Jurisprudence
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Erreur de calcul du TEG et la règle de la décimale...
La position de la Cour d'appel de Douai, ce 12 juillet 2018
Question souvent évoquée dans ce Forum, une banque peut-elle être condamnée si le TEG qu’elle applique a été calculé avec une erreur (démontrée par l’emprunteur) inférieure à la décimale ?
Pour rappel, l’annexe à l’article R.313-1 du Code de la consommation en sa remarque d) dispose que « le résultat du calcul est exprimé avec une exactitude d’au moins une décimale. Lorsque le chiffre est arrondi à une décimale particulière, la règle suivante est d’application : si le chiffre de la décimale suivant cette décimale particulière est supérieure ou égale à 5, le chiffre de cette décimale particulière sera augmenté de 1 ».
L’article R.313-1 et son annexe ne parlent pas de l'exactitude de calcul du TEG, mais évoquent les règles d'arrondi et le résultat du rapport entre la durée de l’année civile et la durée de la période qui doit être précis d’au moins une décimale.
Par deux arrêts, l’un du 1er octobre 2014 et l’autre du 26 novembre 2014, la première chambre civile de la Cour de cassation est venue apporter une interprétation toute particulière de ces dispositions.
La Haute Juridiction a dégagé la règle de l’erreur admise du 10ième (Cass. Civ. 1ère, 01/10/ 2014, n°13-22778 ; Cass. Civ. 1ère, 26/11/2014, n°13-23033).
Cette position a été maintenue dans un arrêt récent du 25 janvier 2017, ci-joint (chambre civile 1, 25 janvier 2017, n° 15-24607 - Publié au bulletin).
Depuis lors, selon cette jurisprudence constante, ne peut être sanctionnée que l’erreur supérieure à 0,1 point, ce que sera traduit sous la plume du professeur Mainguy par l’oxymore suivant : « Le TEG doit être exact, mais peut être faux, à une décimale près » (JCP entreprise et affaires, n°22, pages 38 et suivantes, 28 mai 215).
Cette position de la Cour de cassation est critiquée par une partie de la doctrine. François Couderc, magistrat, et Jean-Luc Couderc, expert financier, ont à cette occasion vivement critiqué cette interprétation a contrario faite par la Cour de cassation (Gaz. Pal. Ed. G., mercredi 18 et jeudi 19 février 215, n°49 à 50).
En l'état actuel, l'interprétation de la Cour de cassation, qui ne reflète pas l'esprit du texte, est suivie par l'ensemble des juridictions. Il faut néanmoins savoir qu'il y a eu une demande de décision préjudicielle présentée par le tribunal d'instance de Limoges, le 6 février 2017, à la Cour européenne de justice.
Nous verrons ce qu'il en ressortira...
Et pourtant, il y a 48 h, une Cour d'appel, celle de Douai, vient de braver la jurisprudence de la Haute Juridiction, en condamnant une banque pour une erreur inférieure à la décimale, en statuant :
« Malgré ce qu’affirme l’appelante, l’ancien article R. 313-1, II, alinéa 4 du code de la consommation prévoyait la possibilité d’une erreur d’au moins une décimale seulement lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre qu’annuelle, le taux effectif global étant alors obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire. Le rapport ainsi calculé, le cas échéant, peut l’être avec une précision d’au moins une décimale. C’est donc ce rapport entre la durée de l’année civile et la durée de la période qui doit être précis d’au moins une décimale, et non le taux effectif global lui-même, qui ne peut donc pas être arrondi par le prêteur. Il y a donc lieu, comme en première instance, de prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels des prêts. »
Il paraît évident que la banque formera un pourvoi en cassation, à moins que la Cour européenne n'ait tranché le débat, dans un sens ou dans un autre...
L'avenir nous le dira.
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