Le Livret A a bouclé en 2017 sa meilleure année depuis 2013 en termes de collecte, malgré un taux qui est resté bloqué à 0,75%, son plus bas niveau historique.

10,24 milliards d’euros : c’est le montant de la collecte nette du Livret A en 2017, selon la Caisse des Dépôts et Obligations (CDC). Pour la première fois depuis 2013, le produit d’épargne le plus populaire en France repasse la barre des 10 milliards d’euros et met ainsi fin à 4 années de disette, marquées notamment par deux décollectes nettes en 2014 (-6,13 milliards) et 2015 (-9,29 milliards).

Conséquence : le montant des intérêts capitalisés en fin d’année (presque 2 milliard d’euros) est reparti à la hausse après avoir été divisé par plus de 2,5 depuis 2012. Et l’encours du Livret A a battu un nouveau record historique, en passant pour la première fois le cap des 270 milliards d’euros : plus précisément 271,7 milliards à la fin décembre 2017, intérêts capitalisés compris. Une bonne année donc.

Source des données : communiqués mensuels de la Caisse des Dépôts sur les flux et les encours du Livret A, du LDDS et du LEP.

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Un taux pourtant bloqué à 0,75%

Ce regain de forme est d’autant plus étonnant qu’aucun événement ne le justifie directement. Les quelque 16,5 milliards captés en 2009, par exemple, étaient la conséquence de la généralisation de la distribution du Livret A à l’ensemble des banques ; les 17 milliards de 2011 et les 28 milliards (record absolu) de 2012 du relèvement en deux temps de son plafond de versement

Rien de tel en 2017 : ni son plafond (22 950 euros depuis le 1er janvier 2013), ni son taux (0,75% depuis le 1er août 2015) n’ont bougé. Pire : depuis le début de l’année 2017, le rendement du Livret A corrigé de l’inflation est passé en territoire négatif. Une première sur une période aussi longue, conséquence du choix de l’exécutif et de la Banque de France de ne pas revaloriser son taux par rapport au contexte monétaire, au prix d’une série de dérogations - autorisées par la réglementation - à la règle de calcul de la rémunération du livret réglementé.

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L’habitude des taux bas ?

Dans ce contexte, comment expliquer cette bonne année ? Les Français auraient-ils fini par s’habituer aux taux bas ? Certains éléments le laissent penser.

Déprimés par la conjoncture, ils ont ces dernières années eu tendance à laisser dormir leur argent sur leurs comptes courants. Un chiffre le montre : la forte hausse de l’encours des dépôts à vue, qui a réussi de meilleures collectes encore que l’assurance-vie en euros ou le Plan épargne logement (PEL).

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2017, de ce point de vue, a marqué un changement de tendance. Depuis le début du 2e trimestre de l’an passé, selon les statistiques publiées par la Banque de France, le flux des liquidités dirigé vers les dépôts à vue a commencé à diminuer, sans pour autant se tarir : 19,1 milliards au 1er trimestre, 6,3 au 2e, 4,7 au 3e… A l’inverse, celui dirigé vers les livrets d’épargne (dont le Livret A) s'est maintenu : 5,6 milliards au 1er trimestre, 7 au 2e, 5,3 au 3e. Un rééquilibrage qui donne à penser que les Français ont finalement accepté la situation et recommencé à prendre la peine de placer leur argent, notamment sur le Livret A.

Le Livret A a encore de la marge

A 0,75% net, le rendement du Livret A reste loin devant celui des livrets d’épargne fiscalisés à taux de marché. Ces derniers rapportent actuellement 0,14% brut en moyenne, selon l’indicateur des taux cBanque. Seuls quelques « super-livrets » en ligne (Distingo, Zesto, Orange Bank), rémunérés 0,7% net de flat tax (1% brut), se rapprochent du rendement du Livret A.

A consulter : le comparatif des livrets bancaires

Ce regain de forme est-il durable ?

Le Livret A va-t-il prolonger en 2018 sa bonne passe ? Rien n’est moins sûr. Premier indice : il a moins bien fini l’année 2017 qu’il ne l’avait commencée. Fin juillet, sa collecte nette dépassait déjà les 10 milliards d’euros, puis a culminé à 12 milliards en août. La fin d’année a donc été marquée par une décollecte, notamment en octobre (-1,58 milliard) et, de façon plus inhabituelle, en décembre (-0,36 milliard), mois pourtant traditionnellement favorable au produit.

Certains éléments conjoncturels pourraient également changer la donne : la perspective du maintien durable du taux à 0,75% (au moins jusqu’en 2020) ; l’assouplissement de la fiscalité sur les livrets ordinaires avec la flat tax… De quoi calmer l’attrait pour le Livret A ? Réponse dans les mois à venir.

Le LDDS aussi

Le Livret de développement durable et solidaire (LDDS) a lui aussi mis un terme en 2017 à trois années de décollecte. Le cousin du Livret A a engrangé l’an dernier 2,16 milliards d’euros de collecte nette, auxquels s’ajoutent 740 millions d’euros d’intérêts capitalisés.

Il reste toutefois très loin de sa grande année 2012 : 21 milliards d’euros de collecte nette grâce au doublement de son plafond de versement.

Source des données : communiqués mensuels de la Caisse des Dépôts sur les flux et les encours du Livret A, du LDDS et du LEP.

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