La Banque de France continue à se préparer à un éventuel échec des discussions entre l'Union européenne et le Royaume-Uni autour de l'accord sur le Brexit, a déclaré vendredi le gouverneur de l'institution François Villeroy de Galhau, citant notamment la compensation ou l'assurance comme sujets de vigilance.

L'UE et le Royaume-Uni se sont entendus la semaine passée sur un projet d'accord de retrait de près de 600 pages, qui doit répondre aux interrogations sur le départ du Royaume-Uni. Un sommet extraordinaire européen doit se tenir dimanche pour finaliser ce texte. Mais « dans un contexte encore incertain, la prudence s'impose : même si nous ne la souhaitons pas, nous devons aussi nous préparer à faire face à une situation éventuelle » d'échec des discussions concernant cet accord, a déclaré François Villeroy de Galhau lors d'une conférence à Paris vendredi. Si un tel scénario venait à se réaliser, l'analyse de la Banque de France, tout comme celle de la Banque centrale européenne, ne fait pas ressortir à ce stade de risque majeur pour la stabilité financière. Pour autant, certaines activités ne doivent pas moins faire l'objet d'une vigilance particulière, a prévenu le gouverneur de la Banque de France.

Le suivi de la compensation des dérivés inquiète

C'est notamment le cas de la compensation, nom de cette activité cruciale consistant principalement à tenir la comptabilité des échanges entre acteurs financiers sur les places de marché mondiales et à garantir la bonne réalisation des transactions entre tous les opérateurs. « La compensation des dérivés de taux mérite (...) un traitement particulier car les chambres de compensation britanniques occupent une position de quasi-monopole dans ce secteur. En cas de No Deal Brexit [Brexit sans accord avec l'UE, NDLR] et en l'absence de mesures particulières, ceci pourrait représenter un risque » pour la stabilité du système financier, s'est inquiété M. Villeroy de Galhau.

Face à ce risque, le banquier central a plaidé pour le maintien à court terme d'un régime dit « d'équivalence », permettant sous certaines conditions aux chambres de compensation britanniques de continuer de fournir des services de compensation aux institutions financières européennes. « Mais cette solution devrait clairement rester temporaire, sur une durée limitée à une grosse année », a-t-il prévenu. À plus long terme, « nous avons absolument besoin de davantage de concurrence », a jugé François Villeroy de Galhau, appelant notamment de ses vœux « le développement à Paris d'une offre de services de compensation renforcée et complétée dans le domaine des produits dérivés de taux d'intérêt ».

Dans un autre secteur, « notre principal point d'attention aujourd'hui [en cas d'absence d'accord sur le Brexit, NDLR] concernerait la protection de la clientèle ayant souscrit des contrats auprès d'entreprises britanniques, notamment dans le secteur des assurances », a-t-il ajouté.

AEMF : « éviter de porter préjudice à la stabilité du marché »

De son côté, l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) a également dit vendredi soutenir le maintien de l'accès des chambres de compensation britanniques aux opérateurs financiers européens en vue « de limiter le risque de perturbation des mécanismes de compensation et d'éviter de porter préjudice à la stabilité du marché financier de l'Union européenne ». Cette autorité a par ailleurs précisé s'être déjà engagée dans un travail préparatoire avec les chambres de compensation britanniques en question, en vue d'un possible échec des discussion dimanche et en prévision de la sortie effective du Royaume-Uni hors de l'Union européenne, le 30 mars prochain.