Le prix des cartes bancaires à débit différé, autrefois nettement plus élevé, se rapproche désormais de celui du débit immédiat. Dans ce contexte, faut-il opter pour le débit différé ? Revue des avantages respectifs des deux types de cartes bancaires.

0,26 euro : actuellement, c’est l’écart du prix annuel moyen d’une carte Visa Premier à débit immédiat, par rapport à la même carte en débit différé (1). Autant dire pas grand chose, voire rien dans la plupart des enseignes qui ont aligné les deux tarifs. La remarque vaut également pour la Gold MasterCard (0,55 euro d’écart) et pour les cartes bancaires d’entrée de gamme Visa Classic (0,68 euro) et Mastercard Standard (0,97 euro).

Cette proximité tarifaire n’a pas toujours été la norme. Début 2014 par exemple, les écarts de prix annuels moyens entre le débit immédiat et le débit différé étaient plus élevés, de 3,40 euros pour la Visa Premier à 8 euros pour la Mastercard Standard. Elle peut également étonner. En effet, le débit différé est un service supplémentaire - un décalage de trésorerie, sorte de crédit gratuit à très court terme - qui représente un coût pour les banques. Pourquoi alors les enseignes ont-elles massivement décidé d’aligner les prix des deux débits ? Tout simplement parce que les cartes à débit différé, depuis 2015, leur rapportent plus à l’usage que les cartes à débit immédiat. A chaque fois que vous payez par carte, votre banque touche une commission dite d’interchange, qui est plus élevée si la carte est à débit différé (0,30%) plutôt qu’à débit immédiat (0,20%).

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Dans ce contexte, une question, logiquement, se pose : puisqu’avec le débit différé, on en a plus pour le même prix (ou presque), opter pour le débit immédiat a-t-il encore un intérêt ? Tout dépend de votre comportement, de vos besoins et de vos objectifs.

Le débit différé, pour la souplesse

Rappel : tout l’intérêt du débit différé est de bénéficier d’un délai entre le moment où l'achat par carte est réalisé et le moment où cette opération est débitée du compte. Toutes les dépenses par carte des 30 derniers jours sont en effet déduites en une fois, à date fixe, généralement le dernier jour du mois calendaire, mais parfois à une date négociée avec votre banque, par exemple pour qu’elle coïncide avec le versement de votre salaire.

La carte à débit différé est donc particulièrement intéressante pour les personnes en quête de souplesse dans la gestion de leur argent. Quelques exemples :

  • les professionnels qui doivent avancer certaines dépenses (repas, hôtels, essence) liées à leur activité : le débit différé leur permet d’être remboursés par leur entreprise avant même que les achats soient effectivement débités ;
  • les voyageurs qui doivent s’acquitter de cautions pour la location de voitures ou la réservation d’une chambre d’hôtel. A l’étranger d'ailleurs, certains loueurs n’acceptent que les cartes à débit différé.
  • les particuliers multibancarisés qui utilisent plusieurs comptes en même temps. Le débit différé leur permet de continuer à utiliser leur compte secondaire sans risque immédiat de découvert, même s'ils ont tardé ou oublier de l'approvisionner.

Le débit différé peut aussi être utile dans des cas de figure plus ponctuels :

  • pour faire face à un coup dur entraînant une grosse dépense (un sinistre automobile, une chaudière qui rend l’âme…) ;
  • pour avancer l’argent d’une dépense commune ;
  • pour se faire plaisir avec un bien coûteux : un ordinateur, un voyage, etc.

« Le différé occasionne des dépenses supérieures »

L’usage du débit différé impose toutefois de bénéficier de rentrées d’argent régulières et substantielles, pour couvrir les dépenses du mois précédent, et de gérer sainement ses finances. « Il faut rester conscient d'une chose : un différé occasionne des dépenses supérieures, car il facilite l'achat impulsif », explique un professionnel de la monétique. « On remarque ainsi que même les bons gestionnaires ont tendance à dépenser plus lorsqu’ils passent en débit différé, et que leur capacité d'épargne s'en trouve généralement réduite. »

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Le débit immédiat, pour le contrôle

Malgré ses atouts, la carte à débit différé présente donc un risque : celui d’avoir de plus en plus de mal, au fil des mois, à équilibrer dépenses et rentrées d’argent. Vos revenus sont limités ou irréguliers ? Vous ne disposez pas d’épargne de précaution ? Vous n’avez pas besoin d’avancer le montant de certaines dépenses pour votre travail ? Vous êtes sujets aux achats impulsifs ? Même à prix similaire, mieux vaut opter pour une carte à débit immédiat, qui affecte le solde de votre compte au fil de l’eau et facilite donc le suivi budgétaire.

Une instantanéité de plus en plus recherchée et répandue

Un suivi d’autant plus aisé que, de plus en plus souvent, les cartes à débit immédiat fonctionnent en temps réel, avec report immédiat du montant des achats sur le solde. C’est le cas des cartes des néobanques (Nickel, N26, Revolut, Orange Bank) ou d’Eko, l’offre low-cost du Crédit Agricole, mais aussi de cartes au profil plus haut de gamme, comme Ultim de Boursorama ou Fosfo de Fortuneo. Une instantanéité de plus en plus recherchée par certains clients, à l’heure où les applications mobiles permettent de consulter son solde partout et tout le temps.

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Tout le monde peut-il accéder au débit différé ?

Reste une autre limite : il n’est pas toujours possible d’obtenir une carte à débit différé. Pour deux raisons. La première : certaines banques ne proposent tout simplement pas ce service sur leurs cartes classiques. C’est le cas, depuis peu, d’Orange Bank. La néobanque, qui vient de changer de réseau d’acceptation (elle quitte Visa pour Mastercard), en a profité pour supprimer la version débit différé de sa carte gratuite d’entrée de gamme.

Ce faisant, Orange Bank s’aligne sur une tendance à l’œuvre dans la plupart des banques en ligne. BforBank, Fortuneo, Hello Bank ou encore ING réservent en effet le débit différé à leurs cartes premium, payantes ou accessibles sous conditions de revenus. Seules Boursorama et Monabanq font désormais exception. Pourquoi pas de débit différé avec les cartes standard ? Pour limiter les risques de dérapage. Le débit différé paraît en effet difficilement compatible avec ces offres d'entrée de gamme gratuites, sans conditions de revenus et, le plus souvent, sans découvert autorisé, clairement conçues pour une clientèle souhaitant maîtriser ses dépenses.

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L’offre de cartes classiques à débit différé est beaucoup plus large dans les banques traditionnelles. Là aussi toutefois, tout le monde n’y a pas le droit : le choix d’accorder un débit différé dépend généralement, comme c’est le cas pour un crédit, du « score » du client. C’est-à-dire de son historique au sein de la banque et de l’appréciation du conseiller qui suit le compte. Des revenus trop faibles ou irréguliers ? Une tendance à dépenser plus que vous gagnez ? Il y a alors de grandes chances que votre banque vous ferme la porte du débit différé.

(1) Selon le comparateur de tarifs bancaires de MoneyVox. Situation tarifaire au 27 août 2020, sous réserve de modifications ultérieures.