Etat a donc prévu un dispositif spécifique pour 2018 pour permettre de transformer une réduction en restitution financière.

Plus concrètement, le CIMR évoqué plus tôt s'impute à l'impôt sur les revenus 2018 après réductions et crédits d'impôt : par conséquent, les réductions 2018 vous seront « rendues » à l'été 2019, à nouveau, au moment du solde.

L'exemple d'un don aux œuvres

Vous donnez 100 euros à un organisme d'aide aux personnes en difficulté lors de l'année 2018. Ce don vous permet de bénéficier d'une réduction d'impôt de 75 euros. Il n'aura aucune incidence sur le taux d'imposition appliqué à votre salaire à partir de janvier 2019. En revanche, l'Etat vous restituera ces 75 euros à l'été 2019, ou les retranchera de l'éventuel solde à payer.

Les abattements neutralisés

Pour les dispositifs venant réduire le montant imposable, deux cas doivent être distingués : d'une part des réductions « habituelles » liées à l'activité professionnelle principale, et d'autre part les déductions liées à des placements ou investissements.

Dans le premier cas, l'« année de transition » ne change rien, comme le souligne le gouvernement dans sa documentation : « Les avantages fiscaux donnés sous la forme d'abattement seront automatiquement intégrés dans le taux [du prélèvement à la source, en 2019, NDLR], notamment celui de 10% pour frais professionnels, ou l'abattement journaliste ou assistant maternel. La déduction des pensions alimentaires sera également prise en compte. » Schématiquement, ce sont à la fois l'imposition des revenus courants 2018 et les abattement liés qui disparaissent, cette transition apparaît donc neutre fiscalement parlant.

Des déductions limitées

Deuxième cas de figure : les déductions liées à l'épargne retraite ou aux revenus fonciers, qui seront le plus souvent perdues. Et le gouvernement a introduit des dispositifs spécifiques afin d'éviter l'optimisation fiscale. Ainsi les versements effectués en 2018 sur un Plan d'épargne retraite populaire (Perp) n'offriront aucun avantage fiscal, sauf en cas de revenus exceptionnels (via le CIMR). Pour éviter que les épargnants ne stoppent leurs cotisations, l'avantage fiscal sera réduit en 2019 en cas de diminution des versements en 2018.

Plus d'infos : Perp et prélèvement à la source : une mesure anti-optimisation

Pour les revenus fonciers, un autre mécanisme, encore plus complexe, reprend le même principe : les déductions liées à des travaux réalisés en 2018, par exemple, font l'objet de règles de déductibilité particulières en 2019 et 2020. En revanche, concernant les charges courantes liées à la détention de biens immobiliers locatifs, comme les intérêts d'emprunt, l'année blanche annule toute possibilité de déduction.

Plus de détails : Revenus fonciers : les conséquences de l'année blanche

(1) Sont considérés comme revenus exceptionnels, entre autres : les indemnités de rupture de contrat de travail, les prestations de retraite servies sous forme de capital, les sommes perçues au titre de la participation et de l'intéressement et non affectées sur des plans d'épargne salariale, la monétisation des droits inscrits sur un compte épargne temps, etc.