Lorsque l'on parle
"d'année lombarde", il faudrait peut-être s'entendre, une bonne fois pour toutes, sur la pratique visée: il s'agit pour moi (et d'autres) de considérer des années de 12 mois de 30 jours pour le calcul des échéances courantes mensuelles (ce qui n'est pas préjudiciable)
mais surtout de calculer les intérêts des échéances rompues avec un nombre de "jours exacts" (de l'année civile) rapporté à une année de 360 jours.
Sur ce point, je rejoins tout à fait les propos de
@Jurisprudence .
C'est exactement cela : ce que l'on nomme “calcul lombard" n'est pas un calcul des intérêts en prenant des mois de 30 jours rapportés à une année de 360 jours, mais bien un calcul en jours exacts rapportés à un année de 360 jours, situation que l'on retrouve dans le cas d'échéances dites “bisées“ lorsque le mois est incomplet.
La Cour de cassation, par la voix de son Avocat Général, en explique bien le principe :
J'avais déjà évoqué ce point dans une affaire où une banque s'était pourvue contre l'arrêt de la Cour d'appel de Douai (
Cour d'appel de Douai, 25 janvier 2018, n° 16/04042), pour se désister après lecture de l'analyse du Conseiller référendaire et de l'avis de l'Avocat Général, lequel concluait au rejet du pourvoi (
Cour de cassation, 19 juin 2019, n° 18-15.183).
Au passage, pour la Cour d'appel de Douai, le fait que l’année civile constitue en soi une condition de validité du taux conventionnel l'a conduite à prononcer la nullité de la clause d'intérêt
sur la seule considération d'un calcul lombard d'intérêts journaliers intercalaires :
«
... en présence d'intérêts dits intercalaires, c'est-à-dire en présence d'intérêts perçus par le prêteur lorsque le nombre de jours correspond à un mois incomplet [...], un numérateur décompté au nombre exact de jours (au total trois cent soixante-cinq ou trois cent soixante-six), mais rapporté à un dénominateur de trois cent soixante jours conduit nécessairement à une majoration dissimulée du montant des intérêts […]
Il y a lieu de considérer que la banque a enfreint les exigences légales relatives à l'indication préalable et par écrit non seulement du taux conventionnel, mais également du taux effectif global, de sorte qu'il y a lieu de prononcer la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts mentionnée dans le contrat de prêt, laquelle appelle la substitution du taux légal au taux conventionnel à compter de la date du prêt et selon le taux légal en vigueur à cette date. »
Dans le cadre du pourvoi formé contre cet arrêt, l'Avocat Général, M. Paul Chaumont, observe que pour les prêts immobiliers remboursables par mensualités,
il y a lieu de distinguer les intérêts journaliers ou intercalaires, et les intérêts mensuels, les premiers étant ceux qui courent du jour du déblocage des fonds jusqu’au jour du point de départ de la première mensualité, c’est-à-dire pendant la période dite de préfinancement, les seconds étant ceux courant tout au long de la période d’amortissement, à compter de la première mensualité.
- Les premiers doivent être calculés sur la base d’ 1/365, soit un rapport en nombre de jours correspondant à la même unité (jours).
- Les seconds doivent être calculés sur la base d’1/12, soit un rapport en nombre de mois correspondant aussi à la même unité (mois). Ce rapport peut aussi résulter de la fraction 30/360 ou 30,41666/365, ces fractions étant égales à 1/12.
L'Avocat Général précise explicitement que pour des intérêts appliqués à une mensualité de préfinancement dite “brisée”, il convient de diviser le nombre de jours entre le déblocage des fonds et la première mensualité qui suit par 365, et non par 360.
De sorte que c'est à juste titre que la Cour d'appel de Douai a affirmé que l’utilisation de la clause de stipulation d’intérêt avait eu pour conséquence d’augmenter le taux réel de l’intérêt puisqu’elle avait été appliquée non seulement à la période d’amortissement, à laquelle elle était exclusivement destinée, mais également aux intérêts décomptés journellement, ce qui permet de conclure au rejet du pourvoi.
La Cour de cassation nous donne ainsi une définition claire de ce qu'est un “calcul lombard“, et répond aux questions posées à ce titre.