Le président de la Cour des comptes Didier Migaud a appelé jeudi à ne pas « relâcher les efforts » entrepris pour assainir les finances publiques, malgré la crise des « gilets jaunes », qui a conduit l'exécutif à accroître les dépenses pour 2019.

« Nous sommes conscients que les choix à faire et les arbitrages à rendre sont difficiles », a reconnu Didier Migaud lors de l'audience solennelle de rentrée de la Cour, en présence du Premier ministre Edouard Philippe. Mais « il reste possible de répondre aux attentes qui se sont exprimées sans renoncer aux engagements pris devant les Français et sans renoncer à l'effort de redressement des comptes publics », a-t-il poursuivi.

La France exposée à une hausse des taux d'intérêt

Selon le président de la Cour des comptes, « des efforts ont incontestablement été réalisés ces dernières années » qui ont permis de réduire « de façon ininterrompue » le déficit. Pourtant « ces efforts de redressement semblent marquer le pas », a-t-il regretté. « La conséquence de cette situation, nous la connaissons : notre pays ne parvient pas à stabiliser sa dette publique », proche de « la barre symbolique des 100% de notre produit intérieur brut », a-t-il souligné.

Une situation qui expose la France « aux conséquences d'une remontée des taux d'intérêt que nous savons probable, voire certaine » et risque d'entamer « la crédibilité de notre pays » face à nos partenaires européens, selon Didier Migaud.

Au moins 3,2% en 2019

Selon Bercy, le déficit public, qui s'est réduit de façon ininterrompue depuis 2009, devrait s'établir à 2,6% du PIB en 2018, soit un niveau similaire à celui de 2017. Pour 2019, le gouvernement avait à l'origine prévu un léger rebond (2,8%) lié à la transformation du CICE en baisse de charges pérennes, mais inférieur à la limite des 3% fixée par la commission européenne.

En raison de la crise des « gilets jaunes », l'exécutif a toutefois décidé de relâcher la contrainte budgétaire, en annonçant une série de mesures pour le pouvoir d'achat, chiffrées à 10 milliards d'euros. Selon Bercy, le déficit devrait ainsi s'établir à 3,2% du PIB en 2019. Mais selon plusieurs économistes, le dérapage pourrait être plus important, en raison notamment du ralentissement de la croissance.

« Accélérer la transformation de l'action publique »

« La fin d'année 2018 a conduit à des attentes très fortes à l'égard de l'Etat », a souligné Didier Migaud. Mais « les circonstances actuelles imposent non pas de freiner mais d'accélérer » la « transformation de l'action publique », a-t-il dit. « Du côté des recettes, des marges existent, en remettant par exemple à plat les trop nombreuses niches fiscales et sociales qui grèvent nos ressources » et « nuisent à l'équité du prélèvement à l'impôt », a-t-il estimé. Quant aux dépenses, des améliorations sont possibles, en accélérant « la transition numérique des services publics » et en réduisant « les effets d'aubaine induits par certains transferts sociaux », a-t-il conclu.