Crédit Agricole, Caisse d’Epargne, Banque postale, Société Générale, etc. Les chiffres du premier trimestre 2015 ont été dévoilés pour quasiment toutes les grandes banques françaises, avec toujours un même constat au rayon assurance-vie : les épargnants délaissent le traditionnel fonds en euros, rémunéré à 2,50% en 2014, pour se risquer aux unités de compte, potentiellement plus rémunératrices. Tour d’horizon.

« Les parts de marché de CNP sur l'assurance-vie se replient un tout petit peu sur l'euro au trimestre, mais la part de marché sur l'UC s'améliore. » Ces propos d’Antoine Lissowski, directeur général adjoint de CNP assurances, qui gère les contrats de la Banque Postale et de la Caisse d’Epargne, illustrent bien la tendance forte de ce début d’année : si l’assurance-vie continue de drainer toujours plus d’argent, c’est avant tout grâce à la croissance des unités de compte (UC), et non grâce aux fonds en euros, qui eux présentent une garantie en capital.

A l’occasion de l’annonce des résultats trimestriels, Antoine Lissowski n’a d’ailleurs pas caché qu’il s’agit de la concrétisation d’un objectif : « La réorientation de notre mix de vente de l'épargne vers les unités de compte est en train d'être réalisée », s’est-il félicité. Le plus gros gestionnaire d’assurance-vie en France a donc réalisé une collecte nette de 165 millions d'euros au 1er trimestre mais, dans le détail, cela se traduit par une décollecte de 480 millions d'euros sur les supports en euros contre une collecte nette de 645 millions d'euros sur les unités de compte. Dans ses statistiques, CNP évoque un « chiffre d’affaires » en hausse de 52% à la Banque postale sur ces supports, par rapport au 1er trimestre 2014, pour une augmentation de 88% de cette même activité à la Caisse d’Epargne !

Des versements de plus en plus orientés vers le risque

La Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA) chiffrait à l’automne dernier cette montée en puissance : 12% de la collecte en 2012, 14% en 2013, puis 17% en 2014. L’accélération est évidente en 2015 : 20% de la collecte en UC sur les trois premiers mois de l’année selon les statistiques FFSA, et près de 25% sur le seul mois de mars.

La part des unités de compte grimpe à 22% de la collecte au Crédit Agricole selon les résultats trimestriels de la structure cotée du groupe (CASA). A la Société Générale, les chiffres avancés sont encore plus éloquents : les UC représentent 25% de la collecte brute (uniquement les versements) de l’assurance-vie au 1er trimestre 2015, contre 12% lors des premiers mois de 2014. Lorsque l’on s’intéresse à la collecte nette (les versements moins les retraits), les UC pèsent cette fois 79% sur le trimestre, ce qui laisse entendre que les retraits sont plus importants sur les fonds en euros que sur les supports risqués dans la banque rouge et noire.

Environ 20% du montant global de l’assurance-vie

Conséquence : le poids des UC dans le montant global de l’assurance-vie est grandissant. La FFSA évoquait 17% fin 2013. Au Crédit Agricole, leur part dans le « stock » de l’assurance-vie est désormais de 19,7% contre 18,5% un an plus tôt. A la Société Générale, cette proportion est passée de 19,5% au 1er trimestre 2013 à 20% en 2014 et à 21,8% en 2015.

Dans les autres banques ? Les différentes entités du Crédit Mutuel ne communiquent traditionnellement pas de résultats trimestriels. Chez BNP Paribas, la filiale d’assurance Cardif n’a pas livré de résultats à la fin mars : le groupe évoque uniquement une hausse de 5,1% de la collecte de l’assurance-vie par rapport au 1er trimestre 2014, sans distinguer UC et fonds euros. Même constat pour la Banque Populaire : une augmentation de 7,8% pour l'ensemble de l'assurance-vie. Le « boom » des unités de compte se confirme toutefois chez les assureurs traditionnels : Swiss Life cite « une importante part des affaires nouvelles en unités de compte, de plus de 60% » ; et Axa recense, sur l’ensemble de l’Europe continentale, 51% de sa collecte en UC sur les premiers mois de 2015, contre 42% en 2014

Des incitations payantes

Axa a intégré le « développement des unités de compte » dans son plan stratégique. Banques et assureurs orientent ainsi clairement leurs clients vers ces supports potentiellement plus rentables mais n’assurant pas de conserver son capital. L’incitation passe par l’accès à des fonds euros à la rémunération plus attractive à condition de miser une partie de son versement sur les UC ; des « bonus de rendement » sur le fonds en euros ; et des primes de bienvenue pour l'ouverture de certains contrats, soumises aux mêmes conditions.

Lire à ce propos : Comment la baisse des taux de l’assurance-vie est masquée par les bonus de rendement

Autre témoignage de l’intérêt des Français pour les alternatives au fonds en euros dans l’assurance-vie : « la collecte a atteint en avril 100 millions d’euros sur les contrats euro-croissance », souligne le Crédit Agricole dans ses résultats trimestriels. Les fonds euro-croissance n’offrent une garantie en capital qu’au terme de 8 ans minimum en l’échange d’un rendement potentiellement supérieur au fonds euros. Le groupe de la banque verte l’a mis à disposition de ses clients dans son réseau et dans celui de LCL en octobre dernier, dans un premier temps sur ses seuls contrats haut de gamme. 100 millions, cela reste toutefois peu à côté des plus de 250 milliards d’euros gérés par Crédit Agricole assurances sur l’ensemble des contrats épargne-retraite, dont environ 50 milliards d’euros placés sur des supports en unités de compte.