Jurisprudence
Contributeur régulier
Bonsoir,
"Démonstration magistrale" ? Sauf que cette démonstration est faussée sinon fausse.
Pourquoi?
Argument de la banque: l'erreur sur la première échéance (brisée) a une conséquence modique: c'est exact.
Réponse du juge (aidé peut-être par l'argumentation "magistrale" de l'avocat ?): l'erreur est faible sur cette échéance brisée mais elle se répercute sur toutes les échéances suivantes (sous-entendu) ce qui fait que l'erreur finale n'est pas modique: cette réponse, qui sert de motif au juge, est en réalité fausse. Un calcul rapide et simple montre en effet que l'incidence sur chaque échéance suivante est d'environ 0.03€ ce qui représente 6€ sur 200 échéances (je ne me souviens plus du nombre exact d'échéances du prêt). Chacun s'accordera à dire que cette somme reste modique. Donc le juge fonde (partiellement) sa décision sur un faux motif..
Ce n'est pas un avis, ce sont des faits.
Il y a les faits, comme vous l'écrivez, c'est-à-dire en définitive un "préjudice" modique pour l'emprunteur. Ça c'est incontestable.
Mais comme nous sommes devant un Tribunal, il y a aussi le droit. Et que dit le droit (et la jurisprudence publiée de la Cour de cassation) ? Il dit que les intérêts dus par l'emprunteur se déterminent par rapport à une année civile (365 ou 366 jours). C'est-à-dire qu'une banque qui a calculé les intérêts sur une année de 360 jours, même si ce n'est que sur la première échéance, cela SANS EN INFORMER L'EMPRUNTEUR (qui s'attend à ce que, sur cette première échéance, son intérêt ait été calculé sur un année civile, en toute bonne logique), se comporte mal et doit être sanctionnée.
C'est juste cela qui est répréhensible et qui n'est pas acceptable. Le préjudice n'a pas à entrer en ligne de compte, car ce n'est pas le problème. Le vrai sujet est tout simplement une question de confiance entre l'emprunteur et son établissement bancaire.
On tourne un peu en rond dans ce type de débat. Je reprends mon précédent exemple donné il y a quelques semaines : je me suis fait flasher à 51 km/h à Versailles (en réalité 56 km/h - moins une petite décote). Résultat, pour 1 km/h de dépassement de la vitesse autorisée, j'ai perdu un point sur mon permis et j'ai payé 90 euros d'amende.
C'est la loi, rien que la loi, et c'est comme ça. Donc une banque qui gagne quelques euros sur un prêt, en le sachant pertinemment, qui plus est sans le dire à son client, et qui agit ainsi sur des milliers de prêts, en toute connaissance de cause, a un comportement qui est condamnable. C'est le ba-ba, sans qu'il soit besoin d'épiloguer pendant des jours.
Je peux aussi comprendre l'agacement des juges qui n'apprécient guère l'action de masse actuelle et "l'effet d'aubaine" orchestré par des officines douteuses, ceci depuis l'arrêt de la Cour de cassation en 2013. Mais ce n'est pas une raison pour rendre une justice qui ne soit pas conforme aux textes (et à la jurisprudence) et face à une démonstration mathématique de l'emprunteur démontrant que, MÊME SUR LA PREMIÈRE ÉCHÉANCE, les intérêts n'ont pas été calculés sur une année civile.
Tout cela est un problème de bonne justice, ainsi que l'a fait remarquer Aristide, et ainsi que l'on en a souvent parlé sur ce Forum.
Bien à vous.
Chercheur de Jurisprudence.
PS : je vous joins les deux décisions évoquées précédemment > même avocat, même problématique, même argumentation de l'emprunteur, deux décisions de justices différentes !... cherchez l'erreur...
Cour d'appel de Douai Afficher la pièce jointe CA_Douai_2_mars_2017.pdf
TGI de Paris 9ième Chambre (désormais célèbre) Afficher la pièce jointe TGI_Paris_7_nov._2017.pdf