Neuf milliards d'euros pour aider à loger les salariés français : c'est la contribution « exceptionnelle » promise par les entreprises, en collaboration avec le gouvernement qui continue ainsi à s'orienter vers une politique du logement moins coûteuse pour l'Etat.

« Action Logement mobilise 9 milliards d'euros pour le logement et la mobilité des salariés », a annoncé jeudi cet organisme, géré de manière paritaire entre le patronat et les syndicats, évoquant une « initiative exceptionnelle ». Longtemps connu sous la dénomination du « 1% logement », Action Logement est un organisme destiné à aider les salariés à se loger. Il est largement financé par une contribution obligatoire des entreprises françaises.

Le plan annoncé jeudi, qui prévoit une aide de 1 000 euros pour aider les salariés les plus pauvres à déménager, ne coûtera donc rien à l'Etat, mais le gouvernement accompagne de près le dispositif, annoncé en présence du ministre du Logement, Julien Denormandie. « C'est un plan très important [qui] est aussi un exemple de travail de confiance entre partenaires sociaux et gouvernement », a estimé en conférence de presse Julien Denormandie, dont le ministère a vu son budget annuel réduit de plus de deux milliards d'euros depuis le début du quinquennat.

15 milliards d'euros d'ici 2022

Le dispositif ne marque pas une rupture : Action Logement a déjà signé l'an dernier un accord avec l'Etat pour engager 15 milliards d'euros d'ici à 2022 afin d'aider au logement des salariés. Toutefois, ces 9 milliards d'euros, dont l'emploi doit courir de la rénovation énergétique à la recherche de bâtiments et bureaux vides pour les transformer en logements, constituent un élargissement considérable de l'enveloppe puisqu'ils seront entièrement nouveaux. « On aligne sur la convention quinquennale ces 9 milliards, qui seront sortis au fur et à mesure des dossiers », a expliqué jeudi Bruno Arcadipane, président d'Action Logement.

Ce montant supplémentaire doit donc, a priori, s'entendre également d'ici à 2022, Bruno Arcadipane reconnaissant que tout n'était pas « cadré et fixé », mais promettant une mise en œuvre dès ce trimestre. Surtout, le président d'Action Logement a précisé que la grande partie des neuf milliards d'euros ne seraient pas tirés des propres fonds de l'organisme mais, à hauteur de deux tiers, d'emprunts réalisés sur les marchés.

Le pouvoir d'achat mis en avant

Ce fonctionnement fait écho à d'autres politiques déjà mises en œuvre par le ministère du Logement, en premier lieu en matière de logement social. D'un côté, il impose au monde HLM environ 1,5 milliard d'euros d'économies annuelles, principalement tirées d'une baisse des aides au logement (APL) versées aux locataires du secteur. De l'autre, il a favorisé d'autres modes de financement, principalement des prêts de très long terme par la Caisse des dépôts, bras financier de l'État. Elle-même tire une part de ses fonds du Livret A et d'autres prêts réglementés qu'elle place sur les marchés. Action Logement a, d'ailleurs, participé au fonctionnement de ces prêts de long terme, car l'organisme en prend à sa charge une partie de manière à ce que les bailleurs HLM ne paient pas d'intérêts.

Malgré quelques frictions, qui ont un temps menacer de geler sa contribution aux politiques publiques, l'organisme a régulièrement constitué ainsi que la Caisse des dépôts un partenaire fidèle de la politique gouvernementale sur le logement. Il s'est ainsi placé comme un bon élève de la vente de logements sociaux, une autre piste favorisée par l'exécutif pour financer le monde HLM : Action Logement, qui est par ailleurs un gros acteur du secteur, compte servir d'intermédiaire et assure avoir reçu plus de 10 000 marques d'intérêt dans ce cadre.

Pour le gouvernement, le plan répond aussi à une priorité qu'il met en avant dans un communiqué : « le pouvoir d'achat des ménages », au moment où persiste depuis des mois le mouvement des « gilets jaunes », constitué autour de revendications multiples mais tournant largement autour de cette thématique. « Les premières discussions ont commencé bien avant le mouvement des gilets jaunes », a relativisé jeudi Bruno Arcadipane. « Les partenaires sociaux qui travaillent au côté d'Action Logement au quotidien n'ont jamais attendu quoi que ce soit pour donner une impulsion forte. »