Suivant la courbe des taux de crédit, les taux d’usure n’ont jamais été aussi bas. A tel point que certains professionnels pointent un risque d’exclusion de certains profils atypiques d’emprunteurs. Il demandent aux pouvoirs publics de changer les règles.

C’est un fait : les professionnels du crédit immobilier anticipent une baisse de l’activité en 2018. En cause, la hausse même modérée des taux, la hausse des prix des biens et le recentrage ou la disparition de dispositifs d’aide à l’achat comme le Prêt à taux zéro (PTZ) ou l’APL accession.

Il existe un autre frein potentiel à la production de nouveaux crédits immobiliers : le taux d’usure. C’est en tout cas l’opinion de plusieurs courtiers spécialisés, qui tirent la sonnette d’alarme. Exemple avec Cafpi, qui « note de plus en plus de refus des banques, à cause du taux d’usure ».

Des taux d’usure historiquement bas

Où se situe le problème ? Il est en fait une conséquence de l’exceptionnelle faiblesse des taux immobiliers depuis plus de 2 ans. Les seuils de l’usure, destinés à protéger les emprunteurs contre d’éventuelles dérives des prêteurs sont, en effet, le reflet direct, augmenté d’un tiers, des taux réels moyens appliqués par les banques au cours du trimestre précédent. Les banques ont l’obligation de maintenir les taux annuels effectifs globaux (TAEG) - c’est-à-dire assurance et frais de dossiers compris, entre autres - proposés à leurs clients sous ces taux d’usure.

Les taux d’usure en vigueur au 4e trimestre 2017

  • Prêts immo à taux fixe < 10 ans : 3,05%
  • Prêts immo à taux fixe ≥ 10 ans et < 20 ans : 3,07%
  • Prêts immo à taux fixe ≥ 20 ans : 3,35%
  • Prêts immobiliers à taux variable : 2,89%
  • Prêts-relais : 3,40%

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Un risque d’exclusion

Conséquence de ce mode de calcul : les seuils de l’usure appliqués actuellement se situent également à des niveaux historiquement bas. A tel point qu’ils remettent en cause les projets de certains emprunteurs. « Sur des dossiers particuliers, le taux d’usure peut aujourd’hui rapidement être atteint voir dépassé », constate Philippe Taboret, porte-parole de Cafpi.

Le courtier Empruntis en donne quelques exemples : « l’acquisition ou le rachat de crédit immobilier sur une durée longue ; l’acquisition avec des problèmes de santé ; l’acquisition par les seniors ; les situations d’achat-revente des secundo-accédants ».

Des pistes de réformes

Comment remédier à ce risque d’exclusion ? « C'est un vrai sujet sur lequel nous avons alerté les pouvoirs publics et le gouverneur de la Banque de France », annonce la Fédération Bancaire Française (FBF) dans Les Echos. Plusieurs pistes existent pour redonner de la marge aux banques en période de taux très bas : une révision de la formule de calcul, par exemple, ou la mise en place de taux planchers. Une suppression pure et simple paraît plus hypothétique, s’agissant d’un dispositif destiné à protéger les consommateurs.

A plus court terme, les banques peuvent essayer de maintenir leurs TAEG sous les taux d’usure, rappelle Empruntis, en limitant par exemple le coût de l’assurance ; en réduisant l’impact des frais de dossier ou de garantie ; ou tout simplement en baissant leurs taux de crédits.