Comme l'an passé, une correction des marchés et l'endettement de certains acteurs restent les deux principaux risques identifiés par l'Autorité des marchés financiers (AMF) en 2019, sur fond de ralentissement économique et d'incertitudes géopolitiques.

« Nous avons un environnement général de marché moins porteur depuis l'année dernière », marqué par « une moindre croissance économique dans beaucoup de pays » et une « hausse de l'incertitude et des tensions géopolitiques croissante », a relevé, mardi, Benoît de Juvigny, le secrétaire général de l'AMF, à l'occasion de la présentation de la « cartographie 2019 des marchés et des risques ». Pour autant, le « changement des anticipations de politique monétaire », que ce soit de la Réserve fédérale américaine (Fed) ou de la Banque centrale européenne (BCE), a soutenu les cours des actions, dont les valorisations sont élevées au regard des fondamentaux économiques, note le rapport de l'AMF.

Dans ce contexte, « les risques qui sont liés à cet environnement prolongé de bas ou très bas taux d'intérêt nous paraissent toujours majeurs », a poursuivi Benoît de Juvigny, citant la « re-tarification brutale des actifs financiers », « les problématiques des trajectoires d'endettement potentiellement difficilement soutenables » ou encore « les prises de risques des investisseurs liées à cette recherche tous azimuts de rendement ».

La politique monétaire scrutée par les investisseurs

« La politique monétaire est venue en facteur de soutien de ces marchés actions alors que quand l'on regarde les fondamentaux, nous estimons qu'il y a des vulnérabilités et que toute modification ou déception sur les politiques monétaires serait de nature à provoquer une correction sur ces marchés », a expliqué de son côté Stéphane Gallon, chef économiste de l'AMF. In fine, compte tenu de la difficulté des banques centrales à normaliser leur politique monétaire, « cela ouvre même la voie », selon Stéphane Gallon, « à des risques du type scénario à la japonaise », où la banque centrale n'a jamais réussi à relever ses taux.

Par ailleurs, cet environnement de taux d'intérêt très bas, voire négatifs pour certains pays comme l'Allemagne ou la France, est « porteur de risques pour la profitabilité d'un certain nombre d'acteurs du secteur financier comme les banques et cela met également beaucoup de pression sur les marges et les frais pour tout un tas d'autres secteurs comme la gestion d'actifs », a complété le chef économiste de l'AMF. Il induit également, observe l'AMF, une recherche accrue de rendement des investisseurs pouvant les conduire à privilégier des actifs plus risqués.

Les dépôts bancaires continuent à phagocyter l'épargne

Les « volumes élevés d'obligations spéculatives » (de la catégorie « high yield » ou à « haut rendement » qui regroupe les entreprises les moins bien notés par les agences de notation) ont ainsi retenu l'attention du gendarme de la Bourse, qui ne constate pas d'amélioration sur les trajectoires d'endettement depuis 2018. L'AMF relève également un « emballement des fonds de financement privé ou des fonds immobiliers ». « C'est le signe que les investisseurs, dans le cadre de leur recherche de rendement, se sont dirigés vers des classes d'actifs moins liquides », a estimé Stéphane Gallon.

Enfin, tendance de fond, « il y a toujours davantage d'épargne qui va se placer sur les dépôts bancaires », qui sont des placements sûrs, mais ne rapportant rien en nominal, au détriment des investissements en actions, ce qui « n'est pas sain », a-t-il jugé. « Les épargnants sont toujours la proie rêvée de différentes escroqueries possibles » avec en particulier le retour « d'arnaques sur les crypto-actifs », a-t-il ajouté, qui n'est pas sans lien avec le rebond du cours du bitcoin.