Dernière née des banques en ligne « pure player », BforBank a passé fin 2011 la barre des 80.000 clients. La filiale du Crédit Agricole a-t-elle réussi à s’imposer comme un des spécialistes de l’épargne sur internet ? Réponse avec Pascale Furbeyre, directrice du marketing chez BforBank.

Pascale Furbeyre, BforBank a été lancée en octobre 2009. Comment s’est déroulée la genèse de la marque ?

« Son lancement est intervenu après deux ans d’incubation au sein de la Fédération nationale du Crédit Agricole (FNCA), qui est l’organe où se retrouvent les 39 caisses régionales. 38 d’entre elles sont actionnaires à 85% de BforBank, les 15% restants étant détenus par Crédit Agricole SA (CASA). »

Quelle était la feuille de route définie par le Crédit Agricole ?

« Attirer une clientèle patrimoniale, grâce à des produits d’épargne très performants et des outils d’accompagnement destinés à faciliter leur autonomie. Notre positionnement publicitaire, « Mon banquier, c’est moi » s’est imposé rapidement. Un business plan sur quatre ans a été défini, avec une enveloppe initiale de 100 millions d’euros. Cela nous a permis d’installer la marque, de mettre en place le système informatique… Nous avons également développé un service clients en interne, composé aujourd’hui de 40 conseillers financiers, certains venus du groupe comme les experts Bourse de CPR Online (1). Il était important, pour notre clientèle, de disposer dès le début d’un accompagnement à la hauteur. »

Deux ans et demi après, où en est BforBank ?

« Notre directeur général (André Coisne, NDLR) a récemment annoncé que nous avions passé la barre des 80.000 clients et des 3 milliards d’euros d’encours. Nous tablons désormais sur une progression de 30.000 clients par an. Mais ce qui nous importe, c’est aussi le montant de l’épargne apportée par chaque client. Nous ne souhaitons pas recruter pour recruter, mais continuer à convaincre une clientèle haut de gamme. »

Votre offre et votre site internet ont peu évolué depuis le lancement. N’êtes-vous pas intéressé par la distribution de nouveaux produits, comme les cartes bancaires ?

« Ce n’est pas le mandat qui nous a été confié. Nous nous positionnons comme un spécialiste de l’épargne. La banque au quotidien, c’est un autre business. Par ailleurs, la stabilité de notre offre est un choix. Nous nous sommes lancés dès le début avec une gamme couvrant l’essentiel des besoins d’un client patrimonial et nos produits restent parmi les plus performants. Toutefois, nous savons aussi qu’il est important de se renouveler, dans un contexte de marché tendu et face à une concurrence agressive. Nous avons récemment fait évoluer nos spots publicitaires, ainsi que nos offres de bienvenue sur la bourse et sur le Livret BforBank. »

Quel est le profil-type de votre clientèle ?

« Ce sont en majorité des cadres supérieurs vivant dans de grandes agglomérations. Ils ont généralement autour de quarante ans et de l’argent à placer, notamment pour leurs enfants. Ce sont également des « citoyens digitaux » équipés en ordinateurs, en smartphones et de plus en plus souvent en tablettes. Ce sont enfin des personnes prêtes à se « multibancariser » pour gagner en performance et en autonomie dans leurs placements. »

Cette clientèle vient-elle plutôt pour le livret, l’assurance-vie ou la bourse ?

« Une part non-négligeable de nos clients est venue pour la bourse, notamment les anciens clients de CPR. Mais le produit harpon, c’est évidemment le livret, celui qui est le plus facile à souscrire et qui s’est le plus banalisé sur internet. »

Quel est votre point de vue plus général sur le marché de la banque à distance en France ?

« Il y a en France un paradoxe : le modèle de banque à distance sur internet y existe depuis longtemps, au moins douze ans. Et en même temps, l’usage reste balbutiant, avec un taux d’adoption très limité en dehors d’un cercle de technophiles pour qui la relation à distance et le zéro frais vont de soi. Cela tient, je pense, à un frein très français, voire très latin, qui touche aux questions d’argent en général. Cela signifie toutefois qu’il y a de grandes perspectives de déploiement. Cela passera par l’amélioration des interfaces, en particulier sur le mobile. Il y a encore des innovations à proposer dans ce domaine, notamment dans le passage d’ordres boursiers. C’est un chantier très important, qui demande beaucoup de moyens, mais nous avons des projets dans les cartons pour 2013. »

(1) CPR Online est une filiale du Crédit Agricole, spécialisée dans le courtage en ligne. Elle a fusionné avec BforBank à sa création.