Les niches fiscales sont parfois « efficaces » mais peuvent également nuire à la « progressivité de l'impôt », a estimé lundi le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin, qui préconise de les encadrer, notamment en les mettant sous conditions de ressources.

Aujourd'hui, seuls les « 45% » de Français les plus riches « payent l'impôt sur le revenu », et « 10% des contribuables payent 70% de cet impôt », a souligné Gérald Darmanin lors d'une conférence de presse, estimant que la « justice fiscale » existait « déjà en partie » en France. Mais « peut-être y a-t-il des choses qui donnent des coups de canif à ce contrat que nous avons. Et parmi ces coups de canif que nous pouvons imaginer » et qui « empêchent la progressivité de l'impôt », il y a « les niches fiscales », a poursuivi le ministre.

Selon Gérald Darmanin, qui assure s'exprimer en tant que « citoyen de la République », ces niches fiscales « sont parfois efficaces ». « Elles servent parfois à des choses très concrètes » comme lutter « contre le travail au noir par exemple », a-t-il détaillé.

La moitié des niches fiscales profitent aux 9% des personnes les plus riches

Mais « sur les 14 milliards d'euros que coûtent les niches fiscales (...) les 9% de contribuables les plus riches » en captent « 7 milliards », « c'est-à-dire que la moitié des niches fiscales » profitent aux « 9% des personnes les plus riches », a-t-il insisté.

Le ministre, qui estime que les Français ont « soif de justice fiscale », a préconisé dans une interview au Parisien d'encadrer ces dispositifs, soit « en diminuant le plafond global des niches », soit en ne les octroyant que « sous conditions de ressources ». « Peut-être qu'on pourrait se dire que lorsqu'on change son simple vitrage pour passer en double vitrage, la classe moyenne mériterait d'être aidée » et que « les gens qui gagnent beaucoup d'argent pourraient (...) le financer en partie eux-mêmes », a-t-il détaillé lundi.

La réduction des niches fiscales est l'une des suggestions les plus populaires sur le site du « grand débat », lancé par Emmanuel Macron à la suite du mouvement des « gilets jaunes », où certains appellent à une « remise à plat » des dispositifs en vigueur. Selon la Cour des comptes, près de 450 niches fiscales existent actuellement en France. Parmi les plus connus figurent le dispositif Pinel, l'aide à l'emploi à domicile ou le Crédit d'impôt pour la transition écologique (CITE).

Aucune condition de ressource n'existe actuellement pour pouvoir bénéficier de ces dispositifs. Depuis 2009, un plafonnement a cependant été introduit pour faire en sorte que les crédits d'impôt cumulés dont bénéficient les ménages ne dépassent pas un certain seuil. Le total des avantages fiscaux d'un foyer ne peut ainsi pas dépasser 10.000 euros aujourd'hui, ou 18.000 euros pour certains avantages (investissements en Outre-mer et dans le cinéma). Des plafonds qui pourraient donc être revus par le gouvernement.

Garder un outil incitatif

« L'idée, c'est de garder l'outil incitatif pour la très grande majorité des contribuables, mais de se dire que quand on est très aisés on n'en a pas besoin », explique l'entourage de Gérald Darmanin, qui estime que le « curseur reste à fixer ». « Il n'y a pas d'objectif de recettes. Ce n'est pas une mesure de rendement budgétaire mais de justice fiscale », a-t-on ajouté.

En 2018, le coût total de ces dispositifs s'est élevé à 100 milliards d'euros. Selon Bercy, les 14 milliards d'euros évoqués par Gérald Darmanin concernent uniquement les réductions et crédits d'impôts sur l'impôt sur le revenu.