Le gouvernement avait intégré à la loi des finances pour 2014 une mesure visant à légaliser les emprunts toxiques souscrits par les collectivités auprès d'établissements de crédit. Objectif : combler une brèche juridique pouvant avoir d’importantes incidences budgétaires. Le Conseil constitutionnel a censuré cette mesure, mais avant tout pour des questions de forme. Bercy a déjà annoncé préparer un nouveau texte.

Le 8 février 2013, le tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre a pris une décision pouvant potentiellement avoir de fortes incidences sur les finances publiques. Le TGI avait donné raison au département de Seine-Saint-Denis dans son procès l’opposant à la banque Dexia, dans le cadre de l’affaire des emprunts toxiques. En cause : le fait que les télécopies précédant le contrat de prêt n’indiquaient pas le taux effectif global (TEG), c'est-à-dire le coût global du crédit.

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Dexia a fait appel. Mais suite à ce jugement, plusieurs collectivités locales victimes des emprunts toxiques se sont engouffrées dans la brèche. Si elle faisait jurisprudence, cette décision du tribunal de Nanterre pourrait permettre à ces collectivités d’abaisser leur taux d’emprunt au niveau du taux d'intérêt légal en vigueur, de 0,04% en 2013. Problème : suite à ses déboires financiers, l’Etat a partiellement recapitalisé la banque Dexia et s’en est porté garant. Afin de limiter les risques pour les finances publiques, le gouvernement a intégré à la loi de finances pour 2014 une mesure validant les contrats de prêts en cause.

« Pas sa place en loi de finances »

Hier, le Conseil constitutionnel a retoqué cette mesure. Sa décision s’appuie principalement sur deux points. Premier grief : la trop large portée de la mesure. Dans les commentaires accompagnant leur décision, les Sages soulignent que si le texte était validé en l’état, « toute société de droit privé pouvait se voir priver de faire valoir ses droits alors qu’un établissement de crédit lui aurait accordé un prêt sans mentionner le TEG dans leur contrat ».

Second grief : le fait que cette « modification générale des règles du droit du crédit » n’avait « pas sa place en loi des finances ». Des soucis de forme qui ont permis à Bercy d’annoncer aussitôt une nouvelle mouture : « Un dispositif législatif tenant compte des arguments soulevés par le Conseil constitutionnel sera préparé dans les meilleurs délais », ont précisé le ministre des Finances Pierre Moscovici et le ministre délégué au Budget Bernard Cazeneuve dans un communiqué commun.

Les Sages ont en revanche validé le paragraphe de l’article 92 de la loi des finances pour 2014 encadrant la création du fonds d’aide aux collectivités territoriales et établissements publics locaux victimes des emprunts toxiques.