Entrée dans l'ère de la flat tax en 2018, Plan épargne logement perdant ses plus gros atouts, taux de rémunération restant au plus bas... Face aux profondes évolutions du marché de l'épargne, comment les banques s'adaptent-elles ? Et comment réagissent leurs clients ? Nous avons posé la question à Caroline Viguier, responsable du développement marketing épargne de LCL.

Pourquoi avoir revu l’ensemble de votre offre assurance-vie, en la différenciant de celle de la maison-mère, le Crédit Agricole ?

Caroline Viguier : « Nous avons identifié que l’assurance-vie est encore perçue comme un produit complexe par nos clients. Nous voulions que l’offre soit simple et accessible à tous. L’offre LCL Vie et Prévoyance ne se limite donc pas qu’à l’assurance-vie : elle intègre aussi des solutions d’épargne-retraite et de prévoyance. L’offre peut donc convenir aux particuliers quel que soit leur profil, aux professionnels, aux mineurs, etc. »

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Cette offre va donc au-delà du contrat LCL Vie…

C.V. : « Le contrat LCL Vie, évolutif, constitue le socle de cette offre. Il permet de répondre à la plupart des besoins des clients. Les professionnels peuvent en outre souscrire un contrat Madelin intégré à cette offre, par exemple ; d’autres opter pour les options prévoyance. »

Pourquoi l’ancienne offre, avec Lionvie Rouge Corinthe, devait-elle être revue ?

C.V. : « L’assurance-vie répond à une multitude de problématiques. Notre volonté, c’était de proposer une offre évolutive, que l’on peut conserver toute sa vie. Un client peut souscrire et investir uniquement sur le fonds en euros, puis basculer progressivement vers les unités de compte plus tardivement. L’offre peut devenir plus haut de gamme. »

Les frais de versement vont-ils baisser si le client évolue ainsi vers les options plus haut de gamme ?

C.V. : « Nous avons choisi de fixer des frais de versement à un niveau relativement peu élevé, 3,5% maximum. Après, le conseiller bancaire a la main pour les réduire selon le profil du client, son patrimoine, etc. »

La flat tax est en vigueur depuis le début 2018. Avez-vous constaté une évolution du comportement des clients ?

« Nous n’avons pas constaté de changement de comportement des clients »

C.V. : « A ce jour, nous n’avons pas constaté de changement de comportement des clients. La flat tax n’a pas encore chamboulé le marché de l’épargne. On constate seulement que le Plan épargne logement ne séduit plus, avec une forte baisse du nombre d’ouvertures, mais c’est le seul changement notable. »

Les épargnants ont-ils compris l’intérêt de la flat tax, qui nivèle la fiscalité des différents produits et favorise, par exemple, l’investissement en bourse ?

C.V. : « C’est le rôle du conseiller bancaire d’expliquer l’intérêt de ces évolutions pour ses clients. En effet, la bourse a été préservée avec un Plan d’épargne en actions inchangé. Cela fait partie des arguments que l’on met en avant. »

Pouvez-vous chiffrer cette chute des souscriptions de PEL ?

C.V. : « Une baisse de 40% des ouvertures sur un an, selon les statistiques arrêtées fin avril 2018. »

Le PEL a-t-il totalement disparu des produits mis en avant par vos chargés de clientèle ?

PEL : « Une baisse de 40% des ouvertures sur un an »

C.V. : « Non. Le conseiller s’assure en premier lieu que son client est correctement équipé en épargne de précaution : Livret A, LDDS, etc. Ensuite, selon les projets, il lui propose d’autres produits. Dans ce cadre, le PEL reste dans notre gamme de produits et peut donc être proposé en vue d’une acquisition immobilière à moyen terme. »

Le PEL est-il désormais cantonné au strict rôle de produit d’épargne-logement ?

C.V. : « Effectivement, le PEL correspond désormais avant tout à des jeunes actifs qui peuvent devenir des primo-accédants. Il n’y a plus l’argument du produit au taux de rémunération avantageux et garanti pour plusieurs années. »

Quid des anciens PEL, toujours bien rémunérés ?

C.V. : « Nous n’avons pas constaté d’évolution des comportements les concernant : nos clients continuent de verser régulièrement. Et nous leur conseillons de les conserver tant qu'ils n’ont pas de besoin de liquidité. »

Comment expliquez-vous le paradoxe du Livret d’épargne populaire : plus accessible depuis 2014 mais en décollecte depuis plusieurs années ?

C.V. : « Les conditions d’attribution du LEP sont basées sur le revenu fiscal de référence (RFR) : nos conseillers sont bien informés sur ce point. »

Vont-ils chercher à le proposer à des clients qui y auraient le droit ?

C.V. : « Si un client demande des renseignements sur le LEP, bien entendu, nous l’informerons. Après, la clientèle de LCL, très urbaine, n’est peut-être pas la plus concernée par le LEP. »

Vos conseillers n’ont pas d’objectifs commerciaux sur ce produit ?

C.V. : « Il peut être proposé pour répondre à des besoins de trésorerie d’un client. Cela s’arrête là. »

Comment expliquez-vous les excellentes collectes du Livret A, alors que le taux reste à son plus bas historique ?

« Avec les taux bas, les Français se disent que ce n’est pas la peine de placer leur argent »

C.V. : « Les Français veulent miser sur des produits d’épargne rassurants. Comme les taux sont bas, pour l’ensemble des placements, ils se disent que ce n’est peut-être pas la peine de placer leur argent : ils maintiennent donc leurs avoirs sur les produits d’épargne réglementée. C’est là que nos conseillers interviennent ! Il faut conserver 3 à 6 mois de salaire sur son Livret A, en fonction des besoins, mais au-delà cela constitue une perte d’opportunité. Il y a un véritable travail pédagogique à faire auprès des clients ! »

Les livrets bancaires classiques ont eux collecté plus de 8 milliards d’euros en 2018. Comment l’expliquez vous ?

C.V. : « Nous constatons ces mêmes collectes conséquentes sur les livrets fiscalisés chez LCL. L’explication est la même que pour le succès actuel du Livret A : l’attentisme des épargnants dans ce contexte de taux bas. Il y a là un véritable paradoxe, en effet, car les rémunérations sont encore plus faibles. D’où l’importance du rôle proactif des conseillers. »

Comment réagissent vos conseillers face à des clients dotant ainsi des livrets fiscalisés ?

« Chez LCL, nous proposons expertise et conseil dédié. Et cela a un coût. »

C.V. : « Il faut faire le point avec eux en fonction de leur profil, de leurs besoins et des risques qu’ils sont prêts à prendre. Car les clients qui dotent ainsi les livrets fiscalisés disposent déjà le plus souvent de livrets réglementés au plafond. Différentes enveloppes sont alors envisageables : l’assurance-vie, le PEA, etc. Nous avons notamment une offre de mandats de gestion. »

Comment réagir à l’offre internet, à frais réduits, où se développe justement l’assurance-vie en gestion pilotée ?

C.V. : « La démarche est différente. Les banques en ligne sont très agressives sur les tarifs mais, chez LCL, nous proposons expertise et conseil dédié. Et cela a un coût. J’insiste que le fait que les mandats de gestion sont accessibles à tous types de clients : ce n’est pas réservé à la banque privée ! »