Les personnes souhaitant changer d'établissement bancaire pour une banque en ligne ou une néobanque peuvent se retrouver coincées avec leur PEL. Leur ancien établissement refuse le plus souvent d’alimenter leur Plan épargne logement via leur nouveau compte. Pourquoi un tel refus ?

Le volet mobilité bancaire de la loi Macron, entré en vigueur en février 2017, facilite certes le changement de compte courant. La banque d’accueil se charge de domicilier les opérations récurrentes (virements et prélèvements) sur le nouveau compte de dépôt. Toutefois, cette loi n’a pas gommé tous les freins à la mise en concurrence des banques, les produits d’épargne n’étant pas pris en charge par le mandat de mobilité. Concrètement, pour changer totalement d’établissement, les clients doivent clôturer et réouvrir eux-mêmes dans leur nouvelle banque certains supports, comme les livrets. D’autres placements peuvent être transférés, ce qui permet de conserver leur antériorité. C’est le cas d’un produit chouchou des ménages : le Plan épargne logement (PEL), détenu par près d’un tiers des Français (1).

Mais son transfert est à la charge du client « switcheur » et s’avère de plus en plus onéreux. Selon une étude que nous avons menée en novembre 2017, les banques ont augmenté de 8% les frais de transfert du PEL rien qu'entre 2017 et 2018. Résultat, les frais de transfert d’un produit d’épargne-logement (PEL ou CEL) reviennent en moyenne à 93 euros. La facture pouvant grimper à 150 euros dans certaines enseignes (2). Pour éviter de payer cette somme, mais aussi simplement pour conserver leur PEL lorsqu'ils souhaitent changer d'établissement pour une banque en ligne (à l'exception de Boursorama et Hello Bank) ou une néobanque - les néobanques ne distribuant ni CEL ni PEL - les particuliers n'ont d'autre choix que de garder leur épargne-logement dans leur ancien établissement. Nouveau problème : son maintien peut engendrer de nouveaux frais bancaires.

A lire aussi : Comment transférer son PEL dans une autre banque ?

Un risque de facturation de frais de tenue de compte

Sur le forum de cBanque, des internautes souhaitant changer de banque relatent en effet fréquemment la même histoire. Pour conserver leur PEL et éviter les frais de transfert, ils se sont rendus en agence afin de modifier le compte depuis lequel sont débités les versements obligatoires. Réponse du conseiller : c’est impossible… Le prélèvement doit être effectué depuis un compte détenu dans les livres de la banque. Un vrai frein à la mobilité bancaire ! Ces clients doivent donc conserver un compte, certes sans moyen de paiement, mais qui engendre souvent la facturation de frais de tenue de compte, revenant en moyenne à 24 euros par an. Ces frais peuvent faire l'objet d'une négociation entre le client sur le départ et sa banque. Mais, concrètement, leur exonération dépend du bon vouloir de l'établissement.

Interrogées sur cette obligation, trois des cinq enseignes que nous avons sollicitées nous ont effectivement confirmé obliger leurs clients à maintenir un compte de dépôt. Elles invoquent des contraintes réglementaires, liées au suivi des versements obligatoires sur le plan. L’une d’entre elles nous a par ailleurs indiqué qu’il n’est pas possible d’alimenter un PEL via un crédit. Pour s'en assurer, les sommes devraient au préalable transiter par un compte interne, pour vérifier notamment que celui-ci n'est pas à découvert. Seule la Caisse d’Épargne a tenu un discours différent : « Il n’existe à ce jour aucune obligation légale » obligeant les clients à conserver un compte courant, nous a-t-elle répondu. « Le titulaire peut alimenter son PEL par des versements en espèces ou à partir d'un compte courant, la réglementation n’interdit pas que le PEL soit alimenté par un tiers ».

Plus une contrainte technique que juridique ?

De fait, la nécessité de détenir un compte semble davantage être liée à une contrainte technique que juridique. Concernant le mode d’alimentation du PEL, le code de la construction et de l’habitation parle seulement de « versements » sans qualifier la nature et les modalités des opérations. Et comme l’épargne-logement est un produit ancien, apparu bien avant la mise en place des récentes normes bancaires comme SEPA, les banques n’ont probablement pas modifié leur fonctionnement et ont conservé des prélèvements internes pour alimenter les PEL de leurs clients. Et rien ne les pousse à revoir leur process : le changement de procédure impliquerait de leur côté des dépenses... pour permettre à leurs clients de s'en aller.

En savoir plus sur le fonctionnement du Plan épargne logement

(1) Le nombre total de plans d’épargne-logement s’établit à 15,4 millions d’unités fin 2017 d’après l’Observatoire de l’épargne réglementée de la Banque de France (juin 2018). (2) Tarifs en vigueur à octobre 2018.