Mettre de la richesse en réserve aujourd’hui pour mieux rémunérer les fonds en euros demain : tel est le credo actuel des assureurs. Pour cela, ils disposent déjà d’un outil, la PPB, mais travaillent à la création d’un second, la PRF. Explications.

Le 17 octobre dernier, le président de la Fédération française de l’assurance (FFA) Bernard Spitz annonce dans Les Echos que la profession réfléchit à la création d’une nouvelle provision « pour rendements futurs » de façon à « lisser dans la durée les rendements servis aux assurés ». Etonnant. Cette description ressemble grandement à l’actuelle provision pour participation aux bénéfices (PPB), qui permet aux assureurs de conserver une partie de la performance annuelle des fonds en euros en réserve. Avec une obligation : reverser cette richesse mise en réserve aux assurés dans les 8 ans.

Lire à ce propos : Comment les assureurs stockent des bénéfices en réserve avec la PPB

Mais la FFA prévoit bel et bien la création d’une « provision pour rendements futurs » (PRF) en plus de la PPB existant déjà. Le magazine spécialisé L’Argus de l’assurance a révélé qu’une note technique a déjà été transmise par la FFA au Trésor, début novembre.

Quelques jours après cette révélation, Bernard Spitz signe une tribune sur l’édition française de Forbes. Il s’y interroge sur les taux de rémunération « trop » attractifs de l’assurance-vie, et confirme qu’une « réponse de place est en train d’être apportée avec la mise en place d’une provision pour rendements futurs destinée à lisser dans la durée les rendements servis aux assurés, afin de pouvoir faire face à toutes les situations de marché ». Cette PRF vise notamment à prévenir une « hausse rapide des taux » : « Ce risque doit être pris en compte aujourd’hui, notamment dans le contexte post élection de Donald Trump. »

Un risque de « spoliation » des assurés ?

Dans cette tribune, Bernard Spitz ne livre aucun détail. Dans son article du 22 novembre, L’Argus dévoile certains contours de la PRF, telle qu’elle est portée par la fédération des assureurs. Plafonnée, cette provision serait « comptabilisée avant la constitution de la participation aux bénéfices minimale des assurées » : autrement dit, elle serait constituée avant le calcul du rendement annuel. Et « cette provision ne serait aucunement acquise aux assurés (ni légalement ni contractuellement) », à la différence de l’actuelle PPB. Ce dernier point est le plus sujet à polémique car « c’est une forme de spoliation de l’épargnant » selon une source anonyme citée par L’Argus.

Cette PRF vise ainsi à laisser « plus de souplesse » aux assureurs comme l’explique le PDG d’Axa France, Jacques de Peretti dans le même article, pour que les rendements subissent moins l’inertie du fonctionnement actuel de l’assurance-vie en euros. Autrement dit : baisser plus vite les taux servis aux épargnants en période de taux bas, en dotant la PRF, et les augmenter plus vite en cas de remontée, en puisant dans la réserve.

Une application à l’horizon 2018 ?

Ce projet de PRF n’aboutira toutefois pas à court terme. Cette provision nécessite, notamment, un décret en Conseil d’Etat et un arrêté modifiant le code des assurances selon L’Argus. Et parce que les négociations restent délicates au sein de la profession comme le souligne une autre publication professionnelle, La Lettre de l’assurance, qui affirme que « malgré l’unanimité de façade, un groupe s’est montré particulièrement contre cette mesure ». La question de la fiscalité pesant sur cette PRF ferait aussi débat. Résultat : des annonces pourraient intervenir « au mieux » début 2017 selon L’Argus, pour une entrée en vigueur à l’horizon 2018.