Refinancement des banques - Moyens techniques BCE

Aristide

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C'est toujours plus utile pour le consommateur, que les banques qui disposent de liquidités de la part de la BCE, et qui ne trouvent rien d'autre que de effectivement les placer à taux négatifs, donc avec un coût pour la banque, auprès de la même Bce;

Bonjour,

En remontant une quinzaine/vingtaine d'années en arrière il faut rappeler qu'à l'époque la règle était l'application du concept de "Multiplicateur du crédit".

Quésaco ?

Quand une banque commerciale consent un crédit de 10.000€, dans le principe (***) elle peut très bien le faire sans avoir un seul centime à disposition dans sa trésorerie; que ce soit sa caisse ou son compte BCE/BDF.

(***) En pratique ce n'est pas possible du fait des règles de sécurité imposées par la réglementation BCE.

Elle inscrit tout simplement 10.000€ à l'actif de son bilan pour matérialiser sa créance sur son client/emprunteur "C1" ( = la dette du client/emprunteur envers la banque) et la même somme au passif pour matérialiser la dette qu'elle a envers ce même client ( = la créance qu'à le client/emprunteur sur la banque).

Mais si "C1" a sollicité un crédit c'est qu'il en a besoin pour financer des besoins à due concurrence.

S'il se trouve que le fournisseur de "C1" est lui aussi client "C2" de la même banque le paiement des 10.000€ dus par "C1" à "C2" se fera tout simplement par une écriture au passif de la banque du compte de "C1" - qui reviendra à zéro - vers celui de "C2" qui affichera donc 10.000€ en plus désormais.

=> Pas un seul centime d'euro n'aura été utilisé en "espèces sonnantes et trébuchantes" (= la trésorerie disponible).

Mais les chosent se compliquent si "C2" est client d'une autre banque car, dans ce cas, ce n'est plus de la monnaie "secondaire" ( = créée par les banques de dépôts à vue) qu'il faut mais de la vraie monnaie "banque centrale", c'est à dire que la banque de "C1" doit détenir au minimum 10.000€ dans ses comptes de trésorerie ( = caisse + compte BCE/BDF).
Et, en pratique, c'est le compte BCE/BDF qui devra préalablement être approvisionné des 10.000€ pour quelle règle à la banque de "C2" ce qui lui est dû.

C'est dans ce cas qu'intervenait la notion de "Coefficient multiplicateur du crédit".

Il est facile de comprendre que toutes les banques consentant des crédits et que, tous leurs clients faisant des paiements tous azimuts, il s'opère autant de transactions avec multiples croisements les unes augmentant les ressources des banques réceptrices mais au détriment des autres.

Par ailleurs sur un crédit de 10.000€ dans l'exemple, ce ne sont pas en totalité 10.000€ qui sont disponibles et utilisables car il y a "des fuites".

Quésaco bis.

Les fuites restreignent les disponibilités des banques; ce sont:

+ Les espèces en caisse (billets et monnaies divisionnaires qui viennent en déduction du compte BCE/BDF).
En France le besoin de liquidités pour les paiements en espèces est de l'ordre de 10% des besoins exprimés ( = 80% en Allemagne)

+ Les réserves obligatoires (taux actuellement fixé à 1% des dépôts mais qui, dans le passé, a dépassé les 20%).

=> Le coefficient "Multiplicateur du crédit" résulte d'un calcul complexe mais, pour matérialiser, disons qu'avec un besoin d'espèces de 10% et des réserves obligatoires à 1% des dépôts => ce coefficient est voisin de "9".

Le besoin d'espèces étant stable à environ 10% en France si veut comparer avec un autre taux de réserves obligatoires
+ 5% = "Coefficient multiplicateur du crédit" =/= 7
+20%= "Coefficient multiplicateur du crédit" =/= 3,6

=> Ce qui veut dire qu'à l'époque de son utilisation - avec ces données - une banque qui voulait consentir un crédit de 10.000€ devait obligatoirement détenir 10.000€/9 = 1.111€ sur son compte BCE/BDF.

=> Si elle ne les avait pas il fallait qu'elle les trouve.

=> 1.111€ sur le compte BCE/BDF permettait - via le "coefficient multiplicateur du crédit = 9" l'octroi d'un crédit de 10.000€ avec un très faible risque de faillite pour cessation de paiements = manque de trésorerie.


Puis depuis une dizaine d'années, du fait des crises, baisse activité et de croissance et accroissement simultané du chômage la règle a été inversée.

=> La notion de "coefficient multiplicateur du crédit" a été remplacée par son inverse le "coefficient diviseur du crédit".

Dès lors le discours BCE aux banques est prêtez, prêtez, prêtez encore et l'on s'engage à assurer votre trésorerie quoi qu'il arrive.

Suivant ce nouveau raisonnement, dans les mêmes conditions que ci-dessus, une banque sans aucune disponibilité à la BCE pourrait donc consentir un crédit de 10.000€ et la BCE lui fournira - moyennant un intérêt ( (***) - les 1.111€ qui - en théorie - lui seront nécessaires pour assurer les demandes de paiements.

(***) - Actuellement 0% à une semaine pour le refinancement principal et 0,25% pour le refinancement marginal à 1 jour.

Puis vient la troisième phase que tu abordes dite "Assouplissement Quantitatif" (ou quantitative easing bce) qui amène le Banque Centrale Européenne à racheter aux banques et entreprises des titres sur le marché secondaire; souvent des "obligations d’État".

A ce jour - pour toute la zone euro - le total desdits rachats est de l'ordre de 2.600 milliards d'euros (auxquels il faudrait encore ajouter environ 2.000 milliards d'opérations ciblées de refinancement de long terme (2 ou 3 ans) dites "Targeted Longer-Term Refinancing Operations, TLTRO" à taux réduits mais avec engagement de prêts à l'économie).

Mais pour faire le lien avec le taux de 0,40% que les banques doivent verser à la BCE sur leurs avoirs en dépôt dans ses comptes l'on voit bien qu'il y a un paradoxe.

Pourquoi une banque de dépôts qui est déjà excédentaire en collecte irait - elle vendre des obligations d’État - à priori sans risque - et, en même temps se priver des coupons versés pour, parallèlement, être pénalisée de 0,40% à due concurrence.

Sans compter les autres effets négatifs que Patrick Artus chef économiste chez Natixis résume ainsi:

En écrasant toute la courbe des taux, la BCE a fortement amputé la marge d’intermédiation des prêteurs, ce qui n’incite pas vraiment au crédit. Au même moment, la régulation née de la crise financière oblige les banques à une plus grande prudence dans la gestion de leur bilan et de leur politique de prêts.

In fine, leurs liquidités excédentaires, souvent issues de la politique de « quantitative easing » de la BCE, sont taxées à 0,4 % par Francfort. Soit une facture de quelque 7,5 milliards d’euros en année pleine à la charge des établissements européens.

La boucle est bouclée, «c’est comme si la banque centrale disait, j’ai créé une montagne de monnaie que vous devez me prêter à taux négatif », poursuit l’économiste de Natixis.

https://www.lopinion.fr/edition/eco...es-qu-elle-est-en-train-rendre-malades-182375
Cdt
 
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Puis vient la troisième phase que tu abordes dite "Assouplissement Quantitatif" (ou quantitative easing bce) qui amène le Banque Centrale Européenne à racheter aux banques et entreprises des titres sur le marché secondaire; souvent des "obligations d’État".
Bonjour Aristide,en m'aventurant sur ce terrain, je me doutais bien que tu pourrais compléter brillamment l'éclairage;
Bien sûr la politique de QE, dont beaucoup pensait qu'elle allait être abandonnée, continue, mais ceci est complété par la politique de refinancement de la bce vers les banques appelée TLTRO III , qui fait suite aux 1 et 2, (fargeted longer term refinancing opérations) et qui comme l'indique le communiqué du 8 juin 2019 de la Banque de France, devrait permettre aux banques de financer les entreprises et les prêts à la consommation "Ces opérations visent à préserver des conditions favorables d’octroi de crédits bancaires et à soutenir l’orientation accommodante de la politique monétaire ;"
communiqué :https://www.banque-france.fr/sites/...ement-a-plus-long-terme-ciblees-tltro-iii.pdf
ainsi la coéxistence de 2 dispositifs
le TLTRO : Targeted Long-term Refinancing Operations, mises en place par la BCE afin de faciliter la transmission de crédit au secteur privé
et le Multi-tiered deposit : taux applicables aux liquidités(-0,4 actuellemment) placées par les établissements bancaires à la banque centrale, amène les banques à une aberration lorsq'elles ne financent pas assez les entreprises...et qu'elles ont donc en inscription à -0,4% des sommes qui pourraient leur rapporter et faire marcher l'économie;




 
Référence est faite à différentes reprises aux subprimes dans cet article que je viens de lire.
Coïncidence, hier soir, ou plutôt tôt ce matin (minuit à 2h), j'ai regardé avec grand intérêt le film "The Big Short : Le Casse du siècle" sur la 23.
Le film retrace les 2 ou 3 années ayant amené la crise des subprimes, et notamment le parcours du Dr Michael Burry, le 1er à avoir compris, dès 2005, ce qui allait arriver et qui a été le 1er à jouer à la baisse (short) le marché immobilier.
Un film spectaculaire quand on a quelques notions sur ce qu'est l'univers de la bourse.
Apparemment, avec la baisse des taux, tout se met en place pour qu'une nouvelle crise arrive d'ici quelques années.
 
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