Bis repetita. En juin 2015, suite à l’annonce du rebond des taux immobiliers, les banques étaient submergées de demandes de crédit ou de renégociation. La baisse ininterrompue des taux fixes, depuis la fin de l’été 2015, a pris fin en décembre. Le même scénario se répète, avec des délais de traitement qui s’allongent. Quelles conséquences pour les emprunteurs ?

Aussi loin que remontent les statistiques de la Banque de France, jamais la production de crédit n’avait atteint de tels sommets. Un nouveau record de production mensuelle a été battu en novembre, avec 27,5 milliards d’euros dont près de 60% de renégociations. Etant donné la médiatisation de la remontée des taux de crédit, et les témoignages d’afflux dans les banques, ce record sera à coup sûr battu au mois de décembre 2016. Et l’année 2017 devrait s’engager sur des bases similaires. Conséquence directe de cette ruée sur le prêt immobilier, en particulier sur la renégociation : des embouteillages dans les banques. Depuis la mi-décembre, un nouveau dossier met parfois trois semaines avant même d’être étudié, souffle un courtier.

Les délais « standard » pour un dossier de crédit immo

D'ordinaire, il faut compter environ un mois pour recevoir l’offre de prêt de la part de la banque. Un délai qui se décompose en plusieurs phases.

  • Etape 1 : après avoir négocié avec sa banque ou par l'intermédiaire d'un courtier, l'emprunteur doit solliciter un rendez-vous de finalisation de demande de crédit. Il faut compter quelques jours voire semaines pour la prise de rendez-vous et l’accord de principe de la banque.
  • Etape 2 : il faut ensuite compter deux à trois semaines pour la réception de l’offre de prêt.
  • Etape 3 : après réception, il faut encore prendre en compte le délai réglementaire de réflexion de 10 jours pour la signature du contrat. Puis, enfin, un minimum de quelques jours pour que le déblocage puisse être effectué, ou plus en fonction de ce qui a été convenu.

Le délai d’édition des offres a « doublé »

« Pour une prise de premier rendez-vous, en banque, on constate un allongement de plusieurs jours » par rapport aux délais habituels, explique Cécile Roquelaure, directrice de la communication d’Empruntis. « Ainsi, avant, on pouvait avoir un rendez-vous dans la semaine, à présent pour beaucoup d’établissements il faut compter 15 jours. » L’autre « délai important » à prévoir, toujours selon Cécile Roquelaure, se constate sur l’édition des offres : « Auparavant le délai moyen constaté était de 15 jours, il a doublé voire a été augmenté de 3 semaines. » Bilan, jusqu’à un mois de délai supplémentaire pour obtenir son offre de crédit : deux mois au total au lieu d'un avant la réception de l’offre de prêt.

« Le pire est derrière nous » pour les délais

Sandrine Allonier, de Vousfinancer, livre des estimations similaires tout en soulignant l’extrême hétérogénéité des délais : « Plus les taux pratiqués sont bas, plus la banque fait face à un afflux de dossiers et donc plus le délai s’allonge. » Ainsi, selon l’affluence enregistrée par la banque prêteuse, le délai d’émission a pu être rallongé d’un mois dans certains cas, quand d’autres enseignes n’enregistrent aucun délai supplémentaire. « Le pire est derrière nous », ajoute toutefois Sandrine Allonier en se basant sur le ressenti des courtiers du réseau Vousfinancer. « Il y a eu une bousculade au mois de décembre, avec les renégociations et les demandes des emprunteurs jusque là attentistes, sans oublier les habituels dossiers de défiscalisation en immobilier locatif de fin d’année et les dossiers incluant un Prêt à taux zéro 2016. » En janvier, s’il reste des dossiers retardataires à traiter, l’engorgement est en « voie de normalisation », et la situation devrait « rentrer dans l’ordre d’ici la fin du mois de janvier », prévoit Sandrine Allonier.

Allonger le délai inscrit sur le compromis de vente

Les emprunteurs ayant déposé un dossier ou s’apprêtant à le faire doivent-ils prendre des précautions ? Oui, selon Pascal Beuvelet, président du réseau In&Fi Crédits, qui conseillait dès le mois de décembre d’allonger le délai d’obtention du crédit inscrit dans le compromis de vente. Cette condition suspensive est au minimum d’un mois (1) mais elle s’étend traditionnellement à 45 jours dans les promesses ou compromis. Pascal Beuvelet conseille ainsi de négocier une extension de ce délai à 60 « voire 75 jours ».

Même conseil du côté d’Empruntis et Vousfinancer, où les porte-paroles estiment que prévoir un délai supplémentaire de 15 jours minimum est une « bonne précaution ». Pour rappel, rien n’empêche un emprunteur de déposer un dossier auprès de plusieurs banques afin d’assurer ses arrières. Par ailleurs, les emprunteurs ayant déjà signé un compromis peuvent eux étendre ce délai en accord avec le vendeur.

Renégociation : peu de risque de manquer l’aubaine

La problématique du compromis ne concerne évidemment pas les particuliers souhaitant renégocier leur taux, et qui ont attendu le dernier moment pour s’atteler à la tâche. Peuvent-ils être lésés par ces délais supplémentaires ? « Le taux va être bloqué au moment de l’accord de principe », rappelle Sandrine Allonier, de Vousfinancer. Autrement dit, le seul délai à prévoir pour les emprunteurs souhaitant renégocier est celui de la prise de rendez-vous, puis de la négociation jusqu’à l’accord de principe. Un délai donc plus limité et qui ne devrait pas empêcher de profiter de l’aubaine des taux bas.

Des hausses de taux « chirurgicales »

Les hausses de taux s’avèrent par ailleurs limitées jusqu’à présent. Sandrine Allonier recense des augmentations de grilles de taux de 0,20 point maximum en janvier, quand deux banques régionales diminuent les leurs de 0,10 point : « Elles opèrent de façon chirurgicale car elles ne veulent pas casser la demande sur leurs cœurs de cible respectifs », soit les profils haut de gamme pour certaines banques, les ménages achetant pour la première fois pour d’autres.

Voir par ailleurs le baromètre des taux de crédit en janvier

(1) Article L312-16 du code de la consommation.