Généralement, il ne dure que quelques secondes tout au plus. Mais le délai d'un paiement par carte peut parfois s'allonger, quand le feu vert de la banque est sollicité. Explications.

On s'est tous retrouvés un jour à la caisse d'un magasin, face à un terminal de paiement qui reste bloqué pendant de longues secondes sur « Autorisation en cours... », en train de se demander comment on va régler ses achats si le paiement finit par être refusé. La situation est d'autant plus stressante qu'elle est relativement rare. La fiabilité et la rapidité font en effet partie des qualités qui ont permis à la carte bancaire de devenir, de loin, le moyen de paiement préféré des Français, le plus utilisé (si on met de côté les espèces), mais aussi le plus apprécié : selon un récent rapport (1), nous sommes plus de 80% à la considérer comme le meilleur moyen de paiement.

De temps à autre toutefois, un paiement par carte met plus de temps à passer que d'habitude. La raison ? Avant de valider l'opération, l'autorisation de votre banque est demandée. Un feu vert qui, généralement, arrive en quelques secondes, mais qui peut parfois se faire attendre, voire ne jamais arriver. Pourquoi certains paiements ne nécessitent-ils pas d'autorisation, et d'autres oui ? Quand cette demande intervient-elle ? Et pourquoi le délai de réponse varie-t-il ?

Pourquoi certains paiements par carte passent-ils immédiatement ?

Vous avez à peine fini de composer votre code que le terminal de paiement électronique (TPE) est déjà en train d'éditer la facturette. Lorsque ça arrive, c'est souvent parce que le paiement s'est déroulé « hors ligne » (ou offline, dans le jargon monétique), c'est-à-dire sans demande d'autorisation à votre banque. C'est normal : le réseau CB, qui traite l'immense majorité des paiements effectués en France, est conçu pour fonctionner comme cela.

Développé dans les années 1980 à l'initiative de l'Etat et de l'industrie bancaire, le schéma français a fait du paiement offline la norme pour une raison : gagner du temps et de l'argent. A cette époque pré-internet, la liaison entre les TPE et les serveurs d'autorisation des banques passaient en effet par le réseau téléphonique commuté (RTC), le « réseau cuivré » qui va disparaître définitivement à partir de 2023. Un mode de communication fiable, mais lent, et relativement coûteux. Pour éviter que les files d'attente s'allongent aux caisses, pour encourager aussi les consommateurs à adopter la carte, plus sûre que le chèque ou les espèces, CB et les banques ont donc choisi de tolérer les paiements sans autorisation.

Ce faisant, elles ont aussi accepté de prendre un risque. Avec la carte, au contraire du chèque, le commerçant a en effet l'assurance d'être payé, et c'est la banque qui s'engage à supporter les conséquences d'une éventuelle insolvabilité de son client.

Dans quels cas de figure l'autorisation est-elle demandée ?

Le risque que les banques sont prêtes à prendre a toutefois ses limites. Les cartes qu'elles fournissent ne fonctionnent donc pas seulement hors ligne : Elles sont paramétrées pour déclencher des demandes d'autorisations dans certains cas.

Parmi les critères retenus, on retrouve notamment une limite financière - un montant cumulé de dépenses consécutives possibles sans autorisation - et une limite quantitative - un nombre cumulé de transactions consécutives possibles sans autorisation. Exemple : une carte peut être programmée pour accepter 1 500 euros de dépenses consécutives en offline, ou 50 paiements consécutifs. Lorsque ces chiffres sont atteints, elle sollicitera une autorisation.

Ces limites dépendent généralement du type de la carte. En entrée de gamme, les cartes dites « à autorisation systématique » - Electron chez Visa, Maestro chez MasterCard, etc. - sont ainsi conçues pour contrôler le solde du compte à chaque paiement. Elles sont destinées plutôt à la clientèle jeune et/ou fragile financièrement. A mesure que l'on monte en gamme, la capacité des cartes à fonctionner hors ligne a ensuite tendance à augmenter, en particulier lorsqu'elle sont à débit différé.

Mais c'est aussi le TPE lui-même qui peut déclencher la demande d'autorisation. C'est le cas, systématiquement, dès que le montant d'un paiement dépasse les 100 euros (2). Ce seuil est parfois abaissé, par exemple à 50 euros, chez certains commerçants « à risque » car plus exposés à la fraude, comme les buralistes. En dessous de ces seuils, enfin, des demandes d'autorisation sont parfois déclenchées, de manière aléatoire.

Pourquoi ces différences dans les délais de réponse ?

Selon CB, son réseau de paiement en lui-même n'est pas en cause, car il est capable d'offrir une réponse de manière quasi-instantanée. La différence de délai vient donc de la qualité de la connexion entre le TPE du commerçant et ce réseau.

Cette connexion, toutefois, tend à être de plus en plus efficace et rapide. Les TPE modernes sont connectés, non plus au vieux réseau téléphonique cuivré, mais à l'internet. La réponse à la demande d'autorisation est donc quasi-instantanée, et très généralement inférieure à 5 secondes. Si c'est plus long, c'est que le commerçant a un problème technique, ou qu'il possède encore un TPE d'ancienne génération.

Dans tous les cas, si le délai est trop long, le commerçant a la possibilité de « forcer » l'autorisation, sans attendre la réponse de la banque du client. Mais attention, il renonce dans ce cas à sa garantie de paiement et n'est plus couvert en cas de fraude ou d'impayés.

Y a-t-il de plus en plus de cartes à autorisation systématiques ?

La modernisation du parc des TPE, soutenue par les pouvoirs publics dans le cadre de sa stratégie nationale des paiements, a une conséquence : elle permet de mutliplier les paiements avec autorisation (dits online) sans trop dégrader la qualité de service. Cette évolution a permis l'émergence ces dernières années de nouveaux types de cartes bancaires, capables dans certains cas particuliers - à l'occasion de paiements sur automates, dans les parkings ou aux péages, notamment - de fonctionner hors ligne, mais conçues pour déclencher une demande d'autorisation aussi souvent que possible.

Ces cartes - qu'on décrit parfois comme « à contrôle de solde » pour les distinguer des cartes à autorisation systématique d'entrée de gamme - sont d'abord apparues dans les néobanques comme N26 et Revolut. On les retrouve désormais également dans les banques en ligne : chez ING (Mastercard Essentielle et Intégrale), Boursorama (Visa Welcome et Ultim), chez Fortuneo (Mastercard Fosfo) ou BforBank (Visa Classic). Elles leur permettent notamment de mettre en avant une fonctionnalité de plus en plus appréciée par les usagers : la mise à jour du solde du compte en temps réel.

Ces cartes nouvelle génération ont un autre point commun : elle n'affichent pas le logo CB du réseau domestique français, mais sont des « pures » Mastercard ou Visa. Et ce n'est pas un hasard. « CB reste dans sa logique, celle du offline, mais devient l'exception », explique un professionnel de la monétique sous couvert d'anonymat. « Les réseaux comme Visa ou Mastercard sont eux demandeurs de l'autorisation à chaque opération. Cela permet de mieux apprécier les risques de fraude, et de rendre inopérante une carte confisquée par la banque ou déclarée perdue ou volée ». La carte à contrôle de solde a donc toutes les chances de devenir un futur standard.

A consulter : le comparatif des cartes bancaires gratuites

(1) « Cards in the evolving European payments landscape », rapport publié par Payments Europe en décembre 2019. (2) Le montant moyen d'un paiement par carte en France en 2017 était de 42 euros, selon la Banque de France.