Un contrat d’assurance vie n’est pas vraiment un produit d’épargne comme un autre. Ce qui crée quelques complications au moment où un couple se sépare.

Pour savoir ce qu’il va advenir de l’assurance vie dans le cadre d’un divorce, il faut se poser deux questions… Avez-vous signé un contrat de mariage ? Et avec quel argent a-t-elle été alimentée ? Selon les réponses à ces deux questions, le contrat d’assurance vie peut en effet rester la propriété unique du membre du couple qui l’a souscrit, ou a contrario devoir être partagé à parts égales.

A qui appartient l’argent de l’assurance vie ?

Ce n’est pas parce que vous avez souscrit un contrat en votre nom que cette épargne vous appartient entièrement. A l’image de l’ensemble de vos avoirs bancaires, c’est en premier lieu la conclusion d’un contrat de mariage, ou non, qui fixe le cadre du partage des biens.

Si vous avez conclu un contrat de mariage et opté pour le régime de la séparation des biens, le régime le plus courant en cas de contrat marital, la donne est assez simple : chaque produit nominatif appartient à son souscripteur, assurance vie y compris. Dans ce cas, l’épargne de l’assurance vie vous appartient entièrement. La séparation des biens vaut aussi pour les partenaires de Pacs – pactes conclus depuis janvier 2007 -, sauf mention contraire dans le pacte.

Mais la signature d’un contrat de mariage reste le fait d’une minorité : un peu moins de 20% des mariages selon l’Insee. En l’absence de contrat de mariage, le régime par défaut, ou « régime légal », est celui de la communauté réduite aux acquêts : en bref, ce que vous avez épargné avant le mariage vous appartient, ce que vous avez épargné ensuite appartient au couple. Seule exception : les sommes liées à des biens personnels, issus d’un héritage par exemple, ne sont pas intégrés à la communauté matrimoniale.

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La donne se complique donc en cas de divorce sans contrat matrimonial. Selon la jurisprudence, la valeur de l’assurance vie doit être incluse dans l’actif de la communauté. Sauf si l’argent déposée sur cette assurance vie appartient sans ambiguïté à l’un des membres du couple : par exemple s’il provient uniquement de versements effectués avant le mariage, s’il s’agit du produit de la vente d’un bien immobilier acquis avant le mariage, ou d'une somme perçue en héritage. L’argent épargné grâce aux salaires perçus pendant la durée du mariage appartient lui à la communauté matrimoniale, et doit donc être répartie à parts égales lors du divorce.

Le partage des biens « est plutôt la problématique du notaire »

La répartition de cette assurance vie devient encore plus complexe si l’épargne provient d’une part de fonds propres et d’autre part de fonds communs, raison pour laquelle les conseillers patrimoniaux recommandent généralement d’ouvrir un nouveau contrat après s’être marié, afin de séparer les actifs. Plus généralement, en l’absence de contrat de mariage et en présence de biens tels qu’une assurance vie, un bilan patrimonial devra probablement être réalisé avec le notaire ou les avocats des ex-mariés. « C’est un vrai sujet patrimonial », confirme Valérie Bentz, responsable des études patrimoniales du groupe de conseil patrimonial UFF, qui ajoute que la « problématique » du partage – ou non – des biens « est plutôt celle du notaire ».

Communauté universelle ou adhésion commune : partage obligé !

Le régime de la communauté universelle, qui revient à partager l’ensemble des biens, sans exception, est aujourd’hui plus rare. Dans ce cadre, l’assurance vie est nécessairement un bien de la communauté, à partager équitablement en cas de divorce.

De la même manière, la co-souscription de l’assurance vie, au nom des deux membres du couple, est aujourd’hui loin d’être la plus courante. Un contrat en co-adhésion doit théoriquement être alimenté par des fonds communs. En cas de divorce, l’épargne devra donc être intégrée aux actifs de la communauté, et le contrat devra être clôturé.

Faut-il modifier la clause bénéficiaire ?

La problématique du divorce ne se limite toutefois pas uniquement à savoir à qui appartient l’argent du contrat. Dès la séparation, et donc avant le divorce ou la rupture de Pacs, se pose la question de la clause bénéficiaire de l’assurance vie. Pour rappel, il s’agit de la partie du contrat où vous avez désigné à qui l’argent doit être reversé en cas de décès.

Or, le plus souvent, les épargnants optent pour la clause standard : « Mon conjoint ou partenaire de Pacs, à défaut mes enfants, nés ou à naître, vivants ou représentés, par parts égales entre eux, à défaut mes héritiers. » Avec une clause ainsi rédigée, en cas de décès avant que le divorce ne soit prononcé, c’est au conjoint que l’argent sera versé. Et ce malgré la rupture conjugale !

« Vous pouvez modifier cette clause standard au moment de la séparation »

« Pour des contrats individuels, avec une séparation de biens, chaque conjoint ou partenaire de Pacs peut modifier son contrat à sa guise », souligne Valérie Bentz, de l’UFF, en rappelant ainsi que cette clause peut être modifiée à volonté tout au long de la vie du contrat : « Vous pouvez modifier cette clause standard au moment de la séparation, en attendant que le divorce soit prononcé, en enlevant la mention de conjoint. » Toujours dans le cas d’une clause standard, il est possible de l’adapter en « mon conjoint non séparé de corps et non divorcé » ou « mon conjoint non engagé dans une procédure de divorce ou de séparation de corps », pour reprendre les formulations suggérées par l’association d’épargnants Afer. Passé le divorce, la formulation de la clause standard ne pose plus de problème : en l’absence de conjoint, le capital est versé directement aux héritiers, généralement les enfants.

En cas de clause personnalisée, si le nom du conjoint ou de la conjointe est clairement désigné dans le contrat, alors « il est indispensable de revoir sa clause » comme le souligne Valérie Bentz. En dehors du cas aujourd’hui rarissime de l’acceptation préalable de l’assurance vie par le bénéficiaire, le détenteur du contrat peut revoir entièrement la rédaction de cette clause quand il le souhaite. Il ou elle peut donc retirer le nom de son ex conjoint ou conjointe.

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