Jurisprudence
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"De manière générale la clause 30/360 est jugée équivalente à un calcul de mensualité sur une année civile, et ce n’est qu’au titre des périodes pour lesquelles les intérêts sont calculés sur une durée journalière (échéance brisée en base Exact/360) que l’application de l’année bancaire de 360 jours préjudicie à l’emprunteur en augmentant la charge des intérêts." Source J. S Manoukian
C'est très bien, ça, et conforme, il me semble, à ce qu'il faut faire et ne pas faire.
Pour les magistrats d'Aix - en - Provence, preuve qu'ils sont capables de comprendre leurs erreurs et de s'amender intelligemment
Bonjour MRGT34,
De quelle "erreur" parlez-vous ? De la position inchangée de la Cour d’Aix pendant des années, qui brusquement revoit sa position ?
L’erreur est-elle avant ou après, selon vous ?
Un tel propos, qui pourrait tromper le lecteur, nous montre que vous ne connaissez pas bien le Code de la consommation.
C'est pour cela qu'il me paraît bien utile de rappeler les textes de base.
La loi n° 79-596 du 13 juillet 1979 relative à l'information et à la protection des consommateurs dans le domaine des crédits immobiliers - dite loi Scrivener 2 - a mis en place un certain nombre de règles protectrices du consommateur, destinées à garantir son consentement éclairé tout au long de la phase de conclusion d’un contrat de prêt.
L’objectif de cette loi est d’assurer une protection préventive de l'emprunteur à travers des mesures destinées à encadrer la phase précontractuelle du contrat de crédit.
En cela, elle se démarque du droit commun des obligations.
À cette fin, le législateur a institué aux termes de l’article L.312-33 du Code de la consommation une sanction particulière qui vient réprimer le non-respect des mentions que doit contenir l’offre de prêt, notamment celles prévues à l’article L.312-8 du même code.
Aux termes de l'article L.312-8, dans sa rédaction applicable en l’espèce, l'offre de crédit immobilier
« indique, outre le montant du crédit susceptible d'être consenti, et, le cas échéant, celui de ses fractions périodiquement disponibles, son coût total, son taux défini conformément à l'article L.313-1 ainsi que, s'il y a lieu, les modalités de l'indexation ; énonce, en donnant une évaluation de leur coût, les stipulations, les assurances et les sûretés réelles ou personnelles exigées, qui conditionnent la conclusion du prêt ; […] »
Et selon l’article L.312-33, dans sa rédaction applicable en l’espèce, le prêteur qui ne respecterait pas l’une des obligations spéciales prévues à l'article L.312-8 du même code pourra être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
Sans aucune interprétation possible, l'article L.312-8 vise expressément un formalisme impératif de l’offre de crédit immobilier.
Par ailleurs, l’article L.313-1 du Code de la consommation, auquel renvoie l'article L.312-8,dispose que : « […] toutefois, pour l'application des articles L.312-4 à L.312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis, ainsi que les honoraires d'officiers ministériels, ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat. »
Ainsi, cet article établit clairement une distinction entre l’offre (régie par le droit consumériste) et le contrat définitif (régi par le droit civil général des obligations).
C’est donc bien la question du formalisme qui est abordé par l’article L.312-33, et non la question de fond qu’est le mode de calcul adopté par l’organisme prêteur. En effet, le mode de calcul sur la base d’une année civile est, quant à lui, prévu à l’article R.313-1 du Code de la consommation, article non visé par la sanction civile de l’article L.312-33.
Les textes font ainsi clairement ressortir que, dans la chronologie de la relation contractuelle, la loi Scrivener concerne seulement le moment de l’examen de l’offre et non l’instant de la rencontre des volontés lors de la formation du contrat.
À ce titre, la Cour de cassation rappelle régulièrement que la déchéance du droit aux intérêts de l’article L.312-33 du Code de la consommation ne permet de sanctionner que l'inobservation du prêteur des obligations précontractuelles prévues aux articles L.312-7, L.312-8, L.312-14, deuxième alinéa, et L.312-26 (anciens) du même code (Cour de Cassation, Civ. 1, 10 mai 2000, n° 97-17.412 ; idem 4 juin 2002, n° 99-21.769).
Ces articles ne prévoient aucune sanction en cas de vice de fond et ne disent rien du taux conventionnel, lequel est quant à lui expressément régi par l’article 1907 du Code civil auquel la Haute Juridiction associe de longue date la sanction de la nullité de la clause le prévoyant, emportant substitution par le taux légal.
Dans ces conditions, la déchéance du droit aux intérêts n’est invocable qu’à l’égard de la mention du taux effectif global dans l’offre de prêt et ne concerne donc en rien l’hypothèse, bien distincte, du recours indu au "diviseur 360" pour le calcul du taux conventionnel (C'EST CELA QU'IL FAUT BIEN SE METTRE DANS LA TÊTE ! LE LITIGE LOMBARD N'EST PAS UN LITIGE DE CALCULS, MAIS UN LITIGE DE CONTRAT).
Par ailleurs, l’article L312-33 n’exclut pas que soit prononcée la nullité de la clause entachée d’irrégularité, cet article faisant de la déchéance une sanction civile éventuelle, laissée à la libre appréciation du juge et venant s’ajouter aux autres sanctions possiblement applicables.
Dès lors, "l'erreur" que vous évoquez n'est pas dans la position de la Cour d'Aix avant, mais bien dans sa nouvelle position après, alors que cette dernière opère une confusion manifeste entre les règles posées par le droit de la consommation et les règles générales régissant les prêts d’argent.
POUR RÉSUMER : la seule condition au prononcé de la déchéance du droit aux intérêts est la violation d'une des dispositions consuméristes auxquelles renvoie l'article L.312-33 du Code de la consommation, sanctionnant principalement des manquements au cours de la période précontractuelle ou des irrégularités formelles du contrat de crédit, la Cour d'Aix, dans sa nouvelle interprétation, ne pouvait manifestement pas priver le demandeur de son action en nullité pour absence de consentement au coût du crédit.
Il est manifeste que la nouvelle position prise par la Cour d'Aix encoure la cassation, pour peu que l'emprunteur se pourvoit, d'où l'idée pas si idiote que cela de notre ami Vivien d'instituer une cagnotte pour payer les actions en pourvoi quand il est établi que des Magistrats ont mal travaillé. Dans le cas d'Aix, c'est flagrant, sans interprétation possible puisque les textes sont on ne peut plus clairs.