Engagée dans une réorganisation de son activité de banque de détail, avec 3 450 suppressions de postes à la clé, la Société Générale intensifie aussi ses efforts dans la formation de ses conseillers. Objectif : marquer sa différence avec les banques 100% numériques.

Il y a maintenant près de trois ans, en septembre 2015, un tabou tombe. Depuis plusieurs années déjà, la plupart des grandes banques de détail - confrontées à des baisses de rentabilité, à l’évolution des usages des clients et à l’émergence de nouveaux concurrents - sont engagées dans un processus de réduction de leurs réseaux d’agence. Mais la Société Générale devient la première enseigne en France à assumer publiquement la fermeture progressive de 400 points de vente, 20% de son parc environ.

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« Au total, 3 450 postes vous disparaître, dont 2 500 sur la période 2018-2020 », rappelle Laurent Goutard, directeur de la banque de détail en France. « Nous menons ce plan social de façon responsable, sans départs contraints. Mais nous souhaitons rester une banque qui recrute et qui forme. »

La banque rouge et noir vient ainsi de présenter un autre pan de sa stratégie de transformation, baptisé #MonJob2020. Derrière ce mot-clic se cache un dispositif de montée en compétence de ses collaborateurs, dans lequel la SocGen compte investir 150 millions d'euros d'ici 2020, soit l'équivalent d'un million d’heures de formation, un doublement par rapport à l’effort actuel.

« Les 3/4 des collaborateurs auront changé de métier dans les 5 ans »

Dans un monde bancaire en reconfiguration sous l’effet du numérique, l’enjeu est complexe pour les enseignes traditionnelles : il faut se « digitaliser », tout en se distinguant des banques 100% numériques, en affichant une valeur ajoutée qui permette de justifier le prix payé par le client. « Etre une banque digitale mais plus proche du client » résume Stéphane Dubois, directeur des ressources humaines de la banque de détail en France et promoteur de #MonJob2020.

Premier maître-mot : l’expertise. « C’est l’ADN de notre réseau » poursuit Stéphane Dubois. Pour permettre à ses conseillers de monter en compétence, et mieux répondre aux attentes, pour partie nouvelles, de sa clientèle, la SG expérimente depuis deux ans un système d’auto-diagnostic qui permet aux collaborateurs, avec l’aide d’une intelligence artificielle, d’opérer en autonomie une sorte de bilan de compétences. « L’outil répond à la question : voilà où j’en suis aujourd’hui par rapport au métier que je veux faire à l’avenir », détaille Stéphane Dubois. Car, poursuit-il, « les 3/4 des collaborateurs auront changé de métier dans les 5 ans ». Soit parce que le métier est appelé à disparaître - les chargés d’accueil notamment, qui sont encore 1 500 aujourd’hui dans la banque -, soit parce qu’il est appelé à se transformer - les directeurs d’agence.

Industrialisation de la formation

« Tous les collaborateurs ont une place à prendre dans la banque », rassure Stéphane Dubois. A condition de monter en compétence, donc. Pour cela, la Société Générale va « industrialiser la formation », poursuit le DRH. Chaque agence sera équipée d’une tablette dédiée, permettant aux salariés d’individualiser leur démarche, en fonction des compétences à acquérir, de manière continue. Les directeurs d’agence sont également formés pour améliorer la conduite des réunions collectives.

L’adaptation du réseau de la Société Générale va également passer par une évolution de la structure managériale. « Nous réduisons le nombre de niveaux hiérarchiques », explique Laurent Goutard, le patron du réseau France « pour aboutir à une organisation plus plate et plus efficace ». Y aura-t-il moins d’opportunités managériales à la SG ? « Oui », reconnaît Laurent Goutard, « mais il y aura aussi plus d’opportunités sur des métiers d’expertise ».

Une diminution du turn-over

Autre conséquence de cette réorganisation managériale, la diminution de la mobilité géographique. Actuellement, un conseiller avait intérêt à changer de région pour monter en rémunération, par le biais de primes. Résultat : 5 000 salariés de la Société Générale, sur 20 000 environ, changent de poste tous les ans, avec des conseillers qui ne restent pas en poste plus de 3 ans. Ce turn-over va être revu à la baisse.

« Nous allons maintenir les conseillers plus longtemps à leurs postes, pour leur laisser le temps, justement, de monter en compétence », annonce Laurent Goutard. La mobilité ne sera ainsi plus le seul moyen d’ascension au sein de l’organisation, l’expertise le sera aussi. Une bonne nouvelle pour les clients, qui vivent généralement assez mal les changements incessants de conseillers.