Des clients en grande difficulté, qui croulent sous les frais d’incidents mais dont on ne détecte pas la fragilité financière : c’est, selon Maxime Pekkip, monnaie courante chez Axa Banque. Le chargé de mission de l’association Crésus demande au régulateur de réagir.

Plus de 1 700 euros de frais de rejet de prélèvements en juillet, puis 1 470 euros en août, auxquels s’ajoutent quelques commissions d’intervention, pour une facture totale de plus de 3 000 euros en deux mois : ce couple dont le découvert approchait fin août des 6 500 euros, croule sous les frais d’incidents. Le résultat d’une situation financière dégradée : malgré des rentrées d’argent confortables (plus de 9 500 euros mensuels), il ne parvient plus, depuis longtemps, à rembourser ses nombreux crédits - plus de 15 000 euros de mensualités cumulés actuellement -, dont certains contractés justement pour combler ses découverts. Un cercle vicieux qui l’a amené à s’adresser à Crésus, une association spécialisée dans l’accompagnement des personnes en grandes difficultés financières.

Des frais désormais plafonnés pour les clients fragiles

C’est justement Maxime Pekkip, chargé de mission au sein de cette association, qui a récemment signalé ce cas sur un réseau social. Son objectif : interpeller Axa Banque, la banque dans laquelle les intéressés possèdent leur compte principal et chez qui ils ont contracté, notamment, un prêt immobilier. Selon lui, leur situation, dégradée depuis plusieurs années, aurait dû amener la banque à détecter leur fragilité financière. Leur cas, de plus, n’est pas isolé : Maxime Pekkip annonce avoir traité récemment 161 autres dossiers de clients d’Axa Banque dont les difficultés financières n’ont pas été décelées.

L’enjeu est d’importance : les clients détectés fragiles - ils étaient 3,4 millions fin 2018 en France - bénéficient désormais d’un plafonnement mensuel des frais d’incidents, à hauteur de 25 euros. Mieux, s’ils acceptent de bénéficier de « l’offre spécifique clients fragiles » (OCF), un forfait de compte sans découvert et sans chéquier, ce plafond descend à 20 euros mensuels, et 200 euros par an. Un forfait, justement, dont le couple en question a demandé à bénéficier, sans qu'Axa Banque donne suite.

De bons élèves, quelques mauvais

En toile de fond, une question : Axa Banque est-elle en tort dans cette affaire ? Pour Maxime Pekkip, cela ne fait aucun doute : « Axa Banque ne fait pas le nécessaire pour mettre en œuvre les engagements de place sur l’inclusion financière ». Depuis 2015 en effet, la détection des difficultés financières des clients n'est pas optionnelle mais obligatoire. Elle s’impose à toutes les banques, sur la base notamment de trois critères objectifs : l’inscription au fichier central des chèques (FCC) de la Banque de France, le dépôt d’un dossier de surendettement jugé recevable ou la répétition des incidents de paiements pendant au moins trois mois consécutifs. Selon ces critères, le couple en question aurait donc dû bénéficier d’un accompagnement. Contacté à plusieurs reprises, Axa Banque n’avait pas encore réagi au moment de publier cet article.

Elle n’est toutefois pas la seule enseigne à négliger cette question. « La plupart des banques ont fait le boulot en investissant pour détecter la fragilité financière. C’est le cas par exemple de la Banque Postale ou de BNP Paribas. Mais certaines se désintéressent du problème. C’est le cas d’Axa Banque, mais aussi de grandes enseignes mutualistes qui se présentent pourtant comme vertueuses », indique Maxime Pekkip, qui en appelle à une réaction de la Fédération bancaire française (FBF) et du régulateur du secteur, l’ACPR. « Le risque, c’est que les bons acteurs soient découragés par l’attitude des établissements qui ne font pas d’effort. »