La reprise de la politique de rachats de dette par la Banque centrale européenne est « une question à discuter », mais pas nécessairement dans l'immédiat, estime mercredi le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau dans un entretien à l'Agefi.

« Les achats d'actifs restent un instrument essentiel de la politique monétaire » de la BCE, qui en détient un stock de près de 2 600 milliards d'euros et « maintiendra ce niveau élevé pour au moins plusieurs années » souligne celui qui est aussi membre du Conseil des gouverneurs de la BCE. « Est-il nécessaire » de « relancer » les achats nets « dans l'immédiat » ? « C'est une question à discuter » dit-il.

Le 25 juillet, la BCE avait déjà mentionné la possibilité de procéder à de « potentiels nouveaux rachats d'actifs nets » si nécessaire, en référence à la spectaculaire arme anti-crise utilisée entre mars 2015 et décembre 2018 pour amasser 2 600 milliards d'euros d'obligations publiques et privées. Néanmoins pour le calendrier de mise en œuvre, François Villeroy de Galhau reste très prudent, soulignant que cette politique connue sous le nom de QE (Quantitative Easing) « vise les taux longs » : « Or, depuis l'arrêt des achats nets en décembre 2018, les taux longs ont fortement baissé en zone euro, y compris en Italie », fait-il valoir.

« La politique monétaire de la BCE ne peut pas tout faire »

Une position intermédiaire de nature à le rapprocher des « faucons » au sein de la BCE, favorables au maintien de la suspension des rachats de dette, sans s'aliéner les « colombes » favorables à une reprise de cette politique. Le haut responsable français prévient qu'au vu de la cause du ralentissement de la croissance en zone euro, « ce serait une erreur » de « tout attendre » de la politique monétaire.

Pour ramener la confiance dans le secteur privé, il faudrait « avant tout une levée des incertitudes politiques, aux Etats-Unis comme au Royaume-Uni », affirme-t-il. « Et le trop faible investissement doit être soutenu par une relance budgétaire là où il y a des marges, et des réformes structurelles là où elles sont nécessaires », ajoute-t-il. « La politique monétaire de la BCE fait son devoir, mais ne peut pas tout faire, et en tous cas pas de miracles », insiste-t-il en référence.

Par ailleurs, interrogé sur la façon dont les banques vont pouvoir résister à un taux de dépôt très bas de 0,4%, il a indiqué que le Conseil des gouverneurs de la BCE étudiait la possibilité « d'exempter du taux négatif une partie des réserves excédentaires » des banques par un « système de paliers », processus connu sous le nom de « tiering ». « Ces mécanismes existent partout ailleurs où les banques centrales ont des taux directeurs négatifs : Suède, Japon, Suisse... » a-t-il expliqué.