Le Conseil d'État a rejeté vendredi le recours engagé par l'Association des « Américains accidentels », regroupant des Français nés sur le sol américain, opposés à l'application en France d'une réglementation fiscale américaine dont ils s'estiment victimes : le Fatca.

Adopté par Washington en 2010, et appliqué en France depuis 2014, le Foreign account tax compliance act (Fatca) permet à l'administration fiscale américaine de demander aux banques étrangères des informations sur leurs clients considérés comme des « personnes américaines ». Cette application était contestée par les Américains accidentels, ces Français disposant d'une double nationalité en raison de leur naissance sur le sol américain, et aujourd'hui confrontés à des tracas administratifs et à des problèmes bancaires.

Pas de défaut d'exécution

Dans sa décision, consultée par l'AFP, la plus haute juridiction administrative française a jugé infondée la requête des Américains accidentels, estimant que les actes réglementaires pris pour l'application de cet accord ne se trouvaient pas dépourvus de base légale. Le Conseil d'Etat a ainsi suivi les conclusions du rapporteur public, qui avait estimé lors d'une audience début juillet que le Fatca ne présentait pas de défaut d'exécution « avéré » mais tout au plus « des difficultés techniques de mise en œuvre ».

« Une telle appréciation est pourtant directement contredite par différents rapports parlementaires, de même que par la Cour des comptes », qui avait déploré en 2017 que les États-Unis n'aient transmis « aucune information » au fisc français, a réagi l'Association des américains accidentels. L'association « regrette profondément que ses critiques juridiques n'aient pas été entendues par le Conseil d'État et déplore une occasion de résistance manquée face à l'extraterritorialité du droit américain », a-t-elle ajouté dans un communiqué.

Outre l'absence de réciprocité dans la mise en œuvre de l'accord, l'avocat des Américains accidentels, Me Patrice Spinosi, avait invoqué pour contester l'application du Fatca « l'absence de garanties sur la protection des données personnelles ». Un point là aussi contesté par le Conseil d'Etat, pour qui « les informations collectées et transférées dans le cadre du traitement litigieux ne peuvent servir qu'à des fins fiscales » et sont par ailleurs « strictement limitées et proportionnées ».

Plainte auprès de la Commission européenne

Dans son communiqué, l'Association des Américains accidentels a fait savoir qu'elle allait « saisir la Commission européenne d'une plainte pour manquement au droit de l'Union », regrettant que le Conseil d'Etat ait refusé d'interroger la Cour de justice de l'Union européenne pour trancher cette question.

Depuis l'entrée en vigueur du Fatca, certains « Américains accidentels » se sont ainsi vus réclamer plusieurs milliers d'euros d'impôts par les Etats-Unis sans avoir jamais travaillé dans ce pays. D'autres ont vu leur compte bancaire clôturé, leur banque craignant des sanctions américaines. D'autres encore se trouvent exposés à des poursuites judiciaires, faute de pouvoir transmettre leur numéro d'identification fiscale américain, dont ils ne disposent pas.

Pour dénoncer cette situation, l'Association a multiplié les contacts depuis deux ans au niveau politique. En mai, ils ont reçu le soutien d'une mission d'information parlementaire, qui a estimé que le retrait de l'accord Fatca se poserait si aucune avancée n'intervenait.