Dans un communiqué commun, plusieurs associations (1) s’inquiètent du possible rejet d’un amendement au projet de loi de séparation et de régulation bancaire, qui prévoit d’instaurer une nouvelle obligation pour les banques : celle de prévenir leurs clients avant de leur prélever des frais bancaires.

Actuellement, les usagers des banques sont avertis a posteriori, à la réception de leur relevé de compte le plus souvent, de la facturation par leur banque de frais, liés par exemple à un dépassement de découvert. Selon les associations, le secteur bancaire est ainsi le seul opérateur à pouvoir prélever des sommes sur un compte sans en informer son titulaire. Un « incompréhensible régime d’exception », qu’elles dénoncent de longue date.

Que propose, du coup, l’amendement n°216, déposé par des députés de l’opposition, mais également soutenu par certains membres de la majorité ? D’informer « le client (…) gratuitement, par le biais de son relevé de compte mensuel, du montant et de la dénomination des frais bancaires que l’établissement entend prélever sur son compte de dépôt au minimum quinze jours avant leur prélèvement ».

Il s’agirait donc d’une inversion de logique. Actuellement, les banques indiquent, sur chaque relevé de compte mensuel, le montant des frais prélevés au cours de la période précédente. Si le texte était adopté, le relevé indiquerait cette fois le montant des frais à prélever, deux semaines plus tard, au titre de cette même période. Exemple : « Avec l’information préalable, le relevé reçu fin janvier aurait été comme suit : Pour le mois de janvier, nous avons effectué les services Y et Z pour vous. Les frais liés à ces services sont de X€ et seront prélevés le 15 février », expliquent les associations, qui poursuivent : « L’opération est donc simple et sans envoi de nouveau courrier. Les coûts sont limités à la perte des intérêts perçus sur les frais lors du premier mois de mise en place (environ 1,1 millions d’€), et au paramétrage informatique. »

Le gouvernement opposé à la mesure

Problème, qui justifie la parution du communiqué : le gouvernement et la rapporteure de la loi, la députée PS Karine Berger, sont ouvertement opposés à cet amendement. Ainsi, alors que les associations estiment que « [la] mesure préviendra une part des frais de découvert et améliorera l’éducation des clients sur les services bancaires », Pierre Moscovici pense le contraire. « (…) L’effet « signal » que représentent les frais d’incident prélevés au fil du mois, et qui incitent le client à régulariser sa situation, risque de disparaître », a expliqué le ministre de l’Economie au cours des débats parlementaires. « Avec le dispositif proposé, il n’aurait connaissance de sa situation qu’en fin de mois, au risque qu’elle soit encore aggravée. »

Karine Berger, de son côté, estime que le relevé de compte n’est pas le meilleur moyen d’informer les clients. « (…) la plupart des relevés mensuels [ne sont] même pas ouverts par leurs destinataires. L’information est essentielle, mais la meilleure façon de l’apporter aux clients de la banque mérite véritablement d’être explorée. » a expliqué la députée.

Pierre Moscovici a proposé, en échange d'un retrait de l'amendement, que le CCSF (Comité consultatif du secteur financier), l’organe de régulation du secteur bancaire, s’empare de la question. Promesse insuffisante pour les auteurs du texte, qui ont préféré le maintenir. Affaire à suivre donc : c'est ce soir que le projet de loi doit être adopté, en première lecture, par l’Assemblée nationale.

(1) UFC-Que Choisir, CLCV, Crésus, Croix-Rouge Française, Secours Catholique, UNAF.

Mise à jour (20 février 2013) - L'amendement sur l'information préalable a été intégré dans la loi votée hier soir par l'Assemblée nationale. Le texte doit désormais être examiné par le Sénat.