L’investissement socialement responsable, ou ISR, a « fortement progressé » en 2014 selon une étude de Novethic : +31%. Mais, comme chaque année, il reste un constat d’échec pour ses promoteurs : les particuliers sont loin d’être moteurs pour ce type de placement. Ou plutôt seulement de façon indirecte. Explications.

Le poids des épargnants particuliers sur le marché de l’investissement responsable est de plus en plus faible. Novethic ne s’en cache pas, évoquant en 2014 « moins d’un euro sur cinq en gestion ISR contre près du tiers il y a trois ans ». Très exactement, la part des particuliers sur le marché de l’ISR est passé de 30% en 2011 à 18% en 2014. Les 82% restants ? Des « investisseurs institutionnels ».

Les assureurs, deux tiers du marché

Mais qui sont ces « institutionnels » ? En grande partie des assureurs qui « portent la croissance de l’investissement responsable » en France selon Novethic, filiale de la Caisse des dépôts qui livre chaque année des statistiques sur l’ISR. Lorsque l’on prend en compte à la fois l’ISR et « l’intégration ESG », des produits financiers respectant des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) moins contraignants que l’ISR, « les assureurs représentent deux tiers de l’investissement responsable français ».

Novethic souligne dans son étude annuelle que les compagnies d’assurance choisissent l’ISR « pour des volumes réduits » et optent pour l’intégration ESG « sur des volumes plus importants, surtout sur des nouveaux investissements ». Résultat : 18% des placements des assureurs prennent aujourd’hui en compte des critères ESG selon la filiale de la Caisse des dépôts.

Assurance-vie : plus de 78 milliards d’euros ISR

Du point de vue des particuliers, l'investissement responsable ne concerne donc pas que l’épargne salariale, comme le voudrait une idée largement répandue, mais aussi l’assurance-vie, placement principal des Français en termes de montants déposés. « Dans le cas de la gestion ISR, 72% des encours déclarés par les assureurs, soit 78,4 milliards d’euros, viennent de fonds en euros », affirme Novethic dans son étude, réalisée en partenariat avec le Forum pour l’investissement responsable (FIR).

Sans le savoir, les détenteurs d’assurance-vie misent ainsi indirectement sur l’ISR et plus généralement sur des produits financiers respectant certains critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). « Les pratiques mises en place sont rarement expliquées aux clients », regrette ainsi Novethic.

Un concept trop flou pour le grand public

Dans l'épargne salariale aussi, les Français misent sur les produits ISR et ESG sans le vouloir réellement selon Olivier de Fontenay, associé de la société de gestion et cabinet Eres. « La gamme de fonds disponible dans les [plans d’épargne salariale] est choisie par l’entreprise et les représentants des salariés qui se comportent plutôt comme des institutionnels », explique Olivier de Fontenay sur le blog de son entreprise, « Partage du profit ». « Si tous les [fonds] du plan sont ISR, le salarié n’aura donc pas choisi l’ISR », la démarche étant à mettre à l'actif de l'entreprise.

Le manque d’attrait pour l’ISR de la part des particuliers serait avant tout dû à leur « méconnaissance » du concept, ce que confirme les récents sondages sur le sujet : une large majorité de Français ne connaissent pas l’investissement socialement responsable. Une méconnaissance notamment due au flou entourant le concept : « Chaque gérant financier donne sa propre définition de l’ISR », appuie Olivier de Fontenay. Les acteurs du secteur semblent être conscients de ces freins au développement et travaillent à l’élaboration d’un label ISR unique et reconnu par les pouvoirs publics. Aux dernières nouvelles, une « proposition définitive » serait attendue pour la fin 2015.