Quand un emprunteur signe son prêt immobilier, la banque lui réclame quasi systématiquement d’ouvrir un compte courant et d’y domicilier ses revenus. Un décret et une ordonnance, à paraître prochainement, devraient encadrer cette pratique.

Lors d’une négociation de crédit immobilier, la question du compte courant est abordée plutôt tardivement. Et l’ouverture d’un compte bancaire, par lequel transitent les revenus et où sont prélevées les échéances, apparaît alors comme naturelle dans le discours du banquier. Pourtant, d’un point de vue juridique et réglementaire, la banque ne peut forcer son client à domicilier ses revenus, sauf dans certains cas bien spécifiques. Mais, pour obtenir un taux avantageux, difficile de refuser…

Lire à ce propos : Prêt immobilier : la domiciliation des revenus est-elle abusive ?

Le législateur s’est saisi de cette question épineuse dans le cadre de la loi Sapin 2. Cette dernière habilite le gouvernement à « prendre par ordonnance » une mesure encadrant « les conditions dans lesquelles la souscription par un consommateur d’un contrat de crédit immobilier ainsi que le niveau de son taux d’intérêt peuvent être associés à l'ouverture d'un compte de dépôt et à la domiciliation de ses revenus » d'ici au 10 mai 2017. Le projet d’ordonnance en question, ainsi que celui d'un décret associé, a été présenté cette semaine au Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF), saisi pour avis pour tout projet de texte réglementaire.

Vers une domiciliation de salaires limitée à 10 ans

L’ordre du jour du CCLRF du 4 avril ne permet pas de connaître le contenu des textes en cours de validation, mais Le Monde a pu consulter une copie du projet d’ordonnance. S’il est publié en l’état, les banques contraignant leurs clients à domicilier leurs revenus devront le mentionner clairement dans le contrat de prêt, et en l’échange d’une contrepartie : « Il peut s’agit, par exemple, d’un taux particulièrement attractif ou de la suppression des frais de dossier », affirme le quotidien, dans son édition du 5 avril, avant d’ajouter : « l’avantage [devra] être mentionné dans le contrat ».

Cette mesure permettrait de clarifier la situation : les clauses de domiciliation ne seront valides que si la contrepartie est clairement exprimée dans le contrat, et si cette contrainte est limitée dans le temps. Selon Le Monde, le projet de décret fixe à 10 ans le délai maximum. Et si l'emprunteur change de banque de façon anticipée, la pénalité devra être « limitée ». En l'état, ces textes réglementaires visent donc à éviter les abus, sans toutefois interdire les clauses de domiciliation comme le souhaitaient certains parlementaires.