La loi relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en déshérence vient d’être promulguée et publiée au Journal officiel. Elle intègre de nouvelles obligations que les banques vont devoir mettre en œuvre, pour la plupart, à compter du 1er janvier 2016, date d’entrée en vigueur de la loi. Objectif : résorber le phénomène des comptes bancaires oubliés par leur titulaire, ou leurs héritiers, chiffré à au moins 1,2 milliard d’euros (1). Tour d’horizon.

Avant de lutter contre un phénomène - en l’occurrence, les comptes bancaires et les contrats d’assurance-vie oubliés - il faut être capable de le définir. C’est ce que fait la nouvelle loi, en proposant dans son article initial une définition du compte bancaire inactif.

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S’assurer que les titulaires sont toujours vivants

Une fois le compte déclaré inactif, les établissements de crédit auront une obligation de moyen : elles devront tout mettre en œuvre pour contacter le titulaire du compte - ou ses ayants droit. En commençant par s’assurer, tous les ans, qu’il est toujours vivant. A l’image de ce qui existe déjà pour l’assurance-vie, elles pourront ainsi consulter le Répertoire national d’identification des personnes physiques (RNIPP), détenu par l’Insee. Ce fichier, constitué à partir des registres d’état-civil, recense, entre autres, les décès des personnes nées en France et dans les collectivités d’outre-mer. Les modalités de cet accès doivent encore être précisées par un décret en conseil d’Etat.

Les banques devront également informer, « par tous moyens à [leur] disposition » le titulaire - ou son représentant légal ou ses ayants droit s’ils sont connus - de l’état d’inactivité de son compte, et lui indiquer les conséquences. Par contre, contrairement aux assureurs, elles n’auront pas l’obligation de rechercher les ayants droit, une fois informées du décès d’un client. Ce point a d’ailleurs été un des rares à entraîner un semblant de controverse entre majorité et opposition au Parlement, le texte faisant par ailleurs l’unanimité.

La loi prévoit d’obliger les banques à limiter le montant des frais de tenue de compte inactif - voire les frais de tenue de compte standard - selon des modalités à définir par décret.

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Enfin, les établissements devront, dans leur rapport annuel, indiquer le nombre de comptes inactifs qu’elles détiennent, le montant total des dépôts inscrits sur ces comptes, ainsi que le nombre de comptes et le montant des avoirs transmis à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC).

Transférer les comptes inactifs et non réclamés à la CDC

La loi du 13 juin introduit en effet une autre obligation de taille : celle de transférer les dépôts des comptes bancaires inactifs à la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Actuellement, les banques ont déjà cette possibilité - mais pas d’obligation. De fait, elles l’utilisent peu. Selon la CDC, 29 millions d’euros, seulement, ont été transférés dans ce cadre entre 2006 et 2012.

Ce transfert obligatoire de la gestion des comptes inactifs à la CDC se fera au bout de dix ans à compter de la dernière manifestation du client, dans le cas où la banque n’a pu trouver de preuve de décès du titulaire, et, si le décès du titulaire est connu, au bout de trois ans après la date de décès.

Dans ce cas, la banque procèdera à la clôture du compte, tout en conservant « les informations et documents relatifs au solde des comptes à la date du dépôt (…) ainsi que les informations et documents permettant d’identifier les titulaires de ces comptes et, le cas échéant, leurs ayants droit » pendant 20 ans supplémentaires, soit jusqu’à la survenue de la prescription trentenaire. Ces informations et documents pourront être transmis à la Caisse des dépôts et consignations « à sa demande ». Si le titulaire, ou un de ces ayants droit, se manifeste ensuite, c’est à la CDC qu’il doit s’adresser pour récupérer les sommes. Outre la gestion de ces comptes, celle-ci aura pour mission « d’organiser la publicité appropriée sur l’identité des titulaires de comptes dont les avoirs ont fait l’objet d’un dépôt ».

Dans le cas de comptes-titres ou de PEA, notamment, c’est la banque qui se chargera de la liquidation des titres, aux conditions du moment. Dans ce cas, elle ne pourra être considérée comme responsable d’une éventuelle moins-value. Enfin, elle devra, dans les six mois précédant le transfert du compte à la CDC, tenter à nouveau d’informer le titulaire (ou ses représentants éventuels), « par recommandé ou tout autre moyen à sa disposition ».

La CDC gèrera les comptes inactifs pendant 20 ans (27 ans si l’inactivité fait suite à un décès connu). Passé ce délai, c'est-à-dire au terme de la prescription trentenaire, les sommes seront acquises par l’Etat.

(1) Estimation issue du rapport « Les avoirs bancaires et les contrats d’assurance-vie en déshérence » publié en juin 2013 par la Cour des comptes, qui estime elle-même qu’elle « repose sur des données partielles et hétérogènes, par conséquent fragiles ».