A compter du 1er octobre prochain, l’accès aux prêts en devises étrangères à l’Union européenne - en francs suisses par exemple - sera réservé aux particuliers percevant la majorité de leurs revenus, ou possédant un patrimoine, dans cette devise. Le décret sur la question, pris en application de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires de juillet 2013, a paru ce matin au Journal officiel.

Cet encadrement fait suite à plusieurs affaires judiciaires impliquant des banques françaises. La plus connue concerne BNP Paribas Personal Finance, qui a commercialisé entre mars 2008 et décembre 2009 un prêt immobilier baptisé Helvet Immo, destiné à financer des investissements locatifs dans le cadre des dispositifs Scellier et Robien. Le prêt était libellé en francs suisses mais remboursable en euros. Le capital à rembourser variait donc en fonction du taux de change entre les deux devises. Las, dans le contexte de la crise de la dette, le cours du franc suisse par rapport à l’euro s’est envolé, et avec lui le coût de ces montages particuliers.

Une partie des souscripteurs du produit a depuis porté l’affaire devant la justice. Au pénal, une information judiciaire est en cours pour « pratique commerciale trompeuse », après une série de dépôt de plaintes avec constitution de partie civile. Au civil, BNP Paribas a été assignée par 400 particuliers qui lui réclament 40 millions d’euros de dommages et intérêts.

Les pouvoirs publics ont, eux aussi, réagi. C’est d’abord l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le régulateur du secteur bancaire français, qui a publié en avril 2012, une recommandation sur le sujet, intégrant des règles de bonne conduite en matière d’information des clients sur ce type de prêts. C’est ensuite le Parlement qui a décidé, dans le cadre de la Loi de séparation et de régulation des activités bancaires de juillet 2013, de limiter l’accès à ces prêts en devises.

Lire sur cBanque : Prêts en devises étrangères : recommandations de l’ACP

Des simulations obligatoires en amont

Le décret d’application (1) paru ce matin détaille les conditions à remplir, à compter du 1er octobre 2014, pour pouvoir emprunter, en tant que particulier, dans une « devise étrangère à l’un des états membres de l’Union européenne » - c’est le cas du franc suisse, du dollar US mais pas de la livre sterling britannique, par exemple - et rembourser en euros. L’emprunteur doit, dans une déclaration sur l’honneur jointe au contrat de prêt, assurer :

  • qu’il perçoit au moins la moitié de ses revenus annuels dans la devise en question ;
  • ou qu’il détient, au moment de signer le prêt, un patrimoine dans cette devise « représentant au moins 20% du montant du crédit ».

Toutefois, ces limitations ne s’appliquent que dans le cas où l’emprunteur supporte le risque de change, c’est-à-dire si le montant des échéances qu’il rembourse, la durée du prêt ou le coût total du crédit sont affectés par la variation du taux de change. Sinon, « lorsque l’emprunteur a souscrit une assurance ou un contrat financier le garantissant contre le risque de change, le risque de change n’est pas considéré comme supporté par l’emprunteur », précise le décret.

Ce dernier intègre également certaines obligations en matière d’information de l’emprunteur, dans l’esprit de la recommandation de l’ACPR déjà citée. Avant l’émission de l’offre de prêt, le prêteur devra informer l’emprunteur des « risques inhérents à ce type de prêt » et lui délivrer, à caractère indicatif, « un document d’information comportant deux simulations décrivant l’impact sur les échéances, la durée du prêt et le coût total du crédit d’une variation défavorable pour l’emprunteur de 10% et 20% du taux de change par rapport à celui constaté le jour de la proposition ».

(1) Décret n° 2014–544 du 26 mai 2014 relatif aux prêts libellés en devises étrangères à l’Union européenne