Face à l'attention croissante portée par certains consommateurs à leur impact environnemental, les fournisseurs multiplient les offres d'électricité verte, à des prix parfois très contrastés. Mais toutes ne se valent pas, loin de là, en la matière. Explications.
L'électricité verte est partout ! Rares désormais sont les fournisseurs - y compris l'historique EDF (Electricité de France) - qui ne déclinent pas leur offre en version « écolo ». Ce faisant, ils répondent à une demande croissante des usagers : celle de diminuer l'impact environnemental de leur consommation électrique, en s'approvisionnant à des sources d'énergie renouvelable (EnR). Quitte à payer leur électricité un peu plus cher.
Selon le comparateur officiel énergie-info, mis en place par le médiateur national de l'énergie, le coût annuel des offres d'électricité verte à prix variable, pour un client parisien en option Heures Pleines/Heures Creuses (HP/HC) consommant 8 500 kilowattsheures (KWh), allait au 30 juin 2019 de 1 290 euros (soit 13% de moins que le tarif bleu d'EDF, c'est-à-dire le tarif réglementé fixé par l'Etat) à 1 737 euros (+18%). Avec une offre traditionnelle sur le même profil, la facture annuelle s'étale, selon les fournisseurs de 1 311 euros (-9%) à 1 447 euros, donc au niveau du tarif réglementé.
On le constate : les offres vertes ne sont pas forcément plus chères que les traditionnelles. Leur éventail de prix, en revanche, est beaucoup plus important : 447 euros dans cet exemple. Une différence qui reflète une autre réalité : toutes ces offres, loin de là, ne se valent pas en matière de contribution réelle au développement des EnR, et donc à la transition énergétique. Voici pourquoi.
Un « pot commun » d'électricité
Un rappel pour commencer : souscrire une offre d'électricité présentée comme « verte » ne signifie pas que chaque électron qui sortira de vos prises aura été produit par une source d'énergie renouvelable. Comme tous les foyers français, le vôtre est en effet raccordé au réseau électrique national, géré par Enedis et alimenté par une sorte de « pot commun », qui mélange sans distinction des électrons issus d'une centrale nucléaire ou à charbon, et d'autres produits grâce à un panneau solaire, une éolienne ou un barrage hydroélectrique
Selon EDF, ce « mix énergétique » servi aux foyers français était, en 2017, le suivant :
Des garanties d'origine pour tracer l'électricité verte
Toutefois, pour assurer une traçabilité de l'électricité verte injectée dans le réseau, les institutions européennes ont trouvé une parade : la garantie d'origine renouvelable (GO). Soit un document électronique qui, comme son nom l'indique, garantit que l'électricité injectée dans le réseau par un producteur a bien été produite par une installation bénéficiant d'un certificat vert. « C'est le seul moyen de confirmer qu'on propose de l'énergie d'origine renouvelable », confirme Antoine Garcier, directeur général d'Energie d'Ici, une union de producteurs d'hydroélectricité. « Tous les autres labels sont du marketing ».
Les sources d'énergie suivantes sont éligibles aux garanties d'origine :
- l'éolien ;
- le solaire ;
- l'hydraulique ;
- la biomasse et le biogaz ;
- le géothermique...
En sont en revanche exclues :
- le nucléaire ;
- le gaz naturel ;
- le charbon ;
- le fioul ;
- le pétrole et le gaz de schiste.
Un complément de rémunération pour le producteur
Quel est l'intérêt de ces garanties d'origine ? Pour le producteur d'EnR, c'est assez simple : elles représentent un complément de rémunération. Elles ont en effet une valeur en soi, négociable sur le marché. Pour donner un ordre d'idées, cette valeur peut représenter 50 centimes d'euros sur un mégawattheure (MWh) vendu au prix de gros autour de 50 euros, soit environ 1% du prix de l'électricité verte.
Là où ça se complique, c'est que ces GO peuvent être vendues indépendamment de l'électricité dont elles sont censées tracer la provenance. Un producteur, qui possède par exemple un barrage hydroélectrique ou un parc éolien, peut ainsi, d'un côté, céder tout ou partie de son électricité sur le marché de gros, et de l'autre ses garanties d'origine. Et il y a des acheteurs. Ces GO sont notamment très recherchées... par les fournisseurs d'électricité. Pour une raison simple : elles leur permettent de « verdir » leurs offres.
De la « peinture verte » pour repeindre de l'électricité grise
En effet, tous les fournisseurs d'électricité, loin de là, n'achètent pas leur électricité verte directement à la source, chez les producteurs. Certains n'en achètent même pas du tout : ils se fournissent sur le marché de gros, en veillant à payer le moins cher possible. En France, cela signifie généralement acheter de l'électricité nucléaire.
C'est là qu'intervient le tour de passe-passe : pour transformer cette électricité « grise » en électricité « verte » - la métaphore est d'Antoine Garcier - il existe une solution assez simple : acheter de la peinture verte. Ou, en l'occurrence, des garanties d'origine, éventuellement venues de l'étranger. La seule contrainte est de trouver un équilibre, sur une année (1), entre la quantité d'électricité vendue dans le cadre des offres vertes, et son équivalent en garantie d'origine.
Vincent MIGNOT
Après une maîtrise d’Histoire puis une maîtrise en Sciences de l’information et de la communication, Vincent MIGNOT devient journaliste en... Lire la suite
© MoneyVox / VM / Octobre 2019