La faiblesse des taux d’intérêt est une chance. Cela vous permet de décrocher un crédit immobilier à un taux historiquement bas. C’est une bonne nouvelle. Mais le taux n'est pas le seul critère tarifaire à prendre en compte et à négocier.

Aubaine pour les emprunteurs, la chute des taux n’est pas sans conséquence financière pour les banques. En 2018, la marge d’intérêt – l’écart entre le taux d’intérêt proposé aux emprunteurs et le taux auquel les banques se refinancent – a en effet baissé de 5,4% à la Société Générale et de 0,6% pour BNP Paribas. Pour combler en partie ce manque à gagner, les établissements tentent de se rattraper ailleurs. « C’est une certitude. Les banques augmentent les frais de dossier. Dans le contexte de taux très bas, les banques vont chercher du produit net bancaire [du chiffre d’affaires, ndlr] sur d’autres compartiments », nous explique ainsi Ulrich Maurel, porte-parole d’Empruntis. « Je vous confirme que l’augmentation des frais de dossier est une tendance et plus généralement le développement de tous les types de commission, par opposition aux marges d’intérêt qui sont comprimées », souligne également Pierre Chapon, co-fondateur du courtier en ligne Pretto.

Les frais de dossier, une hausse à contrecarrer

Plus qu’un ressenti, la hausse des frais de dossier des prêts immobiliers s’observe dans les brochures tarifaires des banques. Illustration. Pour un emprunt de 200 000 euros, ils revenaient à 1 508 euros en janvier 2018, contre 1 568 euros en septembre 2019, soit une hausse de 4% en 21 mois. Pour 2020, la hausse va se poursuivre. D'après les premières plaquettes tarifaires publiées, un tiers prévoit une augmentation des frais de dossier. Le plus souvent, ces hausses concernent les bornes appliquées, c’est-à-dire le minimum et le maximum que l’enseigne facture, et pas le pourcentage prélevé sur le montant du crédit (généralement entre 1% et 1,20%).

Pour réduire ce poste de dépense – et économiser quelques centaines voire milliers d’euros - il est possible de demander à votre banquier un geste commercial. Car, comme la plupart des clauses et des conditions de financement d’un prêt immobilier, les frais de dossier sont négociables.

Indemnités de rachat anticipé : lâchez un peu de lest !

En cas de remboursement partiel ou total de votre crédit, la banque facture des pénalités ou indemnités de rachat anticipé (IRA), qu’il est possible de négocier. Ces frais sont plafonnés. Ils ne peuvent représenter plus de 6 mois d’intérêts (ou 3% du capital restant dû). Avec la baisse des taux, les IRA représentent donc une charge financière nettement plus faibles que précédemment. De plus, il est fort probable que le taux d’intérêt que vous allez obtenir soit trop bas pour que faire racheter votre crédit par une banque concurrente vaille un jour le coup.

L’assurance emprunteur parfois plus onéreuse que les intérêts

Ne signez pas non plus votre contrat de prêt, sans avoir pris le temps de vous pencher sur l’assurance emprunteur. En effet, avec la baisse des taux d’intérêt, son poids dans le coût total du crédit grossit. « L’assurance emprunteur peut représenter au final une charge plus importante que les intérêts du crédit. Concrètement, quelqu’un qui emprunte à 0,60% sur 15 ans mais souscrit une assurance à 0,40% va en fait payer plus cher en assurance qu’en intérêts », fait remarquer Maël Bernier, directrice de la communication de Meilleurtaux.

Le repli des taux d’intérêt nourrit également une autre tendance : l’allongement de la durée d’emprunt. Désormais 42,5% des nouveaux crédits immobiliers courent sur 25 ans et plus à leur souscription, contre moins de 25% des prêts en 2017. Or, comme l’assurance emprunteur ne s’amortit pas au fil des remboursements, plus la durée du prêt est longue, plus la probabilité que l’assurance soit au final plus onéreuse que les intérêts est élevée.

L’assurance emprunteur doit donc être un axe majeur et à part entière de la négociation. En pratique, vous pouvez la négocier à plusieurs échelons. Vous pouvez souscrire à une assurance individuelle, proposée par les assureurs spécialisés. Ce choix s’avère souvent économique pour les emprunteurs jeunes, non-fumeurs, en bonne santé. Mais, même en contractualisant avec la banque qui vous accorde le prêt immo, vous avez une marge de négociation pour obtenir un tarif intéressant. En effet, pour les emprunteurs tatillons, les établissements bancaires peuvent proposer des réductions sur leur contrat collectif de 20% à 30%. Certains peuvent également se transformer en courtiers en assurances et proposer les contrats individuels d’assureurs partenaires.

Epargne et compte bancaire : négociez avant de signer

Pour accroitre la rentabilité du crédit immobilier, les banques ne comptent pas uniquement sur les frais de dossier. D’autres lignes tarifaires, plus indirectement liées à l’emprunt, ont et vont fortement augmenter. C’est le cas des frais liés au compte bancaire. Bien que les emprunteurs ne soient pas obligés de domicilier leurs revenus dans l’établissement qui leur a concédé le prêt, dans les faits, cela se passe souvent ainsi. Car la banque impose que les intérêts soient prélevés sur un compte ouvert chez elle. De fait, il s’avère plus pratique et moins anxiogène pour l’emprunteur de virer chaque mois ses revenus sur ce compte.

Si vous vous apprêtez à contracter un emprunt, attendez-vous donc à ce que votre banquier vous parle « carte bancaire », « assurance des moyens de paiement » et « package ». Là encore, ces produits et services peuvent faire l’objet d’une discussion. Exonération des frais de tenue de compte, deuxième carte bancaire gratuite, ristourne sur l’offre groupée de service… c’est le moment d’oser… Votre crédit allant vous lier pendant plusieurs années à la banque. C’est d’autant plus le moment de négocier ces frais qu’ils risquent de bondir l’année prochaine. Pour rappel, les banques se sont engagées à ne pas augmenter leurs prix en 2019. Ce faisant, il est probable qu’il y ait un effet rattrapage l’an prochain. Un effet dont les premières brochures de tarifs 2020 donne un avant-goût. Près de la moitié des banques ayant déjà divulgué leur nouvelle politique tarifaire prévoient d’augmenter la cotisation de leur package et de leur carte classique.

De la même manière, si vous souhaitez que vos produits d’épargne vous suivent dans votre nouvelle banque, gare aux commissions que cela entraîne. Illustration avec les frais de transfert de Plan d’épargne logement. En 3 ans, ils ont littéralement flambé, passant de 82 euros en septembre 2016 à 93 euros en septembre 2019 (+13%). Pour 2020, la hausse va se poursuivre. Plus de la moitié des établissements ayant déjà clarifié leur politique tarifaire pour l'année prochaine vont augmenter les frais de transfert de l’épargne logement. Une tendance qui s’observe aussi concernant le compte-titres et le Plan d’épargne en actions (PEA). Anticipez donc, en profitant du pouvoir de négociation que vous confère le crédit immobilier pour obtenir le remboursement de ces frais par votre nouvel établissement.

Voir aussi notre comparatif des taux des prêts immobiliers