Faut-il avoir peur pour la santé et l'avenir des fonds en euros de l'assurance vie ? Le président de l'Afer Gérard Bekerman dédramatise le climat anxiogène actuel, même s'il reconnaît la nécessité de développer des alternatives.

Gérard Bekerman

Gérard Bekerman est président de l'association d'épargnants Afer

© Ledroit-Perrin

Lors des récentes Assises de l’Afer, vous avez réaffirmé votre confiance dans le fonds euros. Il n’est donc pas mort ?

Gérard Bekerman : « Il n’est pas mort, il est malade. Il doit donc être soigné et non pas enterré ! La sécurité du fonds en euros a permis d’assurer une bonne rémunération de l’épargne depuis 40 ans. Il est désormais temps de compléter l’épargne par l’eurocroissance et des unités de compte (UC). Mais cela ne doit pas se faire par la contrainte, uniquement par la pédagogie. Il faut s’adapter aux besoins des épargnants et non leur livrer un discours anxiogène comme cela a été le cas ces dernières semaines… Nous avons toujours confiance dans l’avenir des fonds généraux, à long terme. Il y a actuellement une politisation des taux monétaires, venue des Etats-Unis, qui pèse sur la conjoncture des taux et donc sur les rendements. Mais cela ne doit pas nous empêcher de voir à long terme : le modèle du fonds en euros a encore de l’avenir. »

Confirmez-vous en revanche que la baisse des rendements va se poursuivre ?

G.B. : « Concernant les rendements, si vous diversifiez bien vos avoirs, entre fonds en euros et unités de compte, ne serait-ce qu’avec une quotité d’UC répondant à votre profil, vous pouvez toujours obtenir une rémunération attractive. »

Certains assureurs mettent des barrières à l’entrée du fonds en euros, y compris Aviva. L’accès au fonds cantonné de l’Afer nécessite-t-il un versement en UC, au-delà de 100 000 euros ?

« Cette contrainte ne concerne pas l’Afer »

G.B. : « Non ! Cette contrainte ne concerne pas l’Afer. Les règles du contrat Afer nécessitent l’aval de l’assemblée générale des adhérents. Donc j’insiste sur le fait qu’il n’existe aucune nouvelle contrainte d’accès au fonds en euros pour les adhérents Afer. Après, en ce qui concerne de nouvelles souscriptions, de la part de particuliers qui ne sont pas encore adhérents, là, les versements initiaux trop importants sur le fonds en euros peuvent être limités. Une autre précision : les frais d’entrée du contrat Afer sont de 0,50% sur le fonds en euros, et non pas 2% sur le contrat Afer contrairement à ce que l’on a pu lire dans certains médias. »

Concernant les alternatives au fonds en euros, les textes réglementaires relatifs au « nouvel eurocroissance » sont attendus d’ici la fin novembre. Suffisant pour relancer les fonds eurocroissance ?

G.B. : « Une ordonnance est effectivement attendue prochainement. Je ne peux donc pas encore entrer dans les détails de cette nouvelle version de l’eurocroissance mais la poche de diversification devrait être améliorée afin de permettre de meilleures performances sur la durée, alors que la conjoncture de taux bas pénalise actuellement les fonds eurocroissance. Par ailleurs, les assureurs jusqu’à présent n’ont pas vraiment joué le jeu : ils ont un peu boudé le produit. Nos adhérents,eux, ont souhaité accéder à ce produit, et ils ont eu de meilleures performances que s’ils avaient misé sur le fonds en euros. »

Allez-vous immédiatement transformer le fonds eurocroissance de l’Afer ?

« Nous allons jouer notre rôle d’étendard du fonds eurocroissance ! »

G.B. : « Nous allons jouer notre rôle d’étendard de l’eurocroissance ! Nous avons collecté environ 260 millions d’euros sur l’eurocroissance, soit près de 20% de l’encours global de l’eurocroissance. L’Afer jouera donc pleinement la carte de l’eurocroissance, dès que l’ordonnance sera publiée. »

Autre mesure de la loi Pacte, le nouveau Plan d’épargne retraite permettra-t-il selon vous de développer durablement l’épargne retraite en France ?

G.B. : « Il faut l’espérer. Nous préparons un PER Afer. Mais l’exécutif aura satisfaction avec le PER uniquement si le pouvoir législatif cesse les allers-retours sur la fiscalité de l’assurance vie. Il n’est jamais bon de changer les règles du jeu en cours de route, et cela vaut pour l’ensemble des produits. »

Pourquoi l’Afer va-t-elle lancer un PER alors que vous n’aviez pas de Perp ?

G.B. : « Le Perp et le Madelin sont des produits tunnel, qui ne permettent pas une sortie pleine et entière en capital à la retraite. Ce défaut a été gommé avec le PER. Après, il appartiendra aux épargnants d’arbitrer selon leurs besoins entre PER, Perp et Madelin, s’ils disposent de plusieurs produits. »

Vous évoquiez la fiscalité de l’assurance vie… L’exonération totale des contrats souscrits avant 1983 a été supprimée par l’Assemblée nationale. Le regrettez-vous ?

« On a politisé l’assurance vie, et ce n’est jamais bon »

G.B. : « Oui, c’est un mauvais signal ! Cet amendement a été initié par les députés Modem, et je ne comprends pas pourquoi ils ont proposé cette mesure, ni pourquoi la majorité les a suivis. Cette mesure ne rapportera pas grand chose à l’Etat. Combien existe-t-il de contrats souscrits avant 1983 ? Et font-ils encore l’objet de versements, alors que leurs détenteurs ont tous un âge avancé… Cette mesure n’aura aucune efficacité budgétaire, elle crée des vagues dans une eau tranquille. On a politisé l’assurance vie, et ce n’est jamais bon : il faut de la stabilité fiscale pour rassurer les épargnants. »

A la suite des Assises, l’Afer a en revanche souligné l’engagement du gouvernement de ne pas toucher aux règles applicables aux héritages…

G.B. : « Le président de la République s’est engagé à ne pas revenir sur la fiscalité des successions. J’ai confiance dans la capacité du président Macron à faire respecter cet engagement. Ceci étant dit, il pourrait être envisagé d’améliorer certains aspects du système actuel. Pourquoi favoriser les enfants plutôt que les petits-enfants ? Pourquoi ne pas réfléchir à une fiscalité plus incitative vers les petits-enfants ? C’est un vrai sujet de société. Nous ferons prochainement des propositions sur la transmission patrimoniale. »

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