Troisième banque en ligne française, Fortuneo, filiale du Crédit Mutuel-Arkea, tente de marquer sa différence sur ce marché très concurrentiel. Pascal Donnais, son directeur général, nous parle de cette position d’outsider, mais aussi de ses projets de développement et de sa vision du marché à moyen-terme.

Quelles sont les grandes lignes de l’histoire de Fortuneo ?

« La marque existe depuis mars 2000. Notre première activité a été le courtage en ligne. Jusqu’en 2006, l’entreprise a surtout connu une croissance externe, avec le rachat et l’intégration d’autres courtiers. En 2006, Fortuneo a fusionné avec Symphonis, une filiale du Crédit Mutuel-Arkéa qui a été la première à distribuer des assurances-vie en ligne. Depuis 2006, notre croissance est surtout organique. Nous nous sommes diversifiés en intégrant l’épargne en janvier 2009, le compte courant en novembre 2009 puis l’assurance auto en décembre 2010. Par ailleurs, Fortuneo est également présente en Belgique depuis 2007. »

Comment définiriez-vous le concept de Fortuneo ?

« Depuis 2000, notre métier est toujours le même : la vente à distance de produits financiers à destination des particuliers. Notre modèle économique est celui d’une banque sans réseau d’agences, avec des marges réduites au bénéfice de nos clients et une productivité maximum, ce qui nous permet de construire une offre à la fois performante et économique. Le low cost dans les gènes de Fortuneo. »

Contrairement à vos concurrents, vous semblez revendiquer cette étiquette de banque low cost...

« Low cost ne veut pas dire discount. Nous ne dévalorisons pas nos produits et nos services, nous les produisons simplement à bas coût. Cela ne nous empêche pas d’avoir été élu service client de l’année en 2011 et 2012. Par ailleurs, le terme low cost n’a plus de connotation péjorative pour le public, bien au contraire. »

Vous êtes aujourd’hui la troisième banque en ligne pure-player en France, avec 180.000 clients revendiqués en 2010. Comment expliquez-vous votre retard sur ING Direct ou Boursorama Banque ?

« Nous sommes encore perçus comme une jeune société, qui ne communique à destination du grand public que depuis 2009. Et nous n’avons pas le budget publicité d’une banque à réseau ou de certains de nos concurrents. Aujourd’hui, Fortuneo est en effet la troisième marque la plus connue sur le marché de la banque en ligne, mais aussi celle dont la notoriété a le plus progressé ces dernières années. Notre slogan, « Arrêtez de banquer », nous a permis d’émerger et d’être reconnu en tant que banque moins chère. »

Toutes les banques en ligne ont aligné leur tarification à des niveaux très bas. Est-ce encore pour vous un facteur de différenciation ?

« C’est vrai que si l’on s’en tient aux services les plus courants, nous nous tenons tous dans un mouchoir de poche. Par contre, si on est très attentif à la tarification, je pense que nous sommes quand même très attractifs par rapport à nos concurrents. Nous sommes par exemple les seuls à proposer un carte Platinum gratuite. Mais le plus important pour nous, c’est le positionnement de nos tarifs par rapport aux réseaux bancaires physiques. Par ailleurs, si nos nouveaux clients viennent effectivement pour le prix, ils restent ensuite pour d’autres raisons : la facilité d’utilisation, l’ergonomie du site, la qualité du service clients... »

Quelles sont les pistes de développement de l’offre de Fortuneo ? Le crédit ?

« Nous réfléchissons effectivement à la possibilité de développer une offre de crédits immobilier et consommation. Mais nous sommes pragmatiques : cela dépendra de la conjoncture économique et elle n’est aujourd’hui guère favorable. Nous observons aussi la diversification des banques à réseaux dans la téléphonie ou l’assurance. Ce sont des pistes intéressantes. »

Comptez-vous innover, notamment dans le domaine des nouveaux moyens de paiement ?

« Nous, comme l’ensemble des acteurs du marché, rivalisons déjà de créativité. On peut citer le chèque en ligne ou les applications pour les smartphones. Nous avons aussi été les premiers à proposer à nos clients de personnaliser leurs cartes bancaires. Et d’autres nouveautés arrivent. En ce qui concerne les nouveaux moyens de paiement, comme les cartes sans contact, nous n’avons pas de développement prévu. Nous privilégions une innovation maîtrisée, mature, qui correspond à de réels besoins. Ce n’est pas le ressort d’une banque en ligne de proposer des innovations fondamentales, qui nécessitent de lourds investissements avec une forte prise de risque. »

Comment anticipez-vous l’évolution à moyen-terme du marché de la banque en ligne ?

« Les projections annoncent de trois à cinq millions d’usagers en France à l’horizon 2015-2018. Notre objectif est de multiplier par 3 le nombre de nos clients d’ici 2018. Pour l’instant, le marché des banques en ligne est encore embryonnaire, même s’il y a un fort courant de nouveaux clients. Il faudra attendre de nombreuses années avant qu’elles deviennent des banques principales pour leurs clients. Au contraire, les Français vont devenir de plus en plus multibancarisés, en choisissant les meilleurs produits en fonction de leur intérêt, et pas de la marque qui les proposent. Il y aura sans doute un effet générationnel, avec l’arrivée d’une clientèle jeune et rompue à l’utilisation d’internet. Mais nous souhaitons aussi toucher une clientèle plus traditionnelle, qui se trouve aujourd’hui dans les agences et qui met l’accent sur la réassurance, la transparence et la solidité de l’institution. »