Alerte : les prix et les taux immobiliers augmentent de façon simultanée depuis le début 2017. Faut-il alors concrétiser son projet immobilier au plus vite ? Ou au contraire ne pas céder à la panique ?

L’agent immobilier : « Décidez-vous vite, les prix augmentent ! » Le courtier en crédit, ou le banquier : « Ne tardez pas trop, les taux repartent à la hausse. » Les particuliers portant un projet d’achat immobilier ont forcément entendu ces arguments ces dernières semaines. Et les mêmes éléments de langage sont relayés dans les médias, les réseaux immobiliers communiquant des statistiques invitant clairement les acheteurs et emprunteurs à accélérer leurs projets.

Certes, ces informations correspondent à une réalité. L’étude Notaires-Insee, qui fait office de référence dans le secteur, annonce que la hausse des prix s’amplifie au premier trimestre 2017, de l’ordre de 3% sur un an pour les logements anciens. Et les taux ont effectivement amorcé leur rebond fin 2016 et début 2017. Mais la hausse des prix et des taux est-elle suffisamment forte pour qu’elle justifie de précipiter un achat immobilier, un projet qui engage les acquéreurs-emprunteurs sur de nombreuses années ?

Taux de crédit : remontée en pente douce

Côté taux immobilier, pas de panique : un prêt immobilier sur 20 ans se négocie à 1,60% environ actuellement selon l’observatoire Crédit Logement-CSA, contre 1,37% en novembre dernier, le plus bas enregistré par cet observatoire. L’heure est actuellement à la stabilisation, « le plus fort de la hausse » ayant été constaté en février selon cet observatoire, qui prédit plutôt un « allègement des taux des crédits » pour ce début d’été.

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L’incidence des taux sur les prix immobiliers

Côté prix, la donne est différente. « Habituellement, quand les taux augmentent les prix baissent et vice versa », rappelle Bernard Thion, chercheur associé au CEREG, spécialisé en économie immobilière. Ainsi, « depuis 2 ans les taux ont baissé » et les prix ont bien suivi la courbe inverse. En 2017, en revanche, prix et taux suivent la même courbe ascendante : « Nous sommes dans un contexte particulier. La confiance des particuliers remonte. On constate un phénomène de concrétisation des projets, poussé par l'enthousiasme économique post-élections. » Un contexte qui entretient la hausse des prix immobiliers, la faute à de nombreux acheteurs présents sur le marché, sans que la légère remontée des taux en cours ne casse cette dynamique.

Hausse des prix en ville, marché atone à la campagne

Au niveau national, les indicateurs ne laissent place à aucune ambiguïté : des prix assez nettement en hausse, et des taux qui rebondissent lentement. Toutefois, les acquéreurs potentiels doivent se pencher sur les spécificités locales. « Le marché immobilier est actuellement très inégal sur le territoire français », explique l’économiste Bernard Thion, qui réalise régulièrement des études pour le portail des notaires, Immonot. « Il y a une vraie fracture entre les grandes villes où la dynamique est clairement à la hausse des prix, sans que l’on puisse parler d’explosion, et les zones excentrées où la dynamique est bien plus faible. »

Les prix ont bondi de près de 12% en un an à Bordeaux selon MeilleursAgents, et de plus de 7% à Paris. Les données de ce réseau portent sur les promesses de vente, ce qui leur permet d'avoir un temps d'avance sur les statistiques des notaires, qui portent elles sur les actes authentiques. Les estimations de MeilleursAgents sur les prix dans les grandes villes illustrent ainsi la forte inflation du marché dans les grandes agglomérations.

Prix des appartements dans les grandes villes
VillesPrix au 1er juinÉvolution sur 1 an
Paris8 709 euros le m2+7,20%
Marseille2 456 euros le m2+1,70%
Lyon3 503 euros le m2+6,90%
Toulouse2 643 euros le m2+1,40%
Nice3 837 euros le m2+3,60%
Nantes2 691 euros le m2+6,40%
Strasbourg2 618 euros le m2+4,80%
Montpellier2 682 euros le m2-0,70%
Bordeaux3 442 euros le m2+11,80%
Lille2 555 euros le m2+1,70%
Source MeilleursAgents sur la base des promesses de vente signées en mai 2017.
L'évolution sur 1 an porte sur les appartements et les maisons.

Se précipiter ? « Non, sauf à Bordeaux »

A l’écart des plus grandes agglomérations, les acheteurs sont moins nombreux que les vendeurs, toujours selon MeilleursAgents qui a créé l’indicateur de tension immobilière (ITI) pour mesurer le rapport de force entre offre et demande sur le marché. « En régions, les prix n’ont quasiment pas bougé ces derniers mois, voire se sont légèrement affaiblis », affirme l’universitaire Bernard Thion. Les évolutions récentes doivent-elles donc pousser les acquéreurs potentiels à se précipiter ? « Non, clairement pas ! » réagit l’économiste, « sauf si vous avez un projet d’achat à Bordeaux, ou éventuellement à Nantes ».