« Avez-vous pensé à prendre date sur l’assurance-vie ? » Cette question, les conseillers bancaires la posent très régulièrement aux jeunes actifs. Mais les préoccupations de ces derniers sont plus liées à l'achat du premier bien immobilier. Est-il donc opportun de souscrire une assurance-vie alors qu’il faudra bientôt mobiliser toute son épargne pour se constituer un apport ? Eléments de réponse.

Le produit idoine en vue d’un futur achat immobilier ? Le Plan épargne logement (PEL) ont toutes les chances de répondre bon nombre de futurs acquéreurs. Et pour cause : le PEL a été créé en ce sens. Le régime de l’épargne-logement a été imaginé au cours des années 1960 pour « permettre l'octroi de prêts » après une phase d'épargne, dans le but de faciliter le « financement d'un logement destiné à servir d'habitation principale » (1). Le PEL permet en outre de profiter d’une prime d’Etat en cas de crédit immobilier.

PEL ou assurance-vie, le match

Est-ce donc le produit idéal lorsqu’on pense acheter au cours des deux ou trois prochaines années ? Pas forcément pour Benjamin Clavel, conseiller en gestion de patrimoine du cabinet CPS (2), qui ne recommande pas le PEL à ses clients : pas assez souple, puisqu’il n’est pas possible de retirer uniquement une partie de son épargne, et peu rémunérateur (0,75%, le taux actuel du CEL) s’il est débloqué lors des deux premières années de détention. Deux points faibles auxquels il ajoute « le taux de prêt du PEL à 4,20% (pour les plans ouverts depuis août 2003, NDLR), pas intéressant dans le contexte actuel de taux immobiliers extrêmement bas ».

Pour de jeunes actifs souhaitant mettre de l’argent de côté en vue d’un achat immobilier, Benjamin Clavel ne jure que par l’assurance-vie. Certes, a contrario du PEL, la vocation originelle de l’assurance-vie n’est pas d’être un support d’épargne en vue d’une acquisition. Mais elle a l’atout de la souplesse, puisqu’un contrat d’assurance-vie permet d’effectuer des retraits partiels, ou « rachats » dans le jargon de l'assurance-vie.

L’assurance-vie, couteau suisse de l’épargne

« Si le prix du bien immobilier est moins important que l’enveloppe budgétaire (le crédit immobilier + l’apport, NDLR) dont dispose les acheteurs, ils peuvent n’utiliser qu’une partie de l’épargne accumulée sur leur contrat d’assurance-vie et laisser le reste », explique Benjamin Clavel. « C’est d’autant plus vrai dans le contexte actuel de taux bas : le crédit étant peu onéreux, il est préférable de conserver son cash, en le faisant fructifier, et d’emprunter un maximum. »

Deuxième atout : le rendement. Certes, à la différence du Plan d'épargne logement, « il n'y a pas d’engagement sur le taux de rentabilité ». Mais les fonds en euros, avec lesquels le capital est garanti, étaient rémunérés en moyenne à 2,8% hors prélèvements sociaux en 2013. Légèrement mieux que les 2,5% brut du PEL.

Fiscalité : un impact « négligeable »

Reste que pour de jeunes actifs ne s’étant jamais intéressés à des questions de patrimoine, l’assurance-vie peut rebuter, rien que par la complexité de sa fiscalité. Si, comme le PEL, la rémunération de l’assurance-vie est soumise à prélèvements sociaux, c’est plus compliqué au niveau de l’impôt sur le revenu : soit les bénéfices réalisés via l’assurance-vie sont soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu, soit à un prélèvement forfaitaire libératoire (PFL), dégressif (35% avant les 4 ans du contrat, puis 15% jusqu’au 8 ans). Passées 8 années de détention, la fiscalité est minime grâce à un abattement et à un PFL de 7,5%.

Trop compliqué ? Premier point, selon Benjamin Clavel, il ne faut pas surestimer l’importance de l’aspect fiscal : « Lorsque l’on prévoit de réaliser un premier achat immobilier à moyen terme, sur un horizon de 3 ans par exemple, l’impact de la fiscalité sera négligeable sur l’épargne mobilisable et donc sur le pouvoir d’achat immobilier. »

Second point, toujours selon le conseiller en gestion de patrimoine, malgré l’impôt sur le revenu, le rendement de l’assurance-vie n’est pas forcément inférieur à celui du PEL : « Avec un contrat en euros rémunéré à 3% (soit une rémunération légèrement supérieure à la moyenne, de 2,8% en 2013, NDLR), en appliquant le taux forfaitaire maximum, de 35%, et les prélèvements sociaux, on arrive à un rendement net de 1,49%. Ça reste deux fois plus que le taux du CEL » qui s’applique en cas de déblocage du PEL lors des deux premières années de détention. Pour rester sur son exemple, le PEL va alors être plus avantageux de 2 à 4 ans de détention avec un taux net de 2,11%, en appliquant les prélèvements sociaux. Passés 4 ans de détention ? « Une assurance-vie rémunérée à 3% brut va rapporter 2,09% net avec le PFL, presque le même taux que le Plan épargne logement ! » et jusqu'à 2,54% pour les personnes non imposables.

Reste un bémol concernant l’assurance-vie : de nombreux contrats comprennent des frais de versement. Dans une optique de court terme, il convient donc de privilégier des contrats à frais réduits.

Livret A + assurance-vie, la formule conseillée

Conclusion : en cas d’achat immobilier à court terme, dans les 2 ans, l’assurance-vie en euros est actuellement plus rentable que le PEL. Ensuite, le match a lieu d’être, selon le niveau d’imposition et selon le rendement du contrat, mais l’assurance-vie a l’avantage de la souplesse.

Attention toutefois à ne pas oublier l’objectif initial : se constituer une épargne qui servira d’apport personnel au moment de l’achat. Mieux vaut donc oublier les supports en unités de compte de l’assurance-vie, plus risqués, pour se concentrer sur le ou les fonds en euros disponibles, à capital garanti.

Il est par ailleurs conseillé de conserver deux-trois mois de revenus au minimum sur un Livret A ou un LDD : « Cette épargne de précaution ne doit pas être mobilisée au moment de l’achat », rappelle Benjamin Clavel. Et le conseiller en gestion de patrimoine ajoute qu’il est utile, dans une optique d’achat, de montrer à son banquier « que l’on a été capable de mettre en place une épargne programmée : par exemple 200 euros mis de côté chaque mois ». Et un dernier conseil : « éviter les découverts » ! Le plus important restant de soigner son profil d’emprunteur afin d’obtenir un crédit avantageux.

Et le nantissement ? « Nantir » son contrat d’assurance-vie, c’est-à-dire se servir de son contrat comme d’une garantie dans le cadre d’un crédit, est une option possible pour un crédit immobilier. Cependant, Benjamin Clavel balaie cette alternative dans le cas des primo-accédants : « Les banques peuvent accepter du nantissement sur du prêt in fine, jamais sur de la résidence principale ! »

(1) Loi n° 65-554 du 10 juillet 1965.

(2) Cabinet Conseils Patrimoine Services, éditeur également de www.touslesplacements.com.