L’Etat et la FDJ espèrent un succès populaire pour la vente d’actions de la Française des Jeux lors des deux semaines à venir. Mais faut-il nécessairement se jeter sur les titres FDJ dès le 7 novembre au matin ?

Premiers arrivés, premiers servis ?

Pas de panique ! Il n’est pas nécessaire de vous précipiter dans une agence bancaire ou d’ouvrir un compte chez un courtier en ligne dès jeudi matin ! La période de réservation des actions FDJ s’étale du 7 au 19 novembre, inclus. L’achat d’actions, effectif, n’interviendra qu’à l’issue de cette période de réservation, en vue d’une première cotation attendue le 21 novembre.

Tous les particuliers réservant des actions FDJ auront la possibilité de maintenir (ou révoquer) leur achat d’ici au 19 novembre. Il n’y aura donc pas de prime au premier souscripteur. Seuls les particuliers souhaitant acheter un très gros nombre d’actions risquent de ne pas obtenir l’ensemble des titres réservés. Schématiquement, vous pourrez obtenir 100% des actions réclamées jusqu’à un certain seuil, 20 actions par exemple, puis uniquement 50% des titres réservés au-delà.

Faut-il acheter tout de suite ou attendre quelques semaines ?

« Il n’est absolument pas certain que l’introduction en bourse de la FDJ soit un succès, ni que les cours de son action s’apprécient dans les mois à venir », modère Nicolas Chéron, responsable de la recherche marchés du courtier Binck. L’introduction en bourse de la FDJ intervient en outre dans une période où « les indices boursiers flirtent avec leurs plus hauts historiques », l'analyste de Binck.fr rappelant qu'ils pourraient redescendre, et entraîner le titre FDJ dans leur sillage : « L’investisseur prudent aura peut-être intérêt à laisser passer l’introduction et les premières semaines de cotations pour voir comment la FDJ était accueillie par les marchés. Il n’est pas inhabituel de voir l’action d’une société évoluer sous son cours d’introduction dans les semaines qui suivent. »

« L’investisseur prudent aura peut-être intérêt à laisser passer l’introduction »

Vincent Boy, analyste marché chez IG France, confirme un « important risque de correction » dû au pic actuel des marchés boursiers, en soulignant aussi l’impact des coûts d’introduction en bourse et du versement compensatoire de 380 millions d’euros à l’Etat d’ici juin 2020, ce qui pourrait minorer les résultats de la FDJ en 2019 et 2020. Les précédentes privatisations, qui datent du début des années 2000, offrent en outre des références contradictoires. L’exemple le plus marquant est évidemment celui de l'action EDF, introduite à 32 euros, vendue à près de 5 millions de Français, montée à 79 euros en 2008, avant de tomber sous les 10 euros aujourd’hui.

Lire aussi : Quel est le bilan des privatisations pour les épargnants français ?

Impossible de prédire l’évolution des cours de la FDJ, même si Vincent Boy, d’IG France, souligne le « caractère solide de l’investissement » pour les particuliers, à la vue « des revenus en hausse régulière » de la FDJ, de son « peu d’endettement » et du caractère « monopolistique » d’une partie de son activité en France.

Reste un argument pour l’achat d’actions en novembre, lors de la période de réservation : la décote de 2% du prix d’introduction pour les particuliers, et l’action gratuite pour dix achetées (à condition de les conserver 18 mois). Une carotte qui disparaîtra suite à l’introduction en bourse.

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Faut-il viser les dividendes ou les plus-values ?

L’exemple des sociétés publiques privatisées dont le cours a dévissé omet un aspect important : la compensation par les dividendes. « J’ai acheté des actions France Télécom et j’ai pris le bouillon de la bulle internet », commente un lecteur assidu de MoneyVox sur le forum, qui a ainsi connu une déception pour ses « premiers pas en bourse » : « Finalement l’opération a été blanche car, heureusement, France Telecom servait de bons dividendes. »

Or, il s’agit justement d’un argument de la FDJ et de l’Etat pour inciter les particuliers à acquérir des titres : la promesse de distribuer 80% des bénéfices de la FDJ sous forme de dividendes sur la période 2020-2025. Une sécurité, en cas d’investissement à long terme.

Ne pas voir la bourse « comme une loterie »

« Certains investisseurs se focaliseront sur la promesse du rendement du dividende », confirme Jocelyn Jovène, rédacteur en chef de Morningstar France, société de recherche financière indépendante. « Ceux qui cherchent à faire une plus-value devraient plutôt essayer d’estimer la valeur industrielle de la société, par exemple, par comparaison avec les multiples d’autres acteurs cotés [les loteries australienne Tabcorp et grecque Opap sont présentées comme les plus comparables à la FDJ, NDLR]. Puis voir si le prix proposé est inférieur à cette valeur et leur offre une marge de sûreté ou décote suffisante. » Comment juger de la valeur de la FDJ ? Pour découvrir de premières analyses précises, de la part de sociétés de courtage ou d’analyse boursière, il faut attendre la publication de la fourchette de prix de l’action, jeudi 7 novembre.

« On voit souvent la bourse comme une loterie alors qu’investir devrait consister à prendre sur le long terme une participation au capital d’une entreprise dont on a préalablement évalué la valeur industrielle », rappelle Jocelyn Jovène. Un pari à long terme, sans précipitation, bien plus qu’une mise hasardeuse.

Mise à jour : une fourchette de prix de 16,50 à 19,90 euros l'action

L'Etat a fixé la fourchette de prix de l'action FDJ entre 16,50 et 19,90 euros. Après application de la décote dédiée aux particuliers, le prix de l'action sera ainsi fixé entre 16,17 et 19,50 euros. Un prix jugé élevé pour l'action FDJ selon les premières analyses financières, publiées le 7 novembre : « L’Etat se montre un peu gourmand », a par exemple réagi Jocelyn Jovène, de Morningstar.

Plus d'infos : Acheter des actions FDJ, mode d'emploi