Les plateformes de prêts affichent des promesses de rendement alléchantes, jusqu’à 10% par an. Mais le crowdlending n’est pas sans risque… En cas de défaut de l'entreprise emprunteuse, les épargnants risquent de perdre intérêts et capital. Une fois ces impayés déduits, que rapportent réellement les prêts participatifs ?

Mois après mois, la hausse des prix se confirme. Une mauvaise nouvelle pour les épargnants ! L’inflation annuelle, qui dépasse désormais la barre des 2%, vient en effet rogner le taux d’intérêt des placements. Dans ce contexte, les supports garantis - notamment les fonds euros des assurances-vie qui ont rapporté 1,83% en moyenne en 2017 – ne protègent pas les investisseurs de la hausse des prix.

Les épargnants s’adaptent et semblent davantage enclins à miser sur des placements un peu plus risqués. En atteste par exemple l’engouement récent pour les unités de comptes qui représentent désormais 30% des cotisations versées sur les assurances-vie. Pour diversifier leur portefeuille financier, certains épargnants peuvent également être tentés par le crowdlending. C’est-à-dire par le financement de prêts octroyés à des entreprises via une plateforme jouant le rôle d’intermédiaire.

Le crowdlending : une alternative dans un contexte de taux bas ?

D’après Financement Participatif France (FPF), l’association qui fédère la plupart des plateformes de l’Hexagone, le crowdlending a attiré 195 millions d’euros en 2017, deux fois plus qu’en 2016. Et pour cause, ces sites affichent des promesses de rendement élevées : 4%, 6% voire 10% de taux d’intérêt annuel. Ces rémunérations ne sont toutefois pas garanties mais conditionnées au fait que les entrepreneurs remboursent leur emprunt. Ce qui fait donc du crowdlending, en fonction du profil de l’emprunteur et de son projet, un placement risqué voire spéculatif. Et rentable ?

Pour se donner une idée de la rentabilité des prêts participatifs, nous avons compilé les taux de rendement interne (TRI) d’une dizaine de plateformes dans le tableau ci-dessous. Le TRI net correspond au taux d’intérêt annuel moyen des prêts une fois déduits les défauts et retards de paiement connus. Le TRI brut indique, lui, le rendement maximum des placements si toutes les entreprises remboursent en temps et en heure leurs échéances.

PlateformeNombre de
projets financés
TRI brutTRI net
Anaxago98ncnc
Bolden1337,31%6,81%
Credit.fr3888,81%7,17%
Enerfip425,60%5,60%
GwenneG103,61%1,71%
Homunity1910,00%9,00%
Immovesting59,99%9,99%
Koregraf27ncnc
Lendix4786,03%5,68%
Lendopolis2137,72%4,22%
Les Entrepreteurs786,44%6,44%
Lymo449,80%9,80%
Pretup208nc5,59%
Prexem797,38%4,25%
Tributile125,00%4,00%
Unilend4218,54%3,42%
nc : information non communiquée

Les données, compilées le 14 août, sont liées aux financements octroyés depuis le lancement des plateformes. Par exemple pour Les Entreprêteurs, le tableau se lit : au 14 août 2018, sur les projets financés depuis 2016, le TRI net comme brut est de 6,44%, ce qui signifie qu’à ce stade aucun des 78 prêts octroyés n’est en défaut ou en retard de paiement.

Toutes les plateformes ne jouent pas encore le jeu

Le taux de rendement interne est un des nouveaux indicateurs de performance introduits par FPF. Depuis novembre 2017, l’association invite en effet ses adhérents à rendre public une dizaine de statistiques supplémentaires en plus des indicateurs légaux. Objectif : faciliter la comparaison des plateformes et rassurer les épargnants. Toutefois, près d’un an après la mise en place de ces statistiques communes, moins de la moitié des plateformes les mentionnent. C’est le cas, et cela se comprend, des sites ayant lancé récemment leurs premières collectes. Mais aussi d’acteurs plus anciens comme Wiseed et Lendosphère. D’autres encore, Anaxago, Koregraf et Pretup, ne communiquent pas en totalité les indicateurs de FPF. Les deux premières donnent le TRI année par année et non depuis leur lancement. Quant à Pretup, elle ne communique pas son taux de rendement brut.

Un taux de rendement moyen de 6%

Premier enseignement, le taux de rendement interne net des plateformes prises en compte atteint en moyenne 6%. Un taux d’intérêt élevé à mettre en perspective avec la nature de ce placement… Ce taux reflétant d’une part le risque accru de perte en capital, et d’autre part le fait que l’épargne est bloquée jusqu’à 5 ans.

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Par ailleurs, derrière cette rémunération se cachent en réalité de fortes disparités selon les acteurs. Le TRI net atteignant près de 10% pour les plateformes de crowdfunding immobilier (Immovesting, Lymo et Homunity), contre moins de 2% pour le site dédié aux projets bretons GwenneG. Les épargnants doivent-ils en conclure qu’il faut miser exclusivement sur le crowdfunding immobilier ? Aucunement. Comme pour tout placement, le crowdlending nécessite de diversifier son portefeuille afin de diluer le risque. Comment ? En investissant de petits montants mais sur des projets divers et nombreux. De plus, le crowdfunding immobilier est celui qui a fait face aux échecs les plus retentissants, à l’image du redressement judicaire l’année dernière du promoteur immobilier Terlat qui s’était financé sur Wiseed et Anaxago.

Des plateformes ayant fait face à des impayés importants

Autre enseignement, les poids lourds du secteur sont globalement ceux qui accusent le plus de défauts et de retards de paiement. Ainsi, le TRI des prêts sur Unilend - la plateforme qui après Lendix attire le plus de fonds - ressort à seulement 3,42%, alors qu’à ce stade il aurait pu dépasser 8% si toutes les entreprises avaient honoré leur dette comme prévu. L’une des explications réside dans le fait que la plateforme a été parmi les pionnières en France. Celle-ci a donc essuyé les plâtres avant d’améliorer son processus et ses critères de sélection. Une phase de rodage qui s’observe dans son taux de rendement interne année par année. Les prêts accordés en 2015 ont pour l’heure généré un TRI de 2,23%, contre 6,02% pour ceux octroyés en 2017. Ce constat vaut également pour Lendopolis et Prexem. Leur TRI net étant respectivement passé de -0,53% et 0,60% pour les prêts de 2015 à 7,63% et 5,75% pour 2017.

Quelques plateformes font toutefois exception au constat ci-dessus, à l'image du leader en France Lendix. Ce dernier brille, au contraire, par la stabilité de ses indicateurs. En effet, son TRI net ressort à 5,60% pour 2015, 5,38% en 2016 et 6,12% pour 2017. Résultat, depuis son lancement, les prêts octroyés par Lendix ont généré en moyenne 5,68% de rendement sur les 6,03% prévus au maximum.