Après 6 années de chute ininterrompue, le marché du crédit renouvelable s’est stabilisé depuis deux ans. Certains observateurs annoncent même une reprise de l’activité en 2017. Alors, l’heure du retour en grâce a-t-elle sonné pour ce produit tant décrié ?

28,5 milliards d’euros d’encours en septembre 2009, au fait de sa gloire ; 19,5 milliards en septembre 2016 : c’est la chute mémorable que le crédit renouvelable a connu au cours des 7 dernières années, période au cours de laquelle sa production a été divisé par deux. Une forme de disgrâce qui a débuté dans les suites de la crise financière de 2008, et qui s’est encore accentuée, à partir de juillet 2010, avec la promulgation et l’entrée en vigueur de la loi dite « Lagarde » portant réforme du crédit à la consommation.

D’un point de vue symbolique, la loi Lagarde a contribué à associer, dans l’esprit du grand public, crédit renouvelable et surendettement. Ce ne fut pas sans raison : en 2011, le produit était encore présent dans 42% des dossiers de surendettement jugés recevables. Mais cette association systématique est allée trop loin : « Il y a eu une double pression, réglementaire et médiatique », estime Barbara Blanc, la directrice marketing produits, services et marchés de Cetelem, une société financière spécialisée, filiale de BNP Paribas. « On a pu voir à l’époque des reportages à charge, passant sous silence le travail qualitatif mené pour adapter le produit au cadre réglementaire. »

Un marché devenu majoritairement bancaire

Quoi qu’il en soit, la loi Lagarde et la loi Hamon - qui lui a succédé en 2014 et qui a continué d’encadrer la distribution du crédit renouvelable - ont porté leurs fruits. Fin 2015, le produit n’était plus présent que dans 23% des dossiers de surendettement recevables. La structure du marché, également, a évolué. « Fin 2011, les sociétés spécialisées représentaient 57% du marché du crédit renouvelable », détaille Barbara Blanc. « Ce chiffre est tombé à 44% fin 2016 ». Et ce sont désormais les banques qui captent la majorité du marché : 51% fin 2016.

Un basculement qui s’explique. D’un côté, les établissements spécialisés ont subi de plein fouet le discrédit. « Après la loi Lagarde, l’adaptation au cadre réglementaire a mobilisé les équipes, au dépens de la promotion du produit, qui a été moins mis en scène », estime Barbara Blanc. De l’autre, les banques ont trouvé un bon vecteur de distribution, avec la carte bancaire dite « débit/crédit », qui permet au choix de payer comptant ou de puiser dans un crédit renouvelable. « Ces cartes sont maintenant présentes dans la grande majorité des banques de détail et, depuis deux ans environ, elles généralisent même l’alimentation automatique du découvert par le compte de crédit renouvelable », a constaté Gaëlle Turpin, qui observe le marché du crédit renouvelable pour le compte du cabinet de conseil Jasmin.

Un usage recentré sur la gestion de budget

Ce faisant, les banques ont contribué au recentrage du crédit renouvelable sur son usage originel. « Le crédit renouvelable en revient à son usage initial », confirme la porte-parole de Cetelem, Barbara Blanc, « celui d’un outil de gestion budgétaire, permettant d’utiliser de petits montants sur de courtes durées ». Pour financer un bien, faire face à un aléa mais surtout, comme alternative au découvert bancaire, pour financer des dépenses courantes de consommation en fin de mois.

Crédit renouvelable et découvert apparaissent ainsi comme les deux faces d’une même pièce. La réduction du recours au premier a d’ailleurs été compensée par l’utilisation du second. « Les ménages se sont repliés sur des offres de type découvert, différé de paiement ou paiements en plusieurs fois, avec ou sans frais », confirme Gaëlle Turpin. Pourtant « dans certains cas, un crédit renouvelable peut s’avérer moins onéreux qu’un découvert », poursuit la spécialiste de Jasmin.

Rentable pour les banques

« Plus rassurant » aussi, renchérit Barbara Blanc, qui explique que les industriels du secteur ont adapté leur offre avec des produits à durées de remboursement plus courtes et plus souples. « Le service ''Avance d’argent'' d’Oney illustre bien cette évolution », estime Gaëlle Turpin. « Il permet d’emprunter 300 euros sur 3 mois, avec un coût affiché en montant et pas en pourcentage. »

Les taux d’intérêt des crédits renouvelables, pour autant, restent souvent proches des seuils de l’usure. Car le produit a aussi l’avantage, pour les banques cette fois, d’être particulièrement rentable. Une aubaine en période de taux bas, comme c’est actuellement le cas.

Retour en grâce ?

Un lien moins évident avec le surendettement, une offre améliorée, un usage recentré, une production stabilisée depuis deux ans : tout semble donc réuni pour un redémarrage du crédit renouvelable en France. « Nous pensons en effet que la production a atteint son niveau plancher en 2016 », analyse Gaëlle Turpin. Barbara Blanc, de son côté, n’évoque dans l’immédiat qu’une « légère reprise ». Mais elle aussi estime que le « crédit renouvelable a de l’avenir ».

Une condition toutefois : réussir à valoriser le produit auprès des clients. « La communication autour de ce crédit doit plus que jamais intégrer un volet pédagogique », estime Gaëlle Turpin. La preuve : selon une étude menée en septembre 2016 par l’Ifop pour le compte du ministère de l’Economie et des Finances, 7 Français sur 10 ne savent pas comment fonctionne un crédit renouvelable.