La Banque de France, engagée depuis 2011 dans une vaste réorganisation, doit revoir l'étendue de ses missions pour identifier d'éventuelles redondances avec d'autres acteurs et réduire ses coûts encore élevés, plaide lundi un rapport de la Cour des comptes.

« Un réexamen de ses missions économiques et sociales apparaît dès à présent nécessaire, en concertation avec l'État, et la transformation de la Banque devra se poursuivre au-delà de 2020 », horizon actuel fixé pour sa réorganisation, souligne ce rapport. L'exécution du plan de transformation est actuellement « conforme à la trajectoire retenue », mais raisonne à mission et à périmètre géographique constant ce qui en « limite l'ampleur », juge la Cour, notant que « le réseau de la Banque restera en 2020 le plus dense » du système des banques centrales de la zone euro.

Dans ce contexte, « les services aux particuliers et aux entreprises devront en particulier faire l'objet d'une analyse à partir des besoins de ces publics et d'un recensement des institutions intervenant sur les mêmes thématiques. Le nouveau contrat que la Banque conclura avec l'État devra en tirer les conséquences », affirme le rapport. La Cour des comptes estime aussi qu'en dépit de la diminution de l'utilisation des billets de banque et donc de la baisse prévisible des billets à recycler, la Banque de France a choisi de construire deux nouveaux centres de recyclage fortement automatisés. « La pertinence de ces choix coûteux (...) n'est pas établie. » Les juges estiment par ailleurs que malgré la réduction de 15% des effectifs entre 2011 et 2017, divers avantages et mécanismes de congé maintiennent les dépenses sociales à « un niveau très élevé », réclamant « des objectifs chiffrés de réduction ».

80 millions pour un Rembrandt

Plus piquant, la Cour épingle la Banque de France concernant sa politique de mécénat. « Les dispositifs fiscaux particulièrement attractifs en matière de mécénat culturel ont pu conduire la Banque à se substituer aux mécènes privés ou à l'État, avec notamment l'acquisition en 2014 d'un tableau de Rembrandt pour 80 millions d'euros », relève le rapport. « Cette politique de mécénat devrait être plus clairement recentrée sur des actions en lien avec ses missions. » Dans une lettre adressée à la Cour et incluse aux rapport, le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau a précisé qu'un certain nombre de recommandations avaient déjà fait l'objet de décisions de son institution.

Il souligne toutefois des « divergences de vues » avec les juges, évoquant des « réalités qui ne me semblent pas suffisamment prises en compte ». Notamment, « la Banque de France ne s'auto-attribue pas » ses missions, qui « résultent pour l'essentiel de votes du législateur » ou « de décisions explicites des autorités publiques », explique-t-il. Concernant les ressources humaines, il estime que « la Cour mésestime l'ampleur des transformations engagées ». En particulier, le régime de congé « n'est pas nécessairement plus avantageux que celui des agents de la fonction publique d'État », assure-t-il.

Dans un courrier séparé, les ministres de l'Économie et des Comptes publics saluent les progrès des dernières années, tout en disant « souhaiter que la Banque de France poursuive ses efforts pour (...) réduire encore davantage ses dépenses ». Ils affirment par ailleurs partager l'analyse de la Cour sur « la nécessaire poursuite d'un suivi de l'évolution de la masse salariale » de même que les recommandations sur la réduction des dépenses de personnel.