Gérant notamment les contrats d’ING Direct et Boursorama, Generali se présente en leader de l’assurance-vie en ligne. Une position que seul l’assureur de Fortuneo Vie, Suravenir, tente de lui contester. Mais ce marché reste encore anecdotique à l’échelle de l’assurance-vie en France selon Sonia Fendler, membre du comité exécutif de Generali France en charge de la clientèle patrimoniale. Comment le développer ? En se basant sur quels atouts ? Réponses.

Sur Eurossima et Netissima, la baisse de rémunération était assez prononcée en 2014, moins en 2015. Pourquoi avez-vous diminué vos rendements plus tôt que vos concurrents ?

Sonia Fendler : « L’an passé, nous sommes passés sous le seuil psychologique des 3% [2,97% sur Eurossima en 2014, NDLR]. Jusqu’à présent, sur internet, les épargnants achetaient un taux. Or il ne faut pas que la rémunération du fonds euros soit le seul critère de choix. Cela ne nous a pas empêché de réaliser une belle collecte en 2015 [1,5 milliard d’euros de collecte brute sur internet, soit +17% par rapport à 2014, NDLR]. Ensuite, concernant la rémunération de l’année 2015, le rendement des actifs a subi une baisse moins importante qu’en 2014. Mais nous avons tout de même diminué le rendement d’Eurossima de 22 points de base, ce qui est conforme à la tendance de l’année. Et nous avons alimenté la provision pour participation aux excédents [réserve permettant de lisser les rendements dans le temps, NDLR]. »

Les fonds euros « immobiliers » Netissima et Euro Exclusif sont gérés séparément mais leurs allocations sont relativement proches. Pourquoi l’écart de rendement s’est resserré ?

S.F. : « Cela dépend de la collecte nette : nous avons un peu plus collecté sur Euro Exclusif en 2015 [fonds en euros présent uniquement sur Boursorama Vie, NDLR], d’où une performance qui a un peu plus baissé car cette collecte nette doit être investie sur des actifs actuellement moins rémunérateurs. La gestion de la collecte nette constitue un enjeu d’importance : il ne faut pas diluer trop vite la performance des fonds en euros. »

Votre principal challenger, Suravenir, gère tous ses principaux fonds euros dans son actif général, mais en servant des rémunérations plus ou moins élevées selon les marchés (internet, réseau bancaire, etc.). Cette stratégie ne vous paraît-elle pas payante ?

S.F. : « Effectivement, d’un point de vue financier, cela peut être intéressant : la collecte nette réalisée sur internet va diluer la performance des contrats traditionnels, sans trop entamer la performance des contrats web. Nous avons fait un choix différent avec des fonds en euros internet gérés séparément. Car nous considérons que le fonds en euros doit aussi s’adapter au comportement des clients. »

En voyant la rémunération des principaux fonds euros web sous les 3% en 2015, peut-on dire que ce marché rentre dans le rang ?

S.F. : « Nous avons encore des fonds nettement plus rémunérateurs que la moyenne du marché ! Celle-ci devrait se situer à 2,30% pour 2015. »

Si vous ne pouvez plus « vendre un taux » sur internet, comment allez-vous attirer les épargnants ?

S.F. : « Le web ne représente toujours qu’environ 3% du marché de l’assurance-vie en France ! L’enjeu prioritaire reste d’aller chercher les clients des banques de détail, qui ne disposent pas d’une assurance-vie avec autant d’atouts. Outre le rendement des fonds en euros et les moindres frais de gestion, les contrats internet offrent surtout beaucoup de souplesse en termes de gestion : transactions en ligne, large choix d’unités de compte, plusieurs options de gestion, etc. Il faut faire preuve de pédagogie : de nombreux épargnants ne savent même pas qu’ils peuvent souscrire plusieurs contrats d’assurance-vie ! »

Comment faire œuvre de pédagogie auprès des clients bancaires ?

S.F. : « C’est aux distributeurs de mener ce travail. Au rythme de développement actuel, dans 5 ans, nous atteindrons peut-être les 5% de parts de marché. Nous ne pourrons pas faire mieux sans un travail de pédagogie. »

A terme, jusqu’où peut aller le développement de l’assurance-vie en ligne ?

S.F. : « Il faut du temps. 10% du marché en 2025, ce sera déjà très bien. »

En quoi les clients web sont-ils différents des autres ?

S.F. : « Ils sont plus jeunes que les clients des réseaux physiques : 45 ans en moyenne contre 50 ans. Ils détiennent bien souvent plusieurs contrats d’assurance-vie en ligne, chez plusieurs distributeurs. Ils ont ainsi tendance à ouvrir un contrat avec 1.000 euros puis à verser des primes bien plus conséquentes après avoir testé le produit. Le niveau d’exigence attendue par l’internaute est bien supérieur à celle des autres clients. Internet est un canal de distribution délicat d’un point de vue technologique : la facilité d’arbitrage sur internet permet aux épargnants de réagir rapidement aux évolutions des marchés. Or, en cas de soubresaut sur les marchés financiers, il faut que toutes les procédures soient automatisées pour gérer le flux d’arbitrages. »

Ils n’investissent toutefois par encore suffisamment en unités de compte à votre goût…

S.F. : « Sur nos contrats internet, les supports en unités de compte représentent 33% des encours. Or notre rêve, à terme, c’est d’atteindre 50%. »

Vous gérez les plus gros contrats d’assurance-vie en ligne. Qui sont les principaux distributeurs ?

S.F. : « Boursorama et ING Direct : c’est d’ailleurs très serré entre les deux. Au niveau des courtiers, les premiers entrants sur internet se distinguent : Altaprofits, Mes-placements et Linxea. Certains courtiers lancés plus récemment n’ont pas réussi à percer : un lancement sur l’assurance-vie en ligne ne se décrète pas du jour au lendemain, cela nécessite un budget marketing colossal. »

Pourquoi avoir choisi de commercialiser votre propre contrat, Generali Epargne ?

S.F. : « Etre leader sur internet et ne pas profiter de l’outil que l’on a développé, ce serait dommage. Mais nous ne jouons pas dans la même cour que Boursorama, Fortuneo ou ING Direct. »

A quand un fonds euro-croissance sur vos contrats internet ?

S.F. : « Chez Generali, nous croyons beaucoup en l’euro-croissance. Nous avons d’ailleurs lancé un fonds croissance il y a un peu plus d’un an auprès de nos partenaires CGPI [Generali revendique une performance globale de 5,5% du fonds G Croissance 2014 pour sa première année d’existence, NDLR]. C’est un produit innovant, mais aussi complexe qui nécessite de la pédagogie et donc un peu de temps. Nous l’intégrerons sûrement dans nos contrats internet, reste à savoir quand : probablement en 2017. »