La création de l'Impôt sur la fortune immobilière (Ifi) en remplacement de l'ISF a engendré des « effets indésirables » sans montrer d'impact positif à ce stade sur l'économie, estime un rapport du Sénat publié mercredi, qui propose des mesures pour améliorer son efficacité.

Instauré en 2018, l'IFI doit, selon le gouvernement, stimuler l'activité en encourageant les contribuables les plus aisés à investir dans l'économie, alors que la fiscalité du capital en France est une des plus élevées d'Europe. Mis en place en remplacement de l'Impôt sur la fortune (ISF), il devait aussi en corriger certains biais, comme l'exil fiscal ou une certaine inéquité, du fait de mesures permettant aux plus élevées parmi les plus grandes fortunes de réduire le montant de leur impôt.

Mais selon ce rapport piloté par la commission des Finances du Sénat, l'Ifi n'a pas réussi à combler toutes ces lacunes, même s'il « semblerait qu'il ait eu un impact positif sur le nombre de départs » à l'étranger de contribuables, a noté Albéric de Montgolfier, rapporteur général LR de la commission des Finances, lors d'une conférence de presse. Ainsi, « il n'a pas permis de remédier à l'inéquité de l'ISF », en permettant aux plus importants patrimoines financiers de ne pas être assujettis à l'Ifi, a ainsi relevé Vincent Eblé, président (PS) de la commission des Finances.

Des hauts patrimoines réussisent à s'exonérer de l'Ifi

Dix-huit pour cent des plus hauts patrimoines (ceux supérieurs à 10 millions d'euros) sont ainsi exonérés de l'Ifi, alors qu'à l'inverse, 20% des redevables de l'Ifi ont un revenu inférieur à 60.000 euros, détaille le rapport. « On a toujours le syndrome du petit retraité propriétaire sur l'île de Ré », a regretté Vincent Eblé.

Autre défaut : la baisse des dons effectués par les foyers touchés par la réforme, du fait d'une réduction globale de l'impôt payé, et cela malgré l'existence d'une exonération dite « Ifi-dons ».

Pour corriger ces biais, le rapport préconise deux mesures « à court terme », par exemple dans le cadre du projet de Budget 2020 dont l'examen a commencé au Parlement : indexer sur l'inflation le seuil d'entrée dans l'Ifi pour contrer la hausse des prix de l'immobilier et renforcer l'exonération « Ifi-dons ».

Publié une semaine après un rapport sur le même sujet de France Stratégies, organisme dépendant de Matignon, le rapport des sénateurs estime lui aussi qu'il est trop tôt pour évaluer les effets de la réforme fiscale sur l'investissement en faveur de l'économie française.

Dispositif « anti-abus »

Les sénateurs se sont aussi penchés sur la création en 2018 du prélèvement forfaitaire unique (PFU ou « flat tax ») sur les revenus du capital. S'ils soutiennent cette disposition, ils souhaitent des mesures pour mieux diriger l'épargne vers le financement des entreprises. Ils militent aussi pour un dispositif « anti-abus » afin d'éviter le transfert des rémunérations en dividendes (non taxés via l'Ifi et dont l'imposition est limitée par le PFU) plutôt qu'en salaires.