Chantal Goya aurait obtenu plus de 2 millions d'euros du Crédit municipal de Bordeaux malgré ses problèmes financiers. Une enquête préliminaire a été ouverte sur les pratiques de distribution de prêts de l'établissement.

On ne s’attendait vraiment pas à retrouver l’interprète de Bécassine au cœur de cette histoire. Vendredi, une enquête de Sud Ouest a révélé que l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le superviseur français des banques rattaché à la Banque de France, s’est intéressée pendant plusieurs semaines, peu avant l’été, à la gestion du Crédit municipal de Bordeaux (CMB). Avec une découverte de taille : un prêt d’un montant de 2,2 millions d’euros accordé à Chantal Goya et à son mari, le compositeur Jean-Jacques Debout, sur la base des droits d’auteur Sacem de la chanteuse. Une somme importante alors que selon l’ACPR, le couple est inscrit au Fichier Central des Chèques, c’est-à-dire interdit bancaire.

Un prêt qui pose questions

« Comment le CMB s’est assuré que les revenus du client Sacem couvriront les charges d’emprunt mensuelles dans la mesure où les revenus disponibles figurant dans le dossier datent de 2016 ? », « sur quelle base le CMB a projeté le remboursement du capital, compte tenu des dettes élevées ? », s’interroge ainsi l’ACPR selon les révélations de Sud Ouest. Dans un entretien à La Voix du Nord, Chantal Goya, indiquait en 2017 ne pas avoir de maison et disposer d’une retraite de 565 euros par mois. Même si la chanteuse de 77 ans continue la scène par passion, elle confie que si elle s’arrêtait de travailler, ce serait financièrement « plus difficile ». « En plus, mes spectacles font travailler trente personnes. La vente de mes 40 millions de disques a été réinvestie dans les spectacles », expliquait-elle.

Mais le prêt accordé aux Debout ne serait pas le seul à poser question. Ainsi, un couple, de 97 et 100 ans à l’échéance du crédit, se serait vu octroyer un prêt de plus d’un million d’euros. Par ailleurs, une princesse iranienne se serait vu accorder 750 000 euros, « quand les gages mis en garantie ne représentent que la moitié de la somme », explique le quotidien. D'après Sud Ouest, l’ACPR pointerait des « défaillances » dans la mise en place des « règles élémentaires » de prêts (absences de justificatifs, analyses de risques, signalements à Tracfin, etc.).

Le Crédit municipal se défend bec et ongles

De son côté, Christophe Leuret, le patron du Crédit municipal de Bordeaux s'inscrit « en faux » contre ces « faits allégués ». Selon lui, l'inspection de l'ACPR relevait d'un « contrôle régulier. Cela faisait sept ans qu'ils n'étaient pas venus », explique-t-il à l’agence France-Presse (AFP) . Au contraire, il assume cette politique de prêts élevés. « Le risque fait partie de notre métier. Nous ne sommes pas une banque classique, nous trouvons des solutions là où les banques ne vont pas. Mais nous ne sommes pas inconséquents, nous prenons des garanties conformément aux textes de lois en vigueur… Il faut gagner de l’argent pour pouvoir en perdre par ailleurs. Notre credo c’est gagner plus pour aider plus. À titre d’exemple les prêts sur gage de moins de 100 euros ne font l’objet d’aucun taux intérêt », explique-t-il à Sud Ouest. Et de rappeler au passage : « Notre vocation est avant tout sociale. Nous ne fonctionnons avec aucun argent public. Nous nous adressons à des personnes en difficulté ou laissées en marge du secteur bancaire et travaillons à l’inclusion financière ».

En attendant le rapport définitif de l’ACPR dans les semaines à venir, qui pourrait comporter des sanctions, le parquet de Bordeaux a ouvert une enquête préliminaire pour tentative d'escroquerie sur des prêts sur gage accordés par le Crédit Municipal. Selon une source proche de l'enquête, citée par l’AFP, des « interrogations importantes » sont apparues concernant un nombre de prêts, non précisé, pour lesquels la valeur des objets gagés – bijoux, objets d'art, tableaux, voitures de collection – aurait pu être surévaluée.