Parmi les produits oubliés de la loi Macron sur la mobilité bancaire, le PEL voit ses frais de transfert exploser en 2018. Une manière pour les banques de punir les clients qui décident de les quitter.

En début d’année, l’entrée en vigueur du volet mobilité bancaire de la loi Macron s’était accompagnée d’un espoir : celui d’un marché bancaire français plus fluide et plus concurrentiel. Il est encore un peu tôt pour dire si l’objectif a été atteint. Une chose, en revanche, est déjà certaine : les banques n’ont pas toutes accepté de bon gré cette réforme. Un exemple de leur mauvaise volonté ? L’explosion des frais de transfert du Plan épargne logement (PEL), un des produits d’épargne les plus populaires en France.

Une hausse inédite par son ampleur

Certes, la hausse des frais de transfert d'un PEL - ou d'un Compte épargne logement (CEL) - n’est pas une nouveauté : certaines banques n’ont pas attendu pour s’y mettre. Mais la hausse 2018 apparaît inédite par son ampleur.

Frais de transfert de PEL ou de CEL (tarifs au 1er janvier)
Banque ou réseauTarif 2013Tarif 2017Tarif 2018Augmentation
sur 6 ans
Crédit Agricole90,83 €95,39 €102,71 €+13,08%
Banque Populaire75,23 €91,75 €99,21 €+31,88%
Crédit Mutuel61,83 €63,85 €89,20 €+44,27%
Caisse d'Epargne73,72 €87,59 €88,76 €+20,40%
BNP Paribas 62,00 €65,00 €65,00 €+4,84%
Société Générale45,00 €65,00 €65,00 €+44,44%
La Banque Postale 40,00 €43,00 €55,00 €+37,50%

L'étude effectuée sur les brochures tarifaires 2018 déjà publiées montre que cette ligne va augmenter fortement, de 8% en moyenne, entre 2017 et 2018, alors que l’augmentation moyenne des principales opérations n'est que de 1,15%. Pire, si on réduit le panel aux seules banques modifiant les frais de transfert, l’augmentation moyenne passe à 18%.

Seize banques vont appliquer des hausses supérieures à 30%, la palme revenant au Crédit Mutuel CM11, où ces frais passent de 50 à 90 euros. Soit un bond de 80% ! Le tarif moyen a même dépassé le cap des 100 euros au Crédit Agricole. Mais ce sont les clients de la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique qui décrochent le jackpot avec une facture totale de 300 euros pour transférer un PEL et un CEL. Des écarts entre les enseignes qui montrent que le prix facturé n’a qu’un lointain rapport avec le coût réel de l'opération.

Difficile, alors, de ne pas y voir une relation de cause à effet avec la mise en œuvre de la mobilité Macron. En effet, le PEL, à l’image de l’ensemble des produits d’épargne et de crédits, n’entre pas dans le périmètre du contrat de mobilité, lequel se focalise sur le compte courant. C’est donc au client, seul, de s’occuper de son éventuel transfert, autorisé par la réglementation contrairement à d’autres produits d’épargne - le Livret A ou l’assurance-vie, pour citer les plus courants.

Lire aussi : Comment transférer son PEL dans une autre banque ?

Un intérêt évident pour le transfert

Pour l’épargnant, l’intérêt de ce transfert est une évidence. Le PEL bénéficie en effet d’un taux « générationnel », garanti pour toute la durée de vie du produit. Ainsi, tout plan ouvert avant le 1er août 2016 est forcément plus avantageux, en termes de rémunération, de fiscalité et même parfois de durée de vie, qu’un autre ouvert actuellement : ce dernier rapportera 1% avant prélèvements sociaux, alors que la rémunération moyenne du stock de PEL existants était de 2,71% en septembre, selon la Banque de France. Et cela ne va pas aller en s’arrangeant : les nouveaux plans ouverts à compter du 1er janvier prochain seront de plus imposables dès la première année.

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Le PEL s’avère donc une aubaine pour les banques. Leurs futurs ex-clients ont tout intérêt à le conserver en le transférant. Un droit dont elles peuvent fixer librement le prix. La tentation de l’utiliser pour compliquer la vie, ou tout simplement pour faire payer les clients infidèles, est grande…

Vers un encadrement des frais de transfert de PEL ?

C’est une demande de longue date des associations de consommateurs, UFC-Que Choisir notamment : la gratuité des frais de transfert de PEL, ces derniers étant régulièrement présentés comme un des freins au changement de banque. Jusqu’ici, elles n’ont jamais été entendues. La forte inflation de cette ligne tarifaire pourrait-elle encourager l’exécutif à reconsidérer la question ? A suivre.

Négocier avec sa banque

Il existe une alternative au transfert : conserver son PEL dans son ancienne banque. Mais là encore, les établissements ont une parade : ils imposent généralement que les versements obligatoires sur le PEL (au moins 540 euros par an) soient prélevés depuis un compte courant qu’elles détiennent. Et la tenue de ce compte, dans la plupart des cas, donnera lieu à la facturation de frais qui, eux aussi, ont tendance à augmenter.

Reste alors la possibilité de négocier avec sa banque une exonération de ces frais. Si ce n'est pas complètement impossible, le client qui s’en va est rarement en position de force pour obtenir une ristourne !

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