Depuis le 18 juin dernier, les taux d’emprunt d’Etat français sont passés plusieurs fois en territoire négatif. Une telle aubaine pourrait-elle aussi arriver aux emprunteurs particuliers ? Le courtier en crédits Vousfinancer pose la question.

C’est une première historique : depuis le 18 juin dernier, les OAT 10 ans émises par l’Etat français - les emprunts qu’il contracte pour financer ses besoins à long terme - sont passés à plusieurs reprises en territoire négatif. Le résultat d’un nouvel assouplissement de la politique monétaire de la Banque centrale européenne, destiné à soutenir coûte que coûte le redémarrage économique de la zone euro, 10 ans après la crise des subprimes.

En clair, dans ce cas de figure, les investisseurs paient la France pour lui prêter de l'argent. C'est le monde à l'envers ! Or, s’il n’existe pas de lien mécanique entre l’évolution de l’OAT 10 ans et celle des taux moyens des prêts immobiliers, on observe bien sur le long terme une corrélation entre les deux. D’où la question : les emprunteurs, au moins ceux qui ont le profil le plus attractif pour les banques, pourraient-ils profiter de la même aubaine ? Va-t-on vous rétribuer pour contracter un crédit immo ?

Des raisons commerciales et juridiques

Peu probable, répond le courtier Vousfinancer dans un récent communiqué, et ce pour au moins deux raisons. La première est purement commerciale. Les taux des crédits immobiliers se situent déjà à des niveaux historiquement bas : certains particuliers à gros revenus empruntent déjà sur 25 ans à moins de 1% … Dans ce contexte, la demande explose et suffit largement à couvrir les objectifs commerciaux des banques. « (…) On s’achemine vers une année record à tous les niveaux, tant en termes de transactions immobilières que de production de crédits. Alors pourquoi le feraient-elles ? » estime Jérôme Robin, directeur général du courtier.

La seconde est juridique. Le code civil, en effet, ne semble pas prévoir pas ce cas de figure. Selon l’interprétation des banques, plusieurs de ces articles semblent même l’exclure, notamment les articles 1902 - qui stipule que « l’emprunteur est tenu de restituer le capital emprunté » - et 1905 - qui indique bien que la finalité de l’intérêt est bien la « rémunération du prêt », et pas de l’emprunt -…

L’application d’un taux négatif est toutefois théoriquement possible, estime Me Gwenaelle Soussens, avocate experte en droit immobilier cité dans le communiqué de Vousfinancer : « [Les] arguments [des banques] peuvent être déboutés un par un. En cas de taux négatif, l’emprunteur rembourse tout de même le capital emprunté mais se voit verser en compensation une somme d’argent qui vient diminuer le montant net versé à la banque. Mais le capital lui est bien remboursé ! »

Seuls les taux révisables…

Dans les faits, toutefois, les seuls précédents connus concernent des crédits souscrits à taux révisables, indexés sur l’Euribor, sans plancher. Or actuellement, 99,97% des Français empruntent à taux fixe, selon Crédit Logement. Et la plupart des banques ont stoppé leurs offres à taux révisable depuis 2016 !