Une douzaine d'associations, dont Oxfam, le CCFD-Terre solidaire et Transparency international, ont réclamé mardi la suppression du « verrou de Bercy », dispositif controversé qui donne à l'administration fiscale le monopole des poursuites pénales en cas de fraude fiscale.

« Il est temps de mettre un terme à cette exception française qui limite considérablement les poursuites judiciaires », ont estimé dans un communiqué commun ces associations, membres de la Plateforme paradis fiscaux et judiciaires, qui regroupe 19 ONG et syndicats. « Il est essentiel que les cas de fraude les plus graves et les montages complexes douteux des grandes entreprises puissent être jugés devant les tribunaux et sanctionnés de manière exemplaire, en toute transparence », ont-elles ajouté.

Un projet de loi dans les mois à venir

Les membres de cette plateforme précisent avoir tenu ce discours mardi matin à l'Assemblée nationale, où elles étaient auditionnées par la mission d'information commune sur les procédures de poursuite des infractions fiscales, mise en place mi-janvier. « Alors qu'un projet de loi devrait être déposé devant le Parlement dans les mois qui viennent, nous saluons la volonté de l'Assemblée nationale de se saisir de cette question essentielle », souligne le communiqué.

« Pour être crédible et efficace dans sa lutte contre l'évasion fiscale, le gouvernement devra défendre un projet de loi ambitieux qui redonne notamment à la justice tous les moyens d'agir », ajoutent les signataires, au nombre desquels figurent Attac, Sherpa et le Syndicat de la magistrature.

Des « garde-fous trop faibles »

Le « verrou de Bercy », mis en place dans les années 1920, donne à l'administration fiscale le monopole des poursuites pénales en cas de fraude – un procureur ou une partie civile ne pouvant pas le faire. L'administration fiscale est toutefois tenue de suivre l'avis d'une autorité indépendante, la commission des infractions fiscales. Cette prérogative ne s'applique par ailleurs pas en matière de blanchiment de fraude fiscale. Des garde-fous trop faibles aux yeux des associations signataires, qui invitent dans leur communiqué les membres de la mission « à se prononcer en faveur » de la « suppression » de cette particularité judiciaire.

Le « verrou de Bercy » fait l'objet de vives critiques depuis plusieurs années, ses détracteurs lui reprochant d'entraver la liberté d'action des juges et de favoriser une certaine forme d'opacité. La suppression de ce dispositif s'annonce néanmoins compliquée, puisqu'il permet à Bercy de faire pression sur les fraudeurs en les menaçant de poursuites s'ils n'acceptent pas le redressement qui leur est adressé.

La mission parlementaire, présidée par le député LR Éric Diard, doit rendre ses travaux dans le courant du printemps.